Le succes éclatant que viennent de rem- porter les conservateurs en Ontario est fattribuable, dans une mesure difficile a vé- rifier mais certaine. aux ressources tres supérieures dont ce parti disposait. Appuyeé a fond par les intéréts financiers, commerciaux et industriels, qui redoutaient comme la pes- te une contagion néo-démocrate, le parti con- servateur a dispose, pour sa campagne, d’au moins deux fois plus d’argent que ses deux concurrents réunis. L’absence en Ontario d'une législation sérieuse limitant les dépen- ses électorales conférait au départ un avanta- ge marqué aux conservateurs: cela les a bien servis mais n’est pas nécessairement un si- gne de démocratie avancée. @ conferait l’argent, les conservateurs ont rem- porté une victoire trop nette pour qu’on puis- se l’attribuer au seul conditionnement exercé sur l’opinion par une propagande habile et couteuse. La campagne s'est vite transformée en un débat autour de la personnalité des trois chefs en présence. Des trois hommes, M. Da- vis s'est révélé le plus apte a prendre des décisions rapides et judicieuses. le plus ca- pable de tenir compte avant d’agir de toutes les données d'une situation. le plus habile a inspirer confiance aux électeurs. En politi- que comme en économie, la-confiance, meme si elle ne se mesure pas en chiffres, est une donnée capitale: a ce point de vue. la campagne de M. Davis fut un chef-d’ oeuvre d efficacité. Du début a la fin. la campagne du leader conservateur a donné le spectacle d’une ac- tion méthodique, rationnelle, calculée. con- fiante et assurée. Pendant que ses adversaires s’agitaient, M. Davis a continué de gouverner. se con- tentant de presser l’accélerateur et de culti- ver plus soigneusement les rapports avec le public. Il a surtout évité de se mettre a la remorque des arguments ou des critiques de ses adversaires, conservant lui-méme I'i- nitiative du débat jusqu’a la fin. La maitrise consommeée de M. Davis fait de lui le prin- cipal artisan du triomphe de son parti. Cela illustre une fois de plus le réle accru — non diminué — que. dans notre époque férue de collégialité. Ia révolution des communica- tions impartit a la personne des leaders. Par-dela la personne de M. Davis, le ré sultat du scrutin ontarien illustre le réalisme exceptionnel dont ont fait preuve depuis tren- te ans les leaders conservateurs de la pro- vince voisine. L'équipe que M. Robarts le- gue a M. Davis n’avait rien de sensationnel: le calibre des ministres y était. tout compte Indépendamment de l’avantage que leur: fait, plutot moyen. Mais outre que ces hom- mes travaillaient en équipe, ils savaient pou- voir compter sur un chef qui ne s’agrippe- rait pas a son poste. Suivant en cela l’exem- ple de Leslie Frost, M. Robarts eut la sa- gesse de s’effacer des qu’il sentit une certai- ne fatigue de son leadership. Cet art consom- mé de la transmission du pouvoir que pra- tiquent en Ontario les conservateurs leur a permis de se renouveler continuellement, de la maniére la moins compliquée qui soit. La réside lune des principales explica- tions de leurs succés électoraux. : @ Les questions objectives n’ont occupé qu’u- ne place secondaire dans le déroulement de la campagne. Deux problemes ont néan- moins contribué au succés des conserva- teurs: la conjoncture économique et la ques- tion scolaire. Les mesures restrictives du président Nixon ont suscité en Ontario une inquiétude comprehensible. Province fortement indus- trialisée, l'Ontario est exposée 4 souffrir plus que toute autre province du moindre bouleversement dans le mouvement des ca- pitaux étrangers ou des échanges interna- tionaux. Rendus plus conscients de leur dé pendance a l'endroit de 1’étranger par la propagande neo - deéemocrate et liberale, les travailleurs ontariens ont di mesurer du méme coup le caractere trés vulnérable de leur prospérite. Appelés a choisir entre un Nixon et un Lewis qui annoncaient un durcissement de la ligne traditionnelle a l’endroit des capi- taux étrangers, et un Davis qui les invitait a une saine prudence sans lever le nez sur les aspirations nationalistes de milliers d’en- tre eux, ils ont opté, en ces temps d’incer- titude, pour les valeurs stires plutot que pour linconnu chargé de risques que personnifiait _ Stephen Lewis. Sur la question de l'aide aux écoles sépa- rées du niveau secondaire, M. Davis pre- nait des le début de la campagne un risque calculé en annoncant que son gouvernement avait décidé de ne pas accéder aux deman- des de subventions formulées depuis des an- nées par les milieux catholiques. En épou- sant cette ligne. M. Davis risquait de perdre des milliers de voix catholiques au profit du NPD et des libéraux. Mais ces voix de- vaient de toute maniére se partager en- tre libéraux et néo-démocrates. tous deux favorables a l'aide aux écoles séparées. Et pendant ce temps. |’ élément ‘‘ wasp” ne pou- vait rester indifférent a l’invitation 4 peine