8 CTR Soleil 46 Cotckabie, sicindried) 36 mare 1979 La Société Historique Franco-Colombienne est heureuse de yous annoncer qu'une personne vient de prendre en main le projet “collection photos”. Il s’'agit de Mme Anita Charland que vous pouvez appeler au 266-4824, aprés 20h00. Anita ira inspecter vos trésors photographiques et, avec votre permission, se chargera de la reproduction des photos qu'elle choisira. La Société Historique Franco-Colombienne et Le Soleil de | Colombie se partageront un kiosque au Salon du Livre, qui se tiendra du 2 au 7 avril au Robson Square, a Vancouver. Devenez membre de la Société Historique Franco-Colombienne Cotisation annuelle: $4.00 membre individuel $10.00 membre groupe A MME | Saviez-vous qu’il existait un journal en francais au début de la colonie? eK KKK LE COURRIER DE LA NOUVELLE-CALEDONIE informait les premiers colons de la ME Catherine Lévesque,, 211, 46@me avenue ouest, Vancouver, C.B.. V5Y 2X2 Colombie-Britannique Procurez-vous les exemplaires existants’ du 11 septembre 1858 au 8 Octobre 1858. ECRIVEZ A: a/s Mme Catherine Lévesque, 211, 46eme avenue ouest, Vancouver, CB. V5Y 2X2 — SOCIETE HISTORIQUE FRANCO-COLOMBIENNE | PRIX: $1.25 + $0.25 pour la poste : TRISTE RETOUR A ATHABASCA [suite] J’ouvre une parenthése pour vous donner quelques explications. Vous pourriez croire que le fait de pren- dre ainsi des métiers subal- ternes comme ceux que nous acceptions pouvait porter atteinte a notre dignité ou a la considération de ceux qui nous cotoyaient, commer- cants, banquiers, docteurs ou autres situations libéra- les. Il n’en était rien et je pense que, méme actuelle- ment, il en est toujours ainsi. En effet, le travail, la-bas, n’a jamais abaissé l"homme ou créé une Classe inférieu- re sur une échelle sociale artificiellement fabriquée. Il n’était pas rare de voir le garcon de l’écurie de louage ‘travaillant en overall dans la journée et brossant les che- vaux, venir au repas du restaurant de l’hétel, impec- cable et souliers vernis, s’as- seoir 4 cété de l’avocat ou d’un pontife du lieu, sans que cela pit créer une géne ou une surprise de part e d’autre. Quand j’étais libre de mon travail, jallais souvent me. caler dans un pullman du hall, regardant le va-et-vient des voyageurs ou des pas- sants et souvent invité par lun ou l’autre a prendre un drink au bar — «Hello! Frenchie, come on!» — ot a fumer un bon cigare — «Peter, have a cigar...» J'ai connu dans un voyage a Edmonton un chauffeur de taxi francais qu’on appelait «le grand Charlie» et qui était, en réalité, un Bour- bon. Clément me parlait aussi souvent d’un de ses amis, francais de bonne souche, ayant sa licence en droit, qui, 4 Vancouver, travaillait dans les égouts de la ville et qui, le soir, en smoking, était recu dans la meilleure socié- té. Par la suite, ayant ac- quis pleine connaissance de la langue, il avait épousé une jeune héritiére trés riche et était entré dans l’affaire de son beau-pére, gros commer- cant en fer. Pour nous, en effet, dans cette recherche d'une place, lemploi courant et correct de la langue était un han- dicap pour accéder & un poste autre que manuel. En France, un travail manuel, quelconque efit été, pour notre bourgeoisie, un vice rédhibitoire, car on n’accep- tait, & ’époque, ni celui qui descend, ni celui qui monte, méme si l’on veut gagner malgré tout sa vie honné- tement et proprement ou si Pautre, par des qualités per- sonnelles; émerge et veut percer, comme une plante vers la lumiére. Nous avons connu, entre autres, un des grands pion- niers du Grand Nord, le «colonel» Jim K. Cornwall. I avait commencé tout jeune a porter la mail dans le Nord, aux postes de la Hudson’s Bay et des traiteurs, en raquettes et mocassins, et traines a chiens, couchant chez les Indiens ou dans les cabanes de trappeurs. Ce n’était pas 1a une tournée de nos bons facteurs mais de véritables expéditions de deux ou trois cents miles, soit de trois 4 cing cents kilométres... Peu a peu, avec la claire vision de l'avenir de ce pays et son esprit d’entreprise, il avait créé des compagnies diverses (fourrures ou trans- ports), fait des faillites re- tentissantes, était reparti sur un nouveau pied et, quand nous l’avons rencon- tré, il avait remonté tout le courant et possédait une. compagnie de navigation sur les fleuves et lacs du Nord et une superbe résidence a Edmonton. Il était le visage méme du conquérant du Grand Nord et nous le re- trouvimes avec plaisir quel- ques années plus tard, a notre retour de la guerre. Les mois d’hiver passé- rent ainsi, tranquillement, et nous étions bien satisfaits de ne pas avoir a écorner nos disponibilités et de nous pré- parer, de la sorte, pour les prochains travaux du prin- temps. La vie n’était pas désagréable, le travail rem- plissait d’abord une partie de la journée car, levé le