“ PR Bs BAKES TR AEE AIIE Gp eT amit a EM GNA E DEE DLE SPER DE POON PS B inlay at -Une__ autre’ par Roger DUFRANE Mercredi 5 Mai - Me revoici dans la rue Ste- Catherine. C’est l’Hastings Ouest et Est de Montréal. On s’y sent porté par la foule. On ne sait jamais dans cette ville double si l’on a af- faire A un anglais ou 4 un francais. Un monsieur dis- tingué, grand et blond - ‘*Parlez-vous frangais, Monsieur. - Oui, me ré- pond-il avec l’accent an- glais, et il me renseigne avec aménité’’. Voila un vrai Montréalais qui ne boude pas au double patri- moine de sa ville. Tous ne réagissent pas ainsi: Un chauffeur de taxi, rablé, l’air d’un New-Yorkais du peuple’ Je lui parle fran- cgais: ‘‘What’s your pro- blem’’ me répéte-t-il, - sans prétendre s’exprimer dans notre langue, obliga- toire, pourtant, dans son métier. Du débarquer 4 la décou- verte d’un hotel, j’avais er-_ ré comme une épave ala dérive. Notre besoin de s’ancrer quelque part de- meure si puissant en voya- ge que tout premier contact avec un lieu nouveau, sur- tout s’il s’agit d’une gran- de ville, nous désempare. expérien- ce déconcertante consiste A ne pas se sentir partici- per a laméme aventure que les habitants. Dans la ville ton vit, les visages, du moins plusieurs,-nous sont familiers. On semble tra- vailler et s’amuser de con- cert. On rencontre un tel a un. arrét d’autobus: ‘*Tiens, je ne t’ai plusvu depuis quelques jours. Comment va ta femme. Dans une ville qu’on visite rien de pareil. Les visa- ges nous demeurent fermés et sans éloquence, jusqu’a ce que, par l’habitude et des sorties aux mémes heures, On apprenne 4 se connaitre. A Montréal, ce- la ne me prendra pas long- temps. Dés le deuxiéme jour, je serai au mieux a- vec le portier de 1|’hdtel, qui me parlera de la pluie et du beau temps. Le charme des Montréa- laises m’enchante. Les vendeuses, parfaites _ bi- lingues, la plupart Cana- diennes - Frangaises, se comportent 4 l’américai- ne. Mais il se dégage de leurs gestes et de leurs ex- pressions une vivacité bien francaise. Franco-Améri- caines, voild ce qu’elles sont, et a leur avantage. Le plus grand couturier de Montréal, Michel Robi- chaud, 1’a bien observé. Lui qui a fait son apprentissage de la haute couture, chez Nina Ricci et Guy Laroche, professe que la Montréa- laise est un pulpeux alliage de la femme francaise élé- gante, mais plus rondelet- te, et de la femme améri- caine aux arétes discréte- ment plus saillantes. Il sait aussi que la Montréalaise doit adapter sa véture aux _.extrémes du climat. . Mi- chel Robichaud est un maf- /plessions sur Montréal tre de la simplicité, de la soie et de la fourrure. Je chemine, en révant ainsi, vers 1’Est de la vil- le. Je pressens, aunombre accru des vieilles égli- ses, écrasées entre les é- gratte-ciels, l’approche du Vieux-Montréal. Voici la rue St-Denis, belle prome- nade plantée d’arbres. De _ Vieilles maisons s’y ali- gnent, en pierre jaunie, aux toits rouges, noirs, blancs, mansardés et perces de lucarnes. J’entre, vers le bas de la rue, dans un pe- tit restaurant auxsenteurs de bonne cuisine. Sous la marquise vitrée, les gar- ons en veste blanche et es tables en quinconce me rappellent vaguement les cafés des boulevards, 4 Paris. Ici, plus un seul mot d’anglais. A croire que Montréal, dans une vingtai- ne d’années, sera devenue une ville exclusivement francaise. Le Premier Mi- nistre Bourassa a réussi, pour la cause du frangais, un véritable coup de maf- tre: d’abord 1’édification de 1’Université du Québec, dé- ja ouverte et dont les batiments neufs continu- ent 4 proliférer au centre de la ville. Ensuite, la promulgation d’une loi au- dacieuse qui proclame le frangais seule langue offi- cielle du Québec. Cette loi produit déja ses_ effets, et la plupart des Canadiens Anglais de larégion de- viennent bilingues. Natu- rellement, l’anglais ne disparaftra pas. I} est né- cessaire pour les transac- tions avec le restant du Canada et les Etats-Unis. Il servira comme il sert aux Belges; la langue du commerce, imputable 4 la prépondérance améri- caine sur les marchés du monde, et par 14 méme, i- névitable. Quatre heures de l’aprés- mid! Voici l’heure de me rendre 4 la soirée sur 1’I- le Ste-Héléne, organisée par la Société du Bon Par- ler Frangais. Le taxi tra- verse le Pont Jacques Car-~ tier et me dépose, dans un parc aux fins coteaux plan- tés d’arbres légers, devant une sorte de manoir Cana- . dien-Frangais. A linté- rieur, de beaux et sobres__ meubles’blonds;, dés: porsi. tes cloutées comme dans l’ancienne France, des lus- tres en bronze et en cris- tal. On me présente 4 quel- ques notables. Nous som- mes assis enrond, comme pour tineveillée,devant une