VOLUME 7 — 11E EDITION — ISSN 1704-9970. Nous étions en partance de Québec pour I’lle d’Anticosti. A douze ans, mon premier voyage en bateau, j’étais vraiment impression- né. Surtout que le Capitaine nous avait gardés avec lui dans la “wheelhouse” d’ou l'on avait une vue fantastique. C’était magnifi- que de voir la ville de Québec du bateau milieu du fleuve Saint- Laurent. En longeant la céte, on voyait les villages prendre vie. En face de Beaupré on apercevait la silhouette de la basilique de Sainte-Anne qui se dessinait au loin, majestueusement comme une pyramide en attente. En s’ approchant de la riviére Saguenay, on voyait a l’horizon une multitude de baleines que l'on pouvait facilement reconnaitre par le jet d’eau qui s’élangait au dessus des vagues. J’aurais eu besoin de quatre paires d’yeux pour tout voir et tout emmagasiner. Le soleil était sur le point de se coucher. Quel beau spectacle. En amont c'est déja l’obscurité qui commengait. Plus on avangait plus le fleuve s’élargissait. Les deux rives s’éloignaient et devenaient des silhouettes. Ici et lA on pouvait voir des lumiéres qui scintil- laient tout comme un feu d’artifice de la Saint-Jean. J’ai souvenance de ce voyage comme si c’était hier. Mon pére dis- cutait de choses et d'autres avec le Capitaine Caron. Moi, j'avais les yeux rivés sur I’horizon en admiration de cette beauté sans vraiment comprendre pourquoi. Apres le souper je suis allé me coucher et me laisser bercer par le roulement du bateau et dormir d’un sommeil profond. J’étais debout dés le lever du soleil. En regardant par le hublot, je constate que nous sommes en vue de la céte. M’empressant de faire ma toilette matinale je monte vite sur le pont du navire pour retrouver mon pére. Il était la, respirant l’air frais d'un matin d’été en haute mer. - « Bonjour,” »me dit-il. - « T’as bien dormi ? » - « Mais oui papa, ol sommes-nous ? ». Il me pris la main et pointant du doigt au lointain, il me fit remar- quer les rochers qui ressemblaient a un groupe de soldats atten- dant l’inspection du général. - « ll nous faut passer tout prés de ces rochers. Dans quarante ou cinquante minutes, nous devrions accoster a Port-Menier. Mainte- nant allons prendre le petit déjeuner, le Capitaine nous attend ».