4 — Le Soleil de Colombie, vendredi ler juillet 1983 Suite de la page 1 canadien connu. A une cer- taine époque, l’administration de la Nouvelle-France, man- quant de liquidités, fabriquait des billets avec des simples cartes a jouer: un fonction- naire y inscrivait un montant et un personnage officiel les signait. Arrété en 1702, Ledoux, reconnu coupable d’avoir fait de fausses car- tes-billets, fut condamné a rester les mains liées derriére le dos pendant trois ans. Ses successeurs furent nombreux mais peu organisés. Ainsi, méme au 20e siécle, durant les années trente et quarante, les faux-monna- yeurs utilisaient encore des loupes et gravaient les billets sur des plaques de métal. La moindre erreur, et tout était 4 recommencer. II fallait six mois pour produire une bonne plaque et des semaines pour imprimer les faux bil- lets. Le style de l’auteur était souvent reconnaissable, la production peu importante, et les faux-monnayeurs n’in- quiétaient pas outre mesure nos gouvernements. Mais Le crime sur papier aprés la Deuxiéme Guerre mondiale, le milieu des faux- monnayeurs changea radica- lement avec les progrés de loffset et... la mort du roi George VI d’Angleterre! L’age d'or En effet, a la suite du cou- ronnement de la reine Eli- sabeth II, la Banque du Canada émettait, en 1954, une nouvelle série de billets a son effigie. Parallélement, du- rant les années cinquante, les procédés d’impression devin- rent de plus en plus simples, grace notamment au perfec- tionnement de 1’offset ; ils per- mettaient désormais a toute personne le moindrement douée de réaliser un vieux réve universel: faire de l’ar- nt. Il se révéla que les faux- monnayeurs montréalais étaient les mieux organisés, et leurs billets de la meilleure qualité. «Ce fut le zénith des faux monnayeurs au Canada», précise l’inspecteur Paul Piché, officier responsa- ble de l'unité faillites et contrefacons de la brigade des délits commerciaux de la Gen- darmerie royale du Canada, a Montréal. Dés 1962, la GRC cr€ait le Bureau central de la contre- facon a Ottawa. Les pres- sions policiéres pour amélio- rer la sécurité de nos billets se multipliaient. En 1968, la crise atteignait un sommet avec 25 269 faux billets passés au Canada, pour une valeur nominale de $885 900. Au Québec comme dans tout le pays, les commergants_ hési- taient a accepter les billets de vingt dollars et refusaient souvent de prendre un risque avec les billets de cinquante dollars, particuliérement bien imités par les faussaires. Aussi, en juillet 1970, la Banque du Canada entrepre- nait de remplacer les anciens billets de banque émis en 1954 par les nouvelles coupures multicolores de vingt dollars, puis celles de cing, dix et cinquante dollars. Aussi, en juillet 1970, la Banque du Canada entrepre- nait de remplacer les anciens billets de banque émis en 1954 par les nouvelles coupures multicolores actuelles qui sont STATISTIQUES — CONTREFACON — 1974 A 1982 Année Passés Saisis Remarques Monnaie $ Monnaie $ Monnaie $ Monnaie $ américaine américaine Passés & saisis 1974 15 414 656 159 2277 44-920 au Canada 1975 9345 527 882 2.435 53 262 ” 1976 3.002 134 395 2 875 68 455 1977 1333 64 543 4583 111271 589 $8550 | 160015 2982200 1978 1 667 119 421 10 674 151 860 163 2 338 31013 630 902 1979 SiS 34 550 L191 46 110 = = 22 442 107 660 Province de Québec 1980 400 18 860 740 25 415 32 3.040 ~ 100 2.930 4 1981 361 10-901 888 26 775 50 050 505 440 262 5 240 1982 212 +1975 1458 38 790 S = 47 673 1.026 740 Source: Gendarmerie Royale du Canada, 1983. * Dans chaque section, la colonne de gauche indique le nombre de faux billets, la colonne de droite la valeur totale représentée par ces faux billets. C'EST PAS DROL N°: c'est pas dréle d'étre mordu par un chien. ‘L'an dernier | 400 facteurs ont subi des morsures.Tous ont da recevoir des soins médicaux. Il eut été plus facile de prévenir que de guénir. Vous étes responsable de votre chien. Aux heures de livraison du courrier, gardez-le a l’intérieur ou attachez-le hors de portée de votre boite aux lettres. C’est peu vous demander. _ Grace a votre comprehension et a votre coopér- ation, nos facteurs pourront livrer votre courrier sans risquer les morsures de votre animal favori. SOCIETE CANADIENNE DES POSTES Au nom de tous les livreurs a domicile du Canada pratiquement —invulnérables. Comme le résumera la trés sérieuse revue