premier, le matin, je devais revoir et nettoyer la chau- diére du chauffage a bois que le veilleur abandonnait alors. J’avais dans mon pro- gramme l’allumage de la grosse cuisiniére et la pré- paration du café et du break- fast que le cook prenait en charge a son arrivée, comme un colonel entrant au quar- tier. . . Ensuite, la vaisselle [le dishwashing], épluchage des légumes pour le repas du midi, et ainsi toutes ces occupations se renouvelaient a chaque service. Mais, en principe, vers 16 heures, je ~ devenais libre et, & ce mo- ment, je pouvais sortir ou m’‘installer dans le hall dans les bons pullman; alors je voyais défiler devant moi un \ _ véritable kaléidoscope: pros- pecteurs, métis ou Indiens. venant faire leurs achats et les échanges de leurs four- rures, voyageurs cherchant a gagner le Nord, repré- sentants de commerce, car ces derniers ne perdaient pas leurs droits et Athabas- ca était déja en vedette, colons et éleveurs, cow-boys de Baptiste Lake et de Sunny Fiat... Je me souviens d’avoir vu entrer, en fin de saison, un des plus grand traiteurs de ‘fourrures des pays du Nord, Colin Fraser, avec les ballots de peaux qui portaient ses métis. Je le vois encore les ouvrant et jetant a pleines mains au milieu du hall, péle- méle, renards noirs ou ar- gentés, lynx, visons, hermi- nes et skungs. «Regardez cela, boys, comme c’est beau! Et que chacun vienne boire (everybody have a drink)!» Il y avait la, 4 méme le sol, une fortune que cha- cun pouvait toucher et admi- rer, et ensuite c’était au bar la tournée générale de Colin, avec des récidives, suivant l'état du gosier des bu- veurs. Mais le spectacle n’était ‘pas toujours attrayant et il se produisait parfois de ter- ribles bagarres, comme seuls pouvaient en déclen- cher des hommes rudes et puissants, habitués a la dure et ala misére, qui travail- laient pendant des semaines comme des forcats, sans dis- tractions et dans les pires conditions physiques, pous- sant devant eux une vie parfois déja bien avancée et sans espoir, avec le seul but de l’évasion passagére vers les pays habités, avec leurs tentations, leurs bars ruti- lants et la tiédeur des hétels. embrumés de fumée, et le jeu et l’alcool, et les femmes aussi... Pour des raisons futiles, il y avait alors des coups et des jurons et du verre cassé. Mais c’était 1a chose quasi naturelle qui n’ajoutait qu’un chapitre au programme, pour les specta- teurs fortement blasés. LE DEUXIEME PRINTEMPS Dans la lumiére des jours déja plus longs, sous un soleil qui, montant plus haut, réchauffait l’atmosphére, la neige commengait timide- ment a fondre et de petites. chandelles, que les nuits revétaient de glace, mar- quaient le rebord des toits. Sur la riviére, des plaques brillantes attestaient le tra- vail quotidien des midis at- tiédis. Et puis, une nuit, un vent commenga 4 souffler sur des neiges déja amollies. De petites avalanches glissaient le long des toitures et des branches sur les sapins qui se redressaient alors comme un dormeur qui s’éveille et s’étire. Et ce fut encore, comme durant les centenai- res écoulés, la venue du vieux chinook tant attendu par une nature en mal de nouvelle création, et la cour- se des eaux dans toutes les coulées, dans les creeks si longtemps muets, sur la riviére et sur les lacs, une eau claire et limpide, irisée des couleurs du ciel et des verdures, fille chantante des neiges immaculées. Car le dégel n’est point, dans la forét cette chose in- - nommable qui transforme Ja — ‘rue en bourbier. C’est une débauche de cascatelles pu- res comme un cristal et bavardes comme des gre- lots, comme si les neiges et les glaces de l’hiver finis- sant voulaient ainsi se ven- ger de leur rigide immobi- lité et de leur long silence. En ces jours de |’avril printanier, on ne pouvait ~ plus se servir des traineaux car, par endroits, sur les chemins, de grandes plaques . de terre apparaissaient déja, s'agrandissant du matin au soir, et du chemin de nei- ge refaisaient peu a peu la piste de I’été. Il fallait done songer 4 remonter sur la propriété pour les travaux nécessaires, et notre temps de résidence obligatoire sui- vant les termes de l’attri- bution. Notre programme de |’an- née était assez chargé, car il fallait penser a faire parai- tre aussi des améliorations non seulement sur le quart ot nous avions monté les batiments — ce qui lui don- nait déja une nette plus- value —, mais aussi sur les autres homesteads, le mien et celui d’Armand. Ce der- nier pouvait, avec une auto- risation du Land’s Office, se passer d'une construction, - étant donné le lien de paren- té avee Jean. I] n’y eut d’ailleurs aucune difficulté a ce sujet. Mais il était né- cessaire de clairer et de la- bourer sur ces deux con- cessions, remettant a l'année suivante l’édification d'une petite maison sur la mienne. — (ASUIVRE) ‘