Photo: Suejee. 4 | FRANCOFOLIES Francofolies, quand tu nous tiens! Dimanche le 29 septembre au soir, l’Orphéum accueillait un millier et plus de francophones. Avant de nous présenter Daniel Lavoie, l’organisateur Régis Painchaud nous donnait déja rendez- vous pour l’année prochaine pour une autre semaine de folies en frangais. Il l’avait déja affirmé Je vendredi précédent au Playhouse en présentant Richard Desjardins. Aussitét dit, les gens réagissent avec joie. Oui! Oui! Oui! «Mais cette fois, Jai besoin d’ aide» ajoute-t-il. Une vague d’approbation dans la salle précéde des ap- plaudissements. A ce moment précis, on applaudis- sait Régis Painchaud, Celui qui a cru a son réve. Celui qui nous l’a fait partager pen- dant dix jours. Résul- lal impressionnant de cette semaine de plai- sir, d’amour et d’hu- mour. Nous n’oublierons pas le plaisir de se rencontrer au café Rimbaud, chaque jour a partir de 11h le matin. Plaisir de dire «bon- jour» a Sylvia L’Ecuyer a un rendez-vous avec 1’équipe de Horizon Joélle Rabu qui diffuse l’Emission en direct. Plaisir des 5 47 ou l’on pouvait revoir » les mémes visages ou faire de nouvelles rencontres. Pour la premiére fois depuis longtemps, 4 Vancouver, on pou- vait sortir en frangais chaque jour de la semaine. On pouvait rire en- semble, se laisser charmer par la qualité des spectacles, se dire comme ¢a nous avait manqué avant. On a envie de refaire |’expérience. Les francofolies débutaient en cinéma, puis présentaient une série d’activités avec des étres venus nourrir nos réves de leur passion, leur talent, leur discours: Chatouille, la clown unique, Serge Lemoyne el une rétrospective de son oeuvre imprimé sur T-shirt, la sensibilité extréme de Michel de Mauine, les accents parfois sauvages de Karen Young et son trio, le charme et la sagesse de Richard Desjardins, la puissance vocale de Joélle Rabu et pour couronner ce menu, Daniel Lavoie et ses superbes musiciens. II ne faut surtout pas oublier la soi- rée Mystére avec Joyce Janvier, Jacques Baillaut et Gérard Malo. On voudrait revoir ce trio. Je vous reparlerai d’eux dans un prochain numéro. Un événement comme celui-ci resserre les liens, nous permet de reprendre contact. Régis Painchaud nous promet des francofolies de plus en plus internationales dans I’avenir. Les manifestations cul- turelles a caractére nationale ou internationale appporte des inspira- tions nouvelles. Ca nous donne envie de développer notre propre coin de pays. : A noter que le café Rimbaud fut installé dans la salle aménagée par la troupe de théatre La Seiziéme: le studio 16. C’ était une premiére avant l’ouverture d’un café théatre pour bient6t nous promet-on. De toute cette semaine d’événements intenses, je retiens un nom, Richard Desjardins. Un étre exceptionnel, un poéte. On dit qu’il ressemble a Jacques Brel, qu’il est le nouveau Gilles Vi- gneault. Des pointes d’humour a la Sol et des accents vocaux comme Jean Lapointe parfois, on peut aussi le comparer a Yvon Deschamps. Mais non! Richard Desjar- dins fait tellement plus grand que nature que |’on a l’impression de tout voir en lui. Sa voix puissante, son discours humoristique, tragique, satirique, mor- dant, nous transperce, nous fait réagir différemmenta chaque minute. Je retiens sa description de Dieu qui contient tout un passé lié a1’ exploitation de la naiveté: «Un Dieu «splitté» en trois, qui fait un triangle avec un oeil qui «flash» dans le milieu.» A la maniére de Francois Villon, au XVéme siécle, il nous raconte la sentence de mort prononcé contre |’Homere, «/a fin d’ un homme qui aimait un Richard Desjardins rendent meilleurs, plus conscients. Vides de sens, ils nous abrutissent. Ce n’est pas le.cas ici. Mais iln’y apas que les mots. Sail! musique nous atteint en plein ven- © tre, nous fait frissonner le long de la >! colonne vertébrale. «En voyant I’ ins- ) tallation sonore impressionnante au} Vancouver Playhouse vendredi. dernier, j’ avait I’ impression qu il,, S agissait d’un groupe Rock,» me. dit un ami. Sur scéne, il n’y a que ; Richard Desjardins, son piano, sa guitare et surtout sa voix. Marc Provencher, avec beaucoup d’ingéniosité, crée des effets spéciaux sonores qui font lever le spectacle! Nous avons sur scéne un artiste génial. A la console de son, un autre artiste non moins génial lui permet de prendre son envol et de nous enchanter. Pour ceux qui l’ont manqué, écoutez sa cas- sette! Elle vous permettra de trouver un peu de cette Gnergie exceptionnelle que seule la scéne peut trans- ‘ autre homme.» Plus tard, il décrit la démocratie a peu prés en ces termes: «il ya 50 ans, ona donné le droit de vote aux femmes, il y a 20 ans, aux Amérindiens, mainte- nant que nous vivons dans une démocratie totale, il reste a avoir le choix pour pouvoir voter.» Richard Desjardins dégage amour, chaleur, simplicité: Pour- ‘tant, ces mots rentrent dans-la chair’ - comme des