The Canadian Banker, «la décision de refaire le billet de banque canadien a été prise surtout pour faire face aux défis posés par l’amé- lioration constante de 1’équi- pement de reproduction dont disposent les aspirants faux- monnayeurs». Au cours des années qui suivirent, on a ainsi changé les coupures de vingt dollars, puis celles de cinq, dix et cinquan- te dollars. Tous ces billets ont désor- mais des caractéristiques tech- niques les rendant difficiles sinon impossibles a imiter. On a introduit des «points de sécurité» dans les billets cana- diens. Relief perceptible “Ce sont les petits points verts qui apparaissent assez nettement sur nos billets et qu’on peut détacher en les grattant. Les faux-monna- yeurs ne peuvent les imiter et se contentent d’imprimer des points qui ne peuvent s’en- lever. De plus, les billets de la Banque du Canada sont en majeure partie imprimés a l'aide de plaques gravées qui ont pour effet de donner un relief. perceptible au toucher sur certaines portions du bil- let. Les faux, réalisés a 1’off- set, ne présentent aucun effet de relief. Enfin, la grande netteté des impressions réali- sées par les graveurs de la Banque du Canada assure une représentation presque «vi- vante» des personnages appa- raissant sur les billets, ce qui n’est pas du tout le cas pour les faux réalisés a l'offset, qui se trahissent par le manque de détails. Ainsi sur le faux billet, les yeux des personna- ges sont plutét ternes, alors que ceux des coupures au- thentiques comportent une infinité de détails subtils. Recyclage sur le “billet vert” Conséquence directe de toutes ces améliorations, les faux-monnayeurs ont di se re- cycler, et il n'y a pas eu depuis de tentatives sérieuses de- contrefacon de ces nouveaux billets. En 1972 par exemple, sur les 5 448 faux billets passés au Canada ($74 142), 80% étaient américains, le reste imitant ceux émis au Canada en 1954. Le 7 aott 1978, le - dernier faux billet canadien «sérieux», une nouvelle ver- sion de la coupure de cent dollars (é€mission 1954), a été interceptée a Québec. Aussi, nos faux-monna- yeurs se sont-ils lancés dans la fabrication de faux billets américains suivant ainsi une tendance perceptible sur toute la planéte: la fabrication de billets d’un pays étranger. La meilleure stratégte : la collaboration Au début du siécle, plu- sieurs pays ne punissaient que la contrefagon de leur pro- pre monnaie. Mais comme l’expliquait Yves Bianco-Brun dans «Le faux-monnayage comme arme de guerre», il devint rapidement nécessaire de s’entendre entre nations. Ainsi, aprés la Premiére Guer- re mondiale, des Hongrois, s'estimant lésés par la poli- tique francaise, ont voulu saper la valeur du franc en fabriquant en Hongrie de. faux francs, pour les écouler aux Pays-Bas. Les «francs hongrois» firent énormément de bruit en Eu- rope et devaient étre a 1’ori- gine de la Convention de Genéve de 1929 sur la répres- sion du faux-monnayage. Mais l’affaire des faux hon- grois était l’oeuvre d’amateurs comparée a l’opération Bern- hard mijotée par les Nazis durant la Deuxiéme Guerre et qui visait a inonder la Gran- de-Bretagne de fausses livres sterling, pour ébranler 1’éco- nomie britannique. Depuis, une centaine de pays collaborent, et la Convention de Genéve a au- jourd’hui plus de 50 ans, «Sa ‘mise en application, estime Yves Bianco-Brun, constitue un exemple, on pourrait mé- me dire un modéle, compa- rée a celle si souvent symbo- lique d’autres mesures inter- nationales.» Finalement, il a été décidé, lors des confé- rences internationales, de confier la lutte contre le faux- monnayage a Interpol. On recommande la centra- lisation de la lutte contre le faux-monnayage, par la créa- tion d’organismes comme le Bureau central d’Ottawa et la collaboration étroite entre ces organismes. Ainsi, depuis sa fondation, le Bureau d’Ot- tawa travaille en relation étroite avec le Service secret des Etats-Unis (chargé a la fois de la lutte contre les faux- monnayeurs et de la sécurité du président des Etats-Unis) et avec le quartier général d'Interpol a Paris. Ces échanges sont nécessai- res, et c’est en collaboration étroite avec les policiers du monde entier que les corps policiers du Canada ménent la lutte contre les faux-mon- nayeurs. Opération légale D’autant plus, comme l’ex- plique le caporal Pierre Abel de l’unité faillites et contre- facons de la