par Claude Lévesque D e€ préoccupation chére uniquementades groupes per- gus comme marginaux, l'environnement est vite devenu une priorité pour une importante partie dela population. Cette évolution réjouit évidemment les disci- ples de la premiére heure, qui nous mettent cependant en garde contre un optimisme exagéré. Aussi avons-nous cru bon de poser les questions suivan- tes a des représentants d’associations de protection de l'environnement qui’ oeuvrent soit au niveau national, soit dans diverses régions du Canada: 1- Quelle est la plus grande me- nace qui pése présentement sur l'envi- * ronnement? 2- Qu'est-ce qui vous motive 4 pour- suivre votre lutte pour la défense de l'environnement? 3- Qu'est-ce qui devrait-étre fait en priorité, par qui, et comment? 4- Quelles habitudes avez-vous changé, vous et votre famille, afin de contribuer € un environnement plus sain? 1- Je dirais le réchauffement de la planéte. D'abord, parce que le phéno- méne est difficile a renverser dés qu'il est enclenché. Ensuite, parce que ses implications sont importantes et diverses. Par exemple, de plus gran- des fluctuations de température peu- vent entrainer la destruction de certai- nes essences végétales utiles pour agriculture ou la médecine. C'est sans compter les inondations a certains endroits, et le fait que le niveau de l'eau des Grands Lacs puisse baisser, avec les conséquences que l'on devine pour la navigation et la qualité de l'eau. 2- Ma motivation, c'est de penser a l'ampleur des conséquences de la destruction de l'environnement. Je songe a ce que le monde ‘risque de devenir dans vingt ans. De plus, j'ai deux enfants et c'est leur avenir qui est en jeu. 3+ Nous devons changer notre fa- con diutiliser I'énergie. L'énergie est une Cause majeure du réchauffement global ainsi qu'une source majeure de «§mOg», de pollution «ordinaire» de lair, de pluie acide et de pollution de l'eau par le biais dela pluie et du vent. Il faut donc réduire notre consom- mation d’énergie. De plus, il faut nous diriger vers des sources d’énergie moins polluantes comme le soleil et le vent, tout en rendant nos maisons et nos machines plus efficaces énergétique- ment. ll nous faut réduire la quantité de substances toxiques qui se retrouvent dans|'environnement: cellesreconnues cancérigénes comme celles dont nous ne connaissons pas bien les effets. || faut que l'agriculture utilise moins de substances chimiques. On devrait subventionner les agriculteurs pour quills utilisentles procédés biologiques. Enfin, il faut réduire notre production de déchets. 4- Plusieurs choses. J'essaie de ne pas acheter de produits polluants. Je remplace les nettoyeurs par du vinaigre et du bicarbonate de soude. Je privilé- giel'achatd’aliments envrac. J’apporte mes propres sacs a |'épicerie. J’évite d'utiliser des produits en papier comme les couches et les serviettes jetables. ll est intéressant de penser que c'est exactementce que nos parents avaient 'habitude de faire. ~ 1+ Globalement, notre consomma- tion de ressourcesnaturelles augmente aun taux au dela duquel elle ne pourra plus longtemps étre durable. Je parle de l'utilisation des sources d’énergie Enfin, il faudrait une planification a long terme de I'utilisation que nous fai- sons de la terre et des ressources natu- relles. 4- J'aidéménagé dans le grand Nord ily a quatorze ans. J'habite une maison construite en respectant les normes d'économie d'énergie. Nous commen- cons a faire du recyclage dans notre communauté. Mais le plus important, je crois, c’est que j'ai étendu mon travail de planification en environnement aux pays en développement. 1- Bien que ce soit difficile de mettre le doigt sur un probléme en particulier, je dirais que c'est le réchauffement de la planéte. Ce probléme englobe tous les aspects de la vie quotidienne, |'éco- nomie comme ie reste. De plus, il ne S'agit pas seulement de ce qui se passe blamer seulement les consommateurs ou l'industrie. On ne peut pas non plus se contenter de dire que le gouverne- ment devrait faire ceci ou cela. Il faut réaliser que nous ne pouvons plusnous attarder a des niaiseries, mais que nous devons en fait changer notre facon de faire un tas de choses. 4- Evidemment, je ne suis pas la personne typique. Je suis une fanati- que du recyclage. Nous faisons du compostage. Mais le plus important est peut-étre que j’en parle. Par exemple, quand je vais a l'épicerie, j‘explique pourquoi j'apporte mes sacs de toile. 1- Alors que le gouvernement fait croire au public que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes en organisant des conférences sur le développement durable, les usines de Photo: G.M. Dumais L'environnement est vite devenu une priorité pour une importante partie de la population. non renouvelables, de la déforestation et du degré de pollution de l'eau et des sols. Nous devons renverser cette ten- dance. Dans le Grand Nord, la plus grande menace, c'est la pollution chronique et "augmentation: graduelle de l'activité économique qui disséque nos ressour- ces. Je parle de la somme de tous les petits déversements de substances polluantes qui s'y produisent, de la construction des routes qui servent a exploration miniére, etc. 2- Ce qui me motive, c’estla survie. Une base de ressources naturelles forte est garante d'une bonne qualité de vie pour nous tous. La protéger et ainsi conserver toutes ses possibilités d’uti- lisation, c'est mieux que de ramasser les morceaux aprés le désastre. 