dards fins. On sait grace a la science moderne de la psycho- logie que les mots ne pénétrent pas seulement le cerveau mais impreé- gnent la mémoire de chacune de nos cellules. S’ils sont de qualité, qu’ils reflétent la vérité, ils nous Folie - douloureuse Michel de Maulne nous arrive de Paris. I] nous sert un voyage en Afrique, en compagnie de Rim- baud. Douleur! Trop de douleur! Michel de Maulne ne ré- cite pas la poésie, il la vit, en crée un montage ou le spectateur rivé a son siége ne souffle mot, fasciné. II sortira bientét le premier numéro d’une revue de la Maison de la poésie a Paris. A cette occasion, je parlerai plus de cet étre trés spé- cial. Folie douce ou endiablée | A certains moments durant son spectacle, Daniel Lavoie cesse de bouger, il s’assoit au piano ou prend sa guitare et nous enchante. «Tout ¢a, ¢a se passe quelque part dans lespace sur une boule qui roule dans I’ infini». Lorsque j’ai entendu cette chanson pour la premiére fois, j’ai eu envie de voir son spectacle. Une simple phrase, reflet d’une réalité si vaste. Tu gardes ¢a en téte et tes petits problémes diminuent d’un coup, tes joies deviennent person- nelles, intenses. Tout change de proportion. Tu te dis que ta vie U appartient. Aussi bien en profiter aujourd’ hui car dans l’infini ce n’est qu’un petit éclair, un point sur une boule énorme. ; Daniel Lavoie, c’est un beau gars, qui compose de bonnes chansons, qu’il transmet avec une voix douce ou bien puissante. I] plait aux jeunes comme aux moins jeunes. Il «rock», il «jazz», il saute, il galope, sur une haute tension. C’est du «show». J’aime moins. Pour moi, Daniel Lavoie sera toujours celui quia composé «J’ai quitté mon fle», «Ils s’aiment».Cen’est pas celui qui saute et se déméne comme un '*!¢ mais celui qui s’assoit au piano, nous regarde de ses yeux un peu moqueurs, avec une pointe Attention». I] nous parle avec son cov. Vendredi 4 octobre 1991 ~ xeut méme devenir trés intense comme dans «Tension, et sa sagesse. C’est celui-la que j’aime. Le Soleil de Colombie - mettre a son maximum. Aprés le spectacle, Richard Desjardins disait qu’il sentait tellement fort la particu- larité des francophones d’ici qu’il avait envie d’ajou-'* ler et je transmets le message: «Soyez vous autres,’ n'importe ou sur la planéte! ». Richard Desjardins «gas m’a pogné aux tripes». D Rebellion en folie ——-°, 9) “° Nous connaissons Karen “Young dans'sés interprétationg dupa” - plutot classique. Il y a‘un-an, elle quitte son partenaire pour faire route seule. Bient6t, elle s’allie a deux musiciens pour explorer de nouvelles’ formes. Les percussions ajoutées a sa voix puissante ramassent des accents rythmés d’ Afrique, d’ Argentine, du Liban, d’ Amérique du Nord~ ‘ P . et d’ailleurs. i i ~ Karen Young, une belle femme aux grands yeux interrogateurs se ? rebelle en musique, Certains n’aiment pas le changement. Le change- - ment reste difficile a accepter et demande beaucoup de courage. Lais-: sons-nous seulement charmer par sa merveilleuse voix! Marie-Louise Bussiéres ; x Humeur Rimbaud et les francophones Jétais l’autre soir au théatre francais, comme disait le poete. = Justement, c’est de poétes qu’ il s’agissait et, pas de l’un des moin- “= dres, mais d’un des plus grands, sinon du plus grand: Rimbaud, dont Pp les textes 6taient lus avec chaleur et sensibilité par un authentique |” professionnel venu tout exprés de Paris pour lacirconstance.C’était | ' a la Maison de la francophonie mardi dernier dans le cadre du | !* festival «Francopholies» dont nous devons I’heureuse initiative et | la patiente organisation 4 M. Régis Painchaud qui se dévoue |“! beaucoup pour que vive et prospére la francophonie 4 Vancouver. | Faut-il qu’il en soit si mal récompensé? Dans la salle, pas plus de 50a 60 personnes (en comptant les «officiels») sur un public _ francophone estimé a 1000 fois plus sur l’ensemble de la province...Je . n’y ai pas apergu beaucoup de représentants des sociétés et associa- tions qui ont pignon sur la 7éme avenue...Le méme résultat pourrait ~ se vérifier lors d’autres manifestations culturelles du méme genre organisées pendant I’année, a1’ Alliance francaise. ye rae ke Alors? Il est regrettable de voir que si peu de Francophones. prennent vraiment a coeur la défense de leur patrimoine. Ou ne se _ mobilisent-ils que lorsqu’il s’agit de recevoir subventions et pré- bendes d’ici ou d’ailleurs? La défense et l’illustration de la franco- phonie doivent se concevoir «tous azimuts», aussi bien en bannis- sant de notre vocabulaire les anglicismes superflus ou snobinards qu’en participant le plus possible aux manifestations culturelles et artistiques de notre communauté linguistique. Surtout quand elles ont la qualité du spectacle Rimbaud de 1’ autre soir. Allons Franco- phones, encore un effort si vous voulez le rester! _ Bernard Ledun ~ - Consul Général de France pastes anpmenertien ye 5