déguisée qui lui était faite de se rallier aux conservateurs. La auestion du chomage aurait di_norma- - lente que certains le prévoyaient. Les gains lement nuire au gouvernement Davis. Il sem- ble cependant que le contraire sé soit pro- duit. La encore, les électeurs ont semblé considérer que le gouvernement n’ était que partiellement responsable de certains acci- dents de parcours. Ils ont préféré se souve- nir que le parti au pouvoir est devenu syno- nyme de la prospérité et de la stabilite re- marquables dont jouit l'Ontario depuis plus d'un quart de siécle. Pour le NPD, l’échec de jeudi marque Varrét d'une tendance qu'il souhaitait voir propager des Prairies au centre du pays. Il montre que la pénétration de ce parti dans les grandes provinces urbaines sera plus que fait la social-démocratie sont réels mais lents et graduels, notait jeudi soir Stephen Lewis. Il y a beaucoup de vérité dans cette phrase. : Comme pour illustrer la vérité de cette observation du leader néo-démocrate. les statistiques du scrutin de jeudi montrent que le NPD, s'il a légerement reculé quant au nombre de siéges, a fait des gains signifi-} catifs quant au total des voix qu’il a rem- portées. Le NPD a vu son total de voix pas- ser de 626,000 4 876,000: c’est un gain de} — 40%, comparé a une augmentation de seule- | ment 33% dans le total des votants. Quant aux libéraux de M. Nixon, leur pour- centage de voix a continué de fondre. De 35% qu’il était encore en 1963, il était descendu a 31% en 1967; il tombe cette fois a 28%. Ces chiffres semblent indiquer que le centre s'amincit peu a peu en Ontario et que cette province évolue lentement vers un nouvel ali- gnement ot s’affronteraient éventuellement deux adversaires majeurs: les conserva- teurs et les néo-démocrates. Rien ne serait | plus sain pour la vitalité de la démocratie canadienne qu’une telle évolution. Il faudra cependant attendre au moins une autre élec- tion avant de savoir si elle se produira jus- qu’au bout. 2% En attendant, les conservateurs continue- ront de régner tranquillement et efficace- les sociétés prospéres, relativement hon genes et sures d’elles-memes. Claude RYAN Heritage qu’on appelle familierement “les vieilles choses”’. Quelques mois apres la parution de “'L encyclopédie des antiquites du Québec” (1), realisée par Michel Lessard et Huguette Marquis, notre riche voisine, l'Ontario, vient de déposer chez les libraires un album de luxe que Scott Sy- mons a écrit sur le meuble canadien. Ce livre s’intitule “Heritage” (2), et présente une vision romantique de ce Bien que tous les textes anglais signés par Symons La Fédération des Franco- Colombiens soient extrémement bien documentes, on constate que c’est d’abord un livre d’images. Il n’est, pour s’en convaincre, que d’ouvrir le livre “Heritage”. Que voyons-nous? Des images bien sir: quatante-sept en couleurs, et deux cent soixante-seize en noir et blanc, toutes réalisees par le photographe canadien John de Visser. Mais, |’éditeur to- rontuis n'y est pas allée de main morte. On avait rarement vu, jusqu ici, des images aussi vivantes sur le sujet. Lay qualité de l'impression declenche, a elle seule, un effet }. d’optique: ce n’est pas un livre, se dit-on, non ce n’est pas j° un vrai, il y a subterfuge. Bien sur, il n’y a aucun subter- fuge, aucun procédé d’éclairage, de mise en page, rien d'autre qu'un soin infini: le trouble ressenti nous arrive | dés meubles eux-mémes, de splendides pieces artisanales dont. on ne soupconnait méme pas I’existence avant que Symons nous livre le truit de ses recherches a travers le monde. Mais, | editeur nous fait payer cher la joie de découvrir ces labuleuses pieces anciennes. Avec le sourire, on vous en demandera- $22.50, soit environ quatre fois le prix du livre plus modeste (mais combien pratique) du tandem Lessard-Marauis. A vous maintenant de choisir. entre le plaisir de voir des pieces de musee et celui de posséder |: un catalogue couvrant trois siécles de production artisa- nale qui font encore partie de la vie courante. 1013-B Brunette Maillardville (B.C.) Tél. 526-9616 Le Soleil, anciennement Le Soleil de Vancouver, fondé en 1968 et L’Appel, fondé en 1965, est un journal indépendant ipublié chaque semaine par Le Soleil de Colombie Ltée, Case Postale 8190, Bureau L, Vancouver 14. C.-R- . Tél. 266-9422 Directeur-Rédacteurenchef: Myriam Bennett. Directeur administratif : Robert Bennett — HEBDOS DU CANADA ra Pa led qos B Roger Dufrane A.A. Hards Ladislas Kardos Jennifer Lulham > Carmen Primeau Jean Riou Emma Thibodeau Coupon dabonnement Le Soleil 260-9422 = Abonnement [] ‘Réabonnement 2 ADRESSE Se eee e oe eeceeceescevveoveasesoeee’ Peter Allard : @Jean-Claude Arluison Jacques Baillaut Vera Bullock / Alain Clerc Brigitte Clerc Gerry Decario VILLE =: « « Seals e Seeseet PROVINCE :oeecececes DATE teccsccsecesccese Boite Postale 8190 ‘Station L | Mancouver, 14, B.C. Il, LE SOLEIL, 5 NOVEMBRE 1971