3- Il faudrait que les politiciens pren- nent des mesures pour réduire la pro- duction de CO2: changements dans la machinerie industrielle et révision des normes environnementales et des ni- veaux d’émission acceptables. dans notre cour, c'est une question qui nécessite une pensée globale. Le phé- noméne implique une intensification de tous les extrémes: davantage de sé- cheresse, davantage de pluie, davan- tage d'ouragans, l'apparition de réfu- giés écologiques, etc. 2- C'est le fait que les gens sont _ devenus aussi préoccupés depuis deux ou trois ans. Je le réalise en lisant les nombreuses lettres qui disent 4 peu prés ceci: «Je sais que nous avons des problémes énormes, mais qu’est ce que je peux faire?» Je crois que les recommandations que nous faisons . depuis des années commencent fina- lement a tomber en terre fertile. Je déplore que cette attitude ne soit pas encore répandue au gouvernement et dans l'industrie. Tout de méme, si les individus sont de plus en plus nom- breux a tre conscients, je crois que C'est bient6t la collectivité entiére qui le sera. 3- Nous croyons que tous les sec- teurs ont un rdle a jouer. On ne peut papier doubleront bientét leur consom- mation d'arbres. En Colombie Britanni- que, on compte 22 projets de construc- tion ou d'agrandissement totalisent 5 milliards $. En Alberta, ces projets to- talisent 4 milliards $. Et que dire de la coupe a blanc dans les soi-disant ré- serves au Québec. Toutes nos foréts septentrionales sont aussi gravement menacées que I'Amazonie. De plus, la contamination par les dioxines prove- nant des usines de papier menace les riviéres de tout le bassin de I'Arctique. 2- Nous vivrons des temps encore plus difficiles a cause des pressions que le développement économique exercera dans le monde. Par consé- quent, nous sommes la derniére géné- ration qui peut changer le cours des choses. Ma motivation, c'est que nous avons un pays et un monde a sauver. 3- La priorité, c'est de changer de gouvernement. Nous avons besoin de gouvernements qui écoutent les gens, pas de gouvernements qui représen- tent les intéréts du monde des affaires. Ce qu’ils en pensent...—— Les politiciens ne voient dans l'environ- nement qu'un truc pour remporter des élections. Je suis dégue du ministre Lucien Bouchard qui n'a rien fait. Si ce que décrit le rapport Bruntiand est vrai en ce qui conceme les changements Climatiques, nous avons besoin d'inter- ventions gouvernementales. 4- Je tente de donner ames enfants une perspective globale. Je les ai éle- vés en leur disant que nous pouvons vi- vre dans un monde meilleur au lieu de toujours vouloir nous enrichir. En plus, j'ai un jardin et je fais du compostage. 1- C'est probablement la pollution qu'on ne voit pas. La pollution visible, par exemple les BPC, provoque des paniques exagérées. Tandis que de grandes menaces plus subtiles, comme 'amincissement de la couche d’ozone et l'effet de serre, devraient nous in- quiéter davantage, malheureusement, ce sont des menaces qui n’arrivent pas a échéance dans la vie d'un politicien. Cela rejoint le probleme de la pollu- tion en milieu rural et forestier, par les pesticides et les fongicides dont on ne connait peut-étre pas encore toute la portée, faute de recherche. 2- C'est de voir qu'on a évolué, qu'il y 2eu des progres. ll reste a apprendre a surmonter nos craintes au sujet de problémes qui n’en sont pas et surtout, a surmonter le syndrome du «pas dans mon arriére-cour», afin d’en arriver a une plus grande maturité et une plus grande responsabilité écologiques. + Il faut une information honnéte et objective, plutét qu'une information sentionnaliste ou a controverse. Il im- porte de trouver des scientifiques qui ne sont liés 4 aucun intérét économi- que, afin que la population puisse faire des choix clairs. Les sondages indiquent que les industries et les gouvernements ne Sont pas crédibles en matiére d'envi- ronnement tandis que la plupart des groupes environnementaux le sont. Mais il faut se méfier des «self appoin- ted leaders» en matiére de protection de l'environnement, de ceux qui pré- tendent représenter la population alors qu’ilsne représententrien du tout. ll est bon qu'il existe des groupes de pres- sion, mais il faut que Ceux-ci se structu- rent, qu’ils investissent dans la recher- che etquiils fassent preuve d’ouverture d'esprit. 4- Personnellement, j'ai changé beaucoup de choses dans ma vie. Je plante des arbres et je m’occupe de mon potager. J’évite dans la mesure du possible d'utiliser des tasses en «Styromousse». J'utilise des produits alternatifs pour le nettoyage. Un indivi- dune peut pas changer le monde, mais les petits gestes, quand on en parle, al- lument des lumiéres. Claude Lévesque est journaliste dans I'Outaouais —- LL (4d) «sejqesuodse: ep suoljiw /Z» ‘jueweuUoAUR