1 9 - Le Soleil de Colombie-Britannique, vendredi 17 mars 1995 UETURE Par Yvan Brunet 'Marie Carmen, «L'Une», Select / Disques, double. Réa- lisé par Jean-Pierre Isaac, ce troi- siéme album de Marie Carmen est certes un disque de qualité. Bref, treize chansons baties a méme les mouvements du coeur : Je t'aime mal (premier extrait), Par la fenétre ouverte (signée Luc Plamondon avec André Gagnon au piano), Je veux que tu m'aimes (chanson sensuelle), etc. En somme, une fagon sublime pour nous d'explorer l'espace musical et le mode poétique de Marie Carmen. Mario Pelchat, «C'est la vie», Columbia. C’est la vie de Mario Pelchatse veut en sorte un disque tout en tendresse, en douceur et parfois méme en mystére. De plage en plage, Pelchat se voue a laballade avec aisance : Dorssur -|mon coeur, Parle-moi, Tu me manques, Le bleu du ciel (du groupe Color Me Bad), etc. En- ‘suite, il devient un peu plus co- riace avec C'est la vie et Danser. Un bon achat. Michel Comeau, «Velours Dé- sim, Musicor/ Prestige disques. Velours désir est avant tout un souffle de tendresse, un ensem- ble de tableaux sur les différents visages de l'amour. Bref, un bou- quet de chansons qui n‘a d'autre dessein que d'éveiller l'envie d'aimer et encore d'aimer : Des- tin d'amour, Avec vous, Comme j'ai toujours envie d'aimer, etc. Jean-Pierre Ferland, «Kcoute pas ¢a», Musicor. Ce tout nou- veau disque de Jean-Pierre Ferland a été enregistré dans sa cabane a sucre, a St-Norbert, en trés petite formation avec Alain Leblanc, Bobby Cohen etRichard Bélanger. Des interprétations simples et fraiches de titres origi- ‘| naux qui effleurent différents thémes dont ceux de : La musi- que, Vamour, II faut des amou- _| reux, Une chance qu‘on s‘a et la nature, Je ne veux pas dormir ce soir. Du Jean-Pierre Ferland a son plus simple et a son plus relaxe. Florent Pagny, «Rester vrai», Polygram. Florent Pagny est un rocker francais trés bien avec une véritable passion pour la musi- que. Doué d'une voix agréable posée sur un contenu de trou- des titres intéressants dont les mélodies collent 4 la peau. A surveiller en particulier : J‘irai quand méme, Si tu veux m'es- sayer et Est-ce que tu me suis? A lapremiére écoute, on songe adu mince compliment. Beausoleil, «Beausoleil», Music of the World. Cet album-ramas- sis regroupe des chansons inédi- tes en plus de quelques-uns des airs les plus connus de Beausoleil. Comme un fin Beaujolais, ces airs coulent, doux et veloités, mais avec un bouquet cajun pro- noncé. Chaussez vos escarpins pour danser. vailles musicales, il nous livre ici | Foreigner qui, ensoi, n'estpas un |. Alméras et Céline «Un mariage de convenance» PAR JOHANNE CORDEAU Philippe Alméras, en plus d'avoir plusieurs épingles a son jeu, on peut trés bien s'en rendre compte avec la fagon débonnaire et a la fois universitaire d'aborder les su- jets de discussion, porte deux cha- peaux, ou «deux casquettes» comme il le dit si bien. - Il se dévoue premiérement a son «artisanab», son bébé 4 lui, le Centre d'études de Lisieux pour étu- diants étrangers. II s'agit en fait d'un centre spécialisé dans l'enseignement du frangais, préconisant l'immersion. Les étudiants peuvent demeurer sur place au Chiteau Camotou encore en famille d'accueil. L'école est située en Normandie, 4 Lisieux, 4 quelques ki- lométres de Caen et d'Honfleur. La clientéle du Centre Lisieux est assez variée, allant des Américains aux Européens. L'autre casquette, qui sied fort bien 4 Philippe Alméras, c'est celle d'écrivain, plus particuliérement de biographie. Si Louis-Ferdinand Céline a été le premier a passer sous le scal- pel littéraire d'Alméras, c'est par pur hasard. Lorsque Philippe Alméras en- treprend son doctorat a l'Université Santa Barbara de Californie, il pro- pose comme sujet de thése (parmi trois autres sujets), l'oeuvre célinienne. On l'encourage a suivre cette voie, malgré plusieurs réticences face au personnage