GRC, «que, dans certains pays d’Amérique lati- ne, il est parfaitement légal de fabriquer de faux dollars». En moyenne, une trentaine de pays voient leur monnaie contrefaite chaque année. Mais c’est le dollar américain qui est le billet le plus imité au monde. Accepté partout, il n’offre pas de grandes diffi- cultés aux faux-monnayeurs. Contrairement aux billets de plusieurs pays d’Europe, tous les billets américains ont le méme format, quelle que soit leur valeur. De plus, ils n’ont que deux couleurs, vert et noir, ce qui simplifie considérablement la tache des faux-monnayeurs, comparé par exemple au bil- let canadien qui est frappé sept fois, une fois par couleur (cing fois au recto). Billets “américains” canadiens Méme si ce billet améri- cain est accepté partout au Canada, cela ne signifie nul- lement que les Canadiens le connaissent trés bien et c’est pourquoi on assiste réguliére- ment a un déferlement de billets américains contrefaits sur le marché canadien. Le journaliste Pierre Beau- regard rapportait ainsi que la moitié seulement des faux billets américains écoulés au Canada au cours des derniéres années étaient l’oeuvre d’ orga- nisations opérant a partir des Etats-Unis. Le reste a été réa- lisé par des imprimeries clan- destines installées au Canada, dont 70% au Québec. A SUIVRE [Tiré du magazine “Justice”, juin 1983). J.P. Joannidés quitte Vancouver Suite de la page 1 été poursuivre ses études de guitare en France et qui préfé- re se faire appeler Sylvain!, ou John Korner, qui adore Aix- en-Provence... Enfin, nous avons créé la catégorie des membres-asso- ciés qui permet aux étudiants et pour trois fois rien de devenir membre 4a part entiére de l’Alliance. Ceci assure a terme un renouvellement na- turel effectif des membres. Q: Y a-t-il eu des innovations dans l’enseignement? J.PJ.: Nous avons diversifié les méthodes pédagogiques employées. Introduit les tests de niveaux, et cela de facon systématique. J’ai di voir per- sonnellement environ 3000 étudiants, pour déterminer la classe (débutant ou autre) mais aussi la dominante a travailler et la personnalité du professeur la plus apte a ce développement. Nous-avons lancé des cours de culture et civilisation fran- caise, de presse et civilisa- tion francaise — qui ont eu énormément de succés — et récemment d histoire et civili- sation francaise, avec tout léquipement pédagogique nécessaire, Ce sont un peu des cours de prestige: des pro- fesseurs de UBC viennent les suivre. Et puis, il y a eu l'expeé- rience du francais par le théatre, avec le Petit théatre du Pacifique, une innovation au niveau du Canada. Q: Avez-vous remarqué au cours de ces 6 années une évolution dans les motiva- tions, dans les raisons de s’inscrire & Alliance? j.PJ.: Au début, il y avait — presque un sentiment de géne. Beaucoup me disaient: “vous Savez, je viens par choix, je ne suis pas poussé par mon travail ou autre chose.” C’était l’époque des accusa- tions: “on veut enfoncer le francais dans la gorge des gens!” Parallélement a cela, j'ai poussé au rajeunissement des étudiants, au-dela du cercle des fidéles de 45 a 60 ans. Maintenant, la plupart ont entre 20 et 40 ans. Les motivations sont parfai- tement variées: il y a des gens qui viennent pas calcul, des - avocats qui savent l’intérét d’étre bilingue; des hommes d'affaires qui ouvrent des bureaux en France, et qui parfois y vivent une partie de l'année, des personnes qui se mettent au francais de manié- re spontanée, ou pour voyager plus facilement. Il y en a qui se sentent le devoir d’étre bilingue. Ces motivations sont parfois extrémement fortes: je me souviens de cette jeune femme dentiste, de niveau a peine intermédiaire, qui aimait tel- lement la France que pour s’y installer plus facilement elle avait abandonné son métier pour apprendre |’informati- quel Q: En septembre prochain, vous recommencez ailleurs, sirement a des milliers de kilométres d'ici. Dans quel esprit? j.PJ.: Ml faudra repartir de zéro. Vous savez, métier assez ingrat que je fais. Quand on arrive, on est remis en question. On ne vous attend pas comme un manda- rin. Il vous faut prouver pour obtenir l’adhésion. Et puis chaque poste varie en fonction des nationaux, des gens qui fréquentent l’Alliance. C’est a chaque directeur de procéder comme il l’entend. La per- ' sonnalité de chaque individu joue beaucoup. * Saree c'est un.