page 4 L’APPEL Mai 1968 Mais, on peut tout de méme se poser quel- ques questions. Monsieur Trudeau, en réaliste quw’il est, croit-il vraiment que le jeu des forces entre Canadiens frangais et anglais peut étre li- béré, dés maintenant, 4 1’échelle du pays? N’est- il pas, au fond, convaincu, que le Canada fran- cais doit encore compter sur son foyer naturel qu’est le Québec? Le Premier Ministre veut renverser le cou- rant qui a érodé la vie collective des francopho- nes d’outre-Québee pendant cent ans. Nous sommes convaincu de sa sincérité. Mais nous le savons trop intelligent pour qu’il n’ait pas pré- vu que la pente sera longue 4 remonter. Ce ne sera pas tout d’assurer les libertés publiques aux Canadiens frangais, en Colombie Britanni- que, par exemple. I] faudra que ceux-ci soient en mesure de jouer un réle dynamique. Pour y arriver ils devront s’appuyer sur des pouvoirs autonomes qui ne sont pas entre leurs mains. La loi du nombre jouera encore longtemps au dé- pend de la qualité. D’autre part, nous acceptons, nous, Cana- diens francais de la diaspora, le défi de 1’ave- nir. Nous acceptons le défi, comme M. Trudeau, “parce que le Canada représente un (défi) plus exigeant, plus excitant et plus enrichissant que la rupture séparatiste, parce qu’il offre 4a Vhomme canadien-frangais l’occasion, la chan- ce historique de participer 4 la création d’une grande réalité politique.’’ Done, nous souhaitons la bienvenue a M. Pierre Elliott Trudeau, Premier Ministre du Canada. Nous lui souhaitons surtout un Qué- bee qui continuera d’étre agressif, afin que nous ne retournions pas 4 l’euphorie qui a marqué, chez les Canadiens frangais, les épo- ques Laurier et St-Laurent. MERCURY — METEOR — COMET MONTIGO McLENNAN MOTORS LTD. 151 - 12e rue, New Westminster, B.C. Demandez votre vendeur canadien-frangais Tony Pineau 521-4844 ou 522-0255 Les yeux seront bientot rives sur le Manitoba par Roméo Paquette Les Franco-Manitobains ont décidé de s’in- terroger sur leur avenir. Au cours d’un grand forum couronné par le RALLYE DU MANITO- BA FRANCAIS, qui se tiendra les 7, 8, et 9 juin de cette année, 300 délégués de toutes les par- ties de la province feront leur examen de cons- cience collectif. Je voudrais attirer l’attention des lecteurs de L’Appel sur cet événement que je qualifie- rais d’historique. Les Franco-Colombiens au- ront aussi 4 faire leur examen de conscience avant longtemps. Je dirais méme qu’ils sont en retard 4 le faire. Dans un mémoire qui explique les buts du RALLYE, on se pose les mémes questions et on constate les mémes lacunes au Manitoba qu’ici. Pourtant, au Manitoba, il y a une forte tradition francaise, il y a encore des agglomé- rations importantes, la ville de St-Boniface peut encore s’appeler un centre canadien-franeais. Cependant, les Franco-Manitobains s’inquiétent de la survie d’institutions propres 4 promouvoir l’établissement de communautés 4 caractére rural 4 un moment de l’histoire ot le ruralisme est 4 disparaitre. Entre autres désappointements, on constate que peu de familles francophones ont pris a- vantage de l’adoucissement en matiére de sco- larité francaise, accordé l’an dernier par le gouvernement. La question qui se pose maintenant est de savoir si la reconnaissance du frangais, 4 la grandeur du Canada, ne vient pas 50 ans trop tard. Quand le principal ennemi s’identifiait aux préjugés raciaux et religieux, il était assez facile de se grouper et de s’auto-déterminer, en quelque sorte, 4 la faveur de l’isolement. La motivation 4 la résistance était maintenue par le feu sacré de la dignité offensée. Mais le nouvel ennemi, beaucoup plus subtil, porte le déguisement de la vie matérielle facile dans une société dépersonnalisée. Une prise de conscience nouvelle sortira-t- elle du Rallye du Manitoba frangais? L’avenir seul nous le dira. Quoiqu’il arrive, cependant, le résultat devra en étre partagé par toute la francophonie de 1’Ouest. Il est permis de prévoir, je crois, que nos institutions traditionnelles seront surtout re- mises en cause. Un extrait du mémoire peut étre ici évoqué: “On reconnait que les problé- mes et les soucis de la langue ne sont pas les mémes que ceux de la religion et, bien qu’ils se croisent souvent, on ne les considére plus com- me étant équivalents. De fait, le traumatisme le (suite en page 5)