Céline. C'est donc depuis trente ans, qu'ils ont conclu «ce ma- Tiage de convenance». Mais ce ne fut pas un mariage de tout repos. En France, la réception de l'ouvrage d'Alméras fut assez froide. Le message était clair «Nous savons tres bien ce qu'a fait Céline et on ne veut plus en parler.» Il a fallu dix ans pour qu'on accepte de publier l'ouvrage d'Alméras. Faut bien dire que c'était, soutient Alméras, «/a seule biogra- Phie qui parlait de toutes les facettes de Céline, autant littéraire, politique que personnelle. » «Apres 30 ans de fréquenta- tion célinienne, je peux dire que je devine Céline, avant méme d'avoir lu.» Alméras comprend la fagon de penser de Céline et pour remonter la filiére, pour aller a la source, se sert du méme raisonnement. Alméras se- rait tenter de reprocher a Céline «son manque de générosité et de compas- sion.» Méme s'il reste quelques cor- respondances de Céline a publier, la séparation entre Alméras et Céline est déja entamée. Philippe Alméras épluche présentement dossiers, livres et documents ayant trait a un autre personnage contreversé. I] espére méme publier la biographie de cet homme politique l'an prochain. Mais cette fois-ci, nous vous souhaitons avec le maréchal Pétain, un mariage d'amour, monsieur Alméras. Du 9 au 12 mars demier, l'Alliance frangaise, en collabora- tion avec la librairie Manhattan et Louis Anctil (représentant de plu- sieurs éditeurs), organisaient la deuxiéme édition du ler Salon du livre de Vancouver. . Les kiosques de livres et de matériel audio-visuelreprésentaient la majorité des librairies et éditeurs francophones du Vancouver métro- politain. Une bonne partie de cet étalage était consacrée a la jeunesse. Comme le mentionne Bruno Nigita, un des responsables organisateurs de cet événement, «nous avons voulu cette année rejoindre davan- tage la clientéle jeunesse.» En effet, deux auteures jeu- nesse étaient présentes durant le Salon. Marie-Danielle Croteau, | ainsi que Danielle Simard, ont pro- fité de ces moments privilégiés pour rencontrer leurs jeunes et moins jeu- nes) lecteurs. Elles ont de plus animé le samedi une rencontre avec les auteures dont les textes ont été sé- lectionnés pour le concours : «A vos plumes, préts?... Ecrivez!» Le théme de ce premier concours, or- chestré par l'Alliance frangaise, lié a l'oeuvre «Le Petit Prince» d'Antoine de Saint-Exupéry. ‘ Dimanche le 12 mars, mes- dames Croteau et Simard ont dé- En passant au Salon ««L'an prochain, on veillera a ga- Radio-Canada et Uni-Presse, était voilé lenom dela gagnante : Maylin Bergeron de Prince George. Vous aurez d'ailleurs l'occasion de lire le texte primé dans la prochaine publi- cation du «Rayon Jeunesse» du So- leil. Mais les jeunes n'ont pas été les seuls 4 pouvoir échanger avec des auteurs. Robert Lalonde, écri- vain québécois, Philippe Alméras, biographe de Céline et Forg, bédéiste, étaient également au ren- dez-vous. Le samedi 11 mars, Robert Lalonde et Philippe Alméras ont discuté, entre autres, de l'engage- ment, des différences de langage, de l'anglais et du «politically correct». Devant des auditeurs, somme toute assez silencieux, les deux auteurs ont échangé de fagon amical et dé- tendue. Toutefois Bruno Nigita ex- prime quelques réserves face aux discussions données par les auteurs. Etant donné quiils ont offert des conférences dans les universités, cet éparpillement a contribué au nom- bre restreint d'auditeurs présents. rantir davantage I'exclusivité des conférences«, mentionne M. Nigita. Si vous avez manqué le Sa- lon du livre, faites-vous la promesse d'y tre l'an prochain. Vous verrez, ga vaut le détour. La Habana de Bonifacho PAR JEANNE BAILLAUT _ Bonifacho expose ses plus récentes oeuvres a la galerie Bau-xi. Sous le titre LA HABANA SERIE, il nous livre, dans une douzaine de tableaux, l’essence de ce qui, 4 travers ses émo- tions, représente Cuba. N’ayant ja- mais visité cette fle, et tout comme