cheminée énorme. De vieux messieurs, un abbé, ure da- me en cape de velours. Ces gens, fiers de leurs noms, * Photo ; Yann GEOFFROY Une des nombreuses murales de Montréal. me rappellent une époque dont il est parlé dans les livres, celle des causeurs dans les salons d’autre- fois, des marquises et des gentilshommes. Ils appar- tiennent 4 d’anciennes fa- milles canadiennes - fran- gaises, bien au-dessus du monde mercantile, dont le régne a succédé au leur. Je déclare 4 un vieux mé- decin: ‘‘Monsieur, quand je m’entretiens avec un Ca- nadien-Frangais, je sens, outre la langue , que nous partageons un patrimoine commun. Passé, tradition et aussi le temperament, un ~mélange mystérieux nous apparente. ‘‘Mon in- terlocuteur sourit, satis-—_ fait, se frise la mousta- che et me rétorque: ‘‘ Oui, nous aimons la France. - Mais le régime britanni- que , malgré certaines duretés, nous a protégés contre a_ la conquéte des révolutions qui ont boule- versé notre ancienne pa- trie’’. Le champagne déguste dans un salon du bas, nous montons dans la salle du banquet. Il ya 1a le Con- sul de France, l’Archevé- que de Montréal, les. di- plomates de la Martini- que, des éditeurs, des journalistes, qui sais-je encore. M. Pierre Tis- seyre, Président du Con- seil Supérieur du Livre, annonce les lauréats. M. R. Choquette, poéte, prési- dent de l’Académie Cana- dienne Frangaise, y va de son petit discours. II bla- me l’usage du joual et ila raison. Pourquoi se forger un jargon, lorsque nous possédons la plus belle des ‘langues que nous ont 1é- guée nos péres, la langue frangaise. On applaudit, on mange, on boit. Etondis- tribue les prix. Chargé d’un dipléme et d’un lot de li-. vres, je quitte la scéne, les oreilles bourdonnantes _ et th’efforgant den né pas tré- . Le Soleil de Colombie, 28 Mai 1976, 19 Annonces Classces insertion de2Q mots ou moins: $2.00 chaque mot additionnel:, 4() APPELEZ LE 879-6924 A LOUER COURS DE FRANCAIS A LOUER, a partir du ler Juin, quartier tranquille, entre Hastings et Nanaimo, en demi sous-sol, apparte- ment clair et aéré d’une salle de séjour, 2 cham- bres, salle d’eau (douche) et cuisine - Entrée indé- pendante - Téléphoner aprés 18h00 au 254-0156 - A SOUS- LOUER Désire sous-louer, pour juillet et aoft, maison de 5 piéces, avec petit jardin, vue sur mer - Quartier West-End. - Sérieuses ré- férences demandées - Téléphoner au 689-0203 - ‘PERSONNE COURS- DE FRANCAIS ET CONVERSATION PAR . EXPERI - MENTEE - EGALEMENT TRADUCTIONS - Téléphoner au 526-7497, a- prés 19h00 - PIANOS Le magasin ‘*Ward Music’”’ vous offre les services d’un accordeur et réparateur de pianos, professionnel. Ce dernier peut aussi vous ai- der etvous conseiller dans V’achat d’un piano. Veuillez téléphoner au No. 899-9568 - ‘des alcools. bucher. Le discours de M. Manuel Maitre, directeur général delaSociété du Bon Parler Frangais, Che- valier de l’Ordre National du Mérite, décoré des Pal- mes Académiques, me chante aux oreilles et chatouille mon orgueil. “N’évoquait-il pas, 4 mon Le passé cotoie le moderne. propos, ‘‘la langue fran- ¢aise a mari usque_ at mare, d’unocéan 4l’autre’’ Aprés le dessert, un maif- tre d’hdtel me prie de me rendre.en haut, au salon du Maire. A chaque pied d’es- calier, et heureusement, je rencontre un valet qui me montre la route. La-haut, en petit comité, les orga- nisateurs, les lauréats, la presse, les délégués de la ville de Montréal. Onsable le champagne. Cette soirée fut suivie d’autres libations, 4 1’H6- tel St-Laurent, avec le Co- mité de la Société. Je n’en dirai pas plus, mes idées, sur la fin, se brouillant aux vapeurs des vins_~ et Chose cu- rieuse. Comme l’élite in- tellectuelle de Vancouver se compose de gens d’o- rigine anglaise, celle de Montréal se compose en partie “ de* “gens d’origine’~ frangaise et Belge, Cana diens de deux ou trois gé- nérations. Un tel est né au Canada d’une famille prospére et a été faire ses études 4 Tournai, la __ plus francaise des villede Bel- gique. Un autre est origi- naire de Troyes, en Cham- pagne, un autre encore de Tourcoing. Quelques-uns, de purs Canadiens ceux-1a, remontent a 1’époque. de Frontenac et de Monsieur de Champlain. Au retour, la nuit venue, un monsieur d’origine an- versoise, et sa femme, m’emménent voir Montréal des hauteurs du Mt-Royal. On accéde 4 une pente ou on passe sur un champma- gnétique. ‘‘Regardez, me dit mon hdte, j’arréte le moteur et la voiture con- tinue 4 monter d’elle-mé- me’’. Révé-je sous 1l’in- fluence du champagne. Je n’en discuterai point. Mt- Royal! La ville s’étend 4 nos pieds, voix lactée ter- restre et scintillante qui se mire dans le fleuve. - (4 suivre) Seo eee Severo Marchez. Dés aujourd'hui. “