ll n'a pas vu Tombouctou mais parle sans doute avec assez de flamme de son voyage et de son projet pour convaincre son entourage car on lui préte un peu d'argent et, trois ans plus tard, il repart pour le Sénégal. Mais l'argent est déja épuisé lorsqu'il a besoin d'acheter un chameau pour traverser le désert. Tant pis ! ll partira a pied ! Terrassé bientét par la fatigue, fiévreux, la peau brdlée de soleil, les pieds en sang, il doit s'arréter et vit pendant neuf mois avec une tribu maure. Il apprend le langage, les rites religieux de la tribu puis, se faisant passer pour un Egyptien, il s'integre a une caravane. Enfin, le 20 Avril 1828, il pénétre dans Tombouctou ot son habille- ment et la couleur de sa peau tannée par le soleil le protégent : personne ne le prend pour un Européen. Il est décu par l’aridité du paysage, par les maisons de terre au milieu des sables. La ville n'a rien de ce qu'il avait imaginé. Il va y rester 14 jours, notant tout ce qu'il voit, ce qui l'intéresse, ce qu'il est le premier a découvrir. ll repart avec ses notes, met deux mois pour atteindre le Maroc ou il est réduit 4 la mendicité pour pouvoir s'alimenter et, incapable de payer le voyage de retour, il est rapatrié par le Consul de France a Tanger. Revenu en France , il écrit Journal d'un voyage a Tombouctou, premier témoignage précieux recueilli sur la ville. Il se marie, achéete une petite propriété en Saintonge et sarcle sa vigne. Dix ans apres son entrée a Tombouctou, il meurt a l'age de 38 ans. II fut non seulement un explorateur mais un exemple de courage : lorsque le réve est assez puissant, il faut davantage que la pau- vreté et la maladie pour freiner sa réalisation. René Caillié est enterré modestement dans un cimetiére de vil- lage, prés de sa vigne. A Mauzé on honore sa mémoire et, a Tom- bouctou, on montre aux touristes la maison qu'il habita pendant son séjour et dont la porte est surmontée d'une sculpture dans le pisé. Est-ce vraiment cette maison-la, intacte depuis presque deux siécles? Peu importe... Nous aussi nous pouvons réver... Pernelle Sévy.