pour Rousseau qui n’ avait jamais mis les pieds dans la jungle, la créativité et les émotions de Bonifacho passent par les souvenirs d’autrui. Dans sa présente série LA HABANA, il se base sur les récits que lui ont fait des artistes cubains rencontrés en Yougoslavie, son pays natal, durant les années soixante. D’une fagon gé- nérale, dans cette exposition, il recrée au gré de sa fantaisie ce qui probable- ment 1’a particuliérement impres- sionné au sujet de cette petite ile. C’est d’abord la luxuriance de la vé- gétation qu’il illustre a travers trois tableaux, de grandes dimensions en forme de feuilles géantes, dont les couleurs sont réminiscentes tour a tour de la splendeur flamboyante des couchers de soleil, de la transparence turquoise de la mer ou encore de |’in- tensité verte d’une flore mouillée. Mais Bonifacho, dont la verve picturale est vaste, reprend le théme de la végéta- tion par le biais du symbole évoca- teur, par excellence, de l’exotisme : la palme. Dans un style ot la force de V’abstrait réussit a créer un arbre ar- bre-feuille, au pied (au sens littéral du terme) ancré dans le sable, il dé- molit d’une certaine fagon lecliché de la palme verte sur fond de ciel bleu, pour exprimer ici l’envers de la mé- daille, beaucoup plus sombre, soli- taire et désespéré. Curieusement, et comme 4a propos, la pigmentation y est alors plus métissée, plus négroide. Bonifacho se défend de vou- loir faire quelque commentaire politi- que que ce soit dans ses oeuvres. Pourtant, lespectateur ne pourra s’em- pécher detirer certaines conclusions 4 la vue de ses tableaux, ne serait ce, par exemple, que celle du sentiment anti- raciste qui émane de sa plus grande toile, «Canadian Suite». Sur un fond aux nuances de blanc et de noir, ot se déploie une palme en forme d’éven- tail, vient se plaquer une silhouette anonyme dans sa transparence de plexiglass, vociférant un «go back home» dont le sens non équivoque peut s’appliquer d’une fagon univer- selle a tout pays et toute race. Dans une autre toile, des mains et des poings levés, pas seulement en signe de pro- testation d’ailleurs, des mots en por- tugais signifiant : je ne veux pas par- ler de ¢a maintenant!» et toujours cette petite étoile lumineuse venant de1’Orient. Le visiteur saura évidem- “ment, suivant sa sensibilité, donner sa propre interprétation a 1’ oeuvre de Bonifacho, et comme on sait qu'il y a toujours une marge importante entre Johanne Cordeau ce que |’artiste 4 mis dans son oeuvre et dans ce qu’y trouve celui qui regarde, les tableaux de Bonifacho pourraient bien étre le sujet de discussions fort inté- ressantes. Mais quelles que soient les opi- nions que l’on se fasse de ses oeuvres, Bonifacho est un ar- tiste dont il faut sui- vre le travail, car chez lui, rien de statique, il bouge, il évolue. Certes, iln’en est pas asa premiére exposi- tion. Il a déja montré ses oeuvres & main- tes reprises en solo & travers le Canada et en particulier en Colombie-Britanni- que. Grice a diverses expositions de groupes, ses tableaux ont été vus aussi bien en Yougoslavie qu’aux Etats- Unis. Nombreux sont aussi les mu- sées et les ambassades qui possédent certaines de ses toiles: musée de Belgrade ; département des Affaires extérieures 4 Ottawa; ambassade ca- nadienne a Brasilia, pour n’en citer que quelques-uns. I] est intéressant de suivre |’évolution de cet artiste. Bien sfir, |’intensité de certaines de ses couleurs fait qu’on l’identifie tou- LA HABANA, 1993, OlL ON CANVAS, 67" x 57" jours au premier coup d’oeil (voir critique du Soleil de Colombie sur son exposition 4 la galerie Heffel en 1991), mais actuellement, il use da- vantage de contrastes, donnantainsi a sa peinture, plus figurative, une force tout expressionniste. BONIFACHO, un artiste A voir, 4 découvrir et a BONIFACHO, LA HABANA SERIES, du 1] au 29 mars 1995, BAU-XI galerie, 3045, me Granville, du lundi au samedi de 9h30 a 17h30. ;