ORIGINE DU JARGON (selon le R.P. M. Demers et quelques autres Péres, c. 1850) Nous retrouvons, dans la préface du Dictionnaire Chinook, écrit par le Pére Demers et quelques autres Péres, un paragraphe qui traite de lorigine du jargon chinook. En voici la description: “Le Jargon Chinook fut inventé par les “engagés” de la Compagnie de la Baie d’Hudson, pour la plupart Canadiens-francais. Pour traiter avec les innombrables tribus indiennes habitant le pays a l’ouest des Rocheuses, il fallait employer un language que tous pouvaient com- prendre. C’est ainsi qu’est née l’idée d’inventer un jargon. Le Fort Vancouver (Orégon) était le poste de traite le plus important, les Indiens autant que les “traitants” devaient y venir pendant la saison de la traite; les employes de la CBH y enseignaient aux Indiens et “traitants” présents le jargon, que ces derniers transmettaient a leurs compatriotes lorsqu’ils rentraient chez eux. “Les deux premiers missionnaires en Orégon, le Rév. F.N. Blanchet, (qui devint Archevéque de Portland) et son compagnon, le Rév. Modeste Demers, (qui devint le premier évéque de Victoria, C.B.) arrivérent du Canada au Fort Vancouver le 24 novembre 1838. Ils devaient instruire un grand nombre de tribus indiennes ainsi que les femmes et enfants des “traitants” blancs, qui ne parlaient que le Chinook. Les deux missionnaires se mirent a l’ouvrage et apprirent le chinook en quelques semaines. Le Pére Demers apprit le plus rapidement et commenga a précher en Chinook. I] composa un vocabulaire qui devint trés utile aux autres missionnaires, et des cantiques qu’il enseigna aux Indiens. II traduisit toutes les priéres indiennes dans la méme langue. “Cest ainsi que le Jargon Chinook permit aux missionnaires de faire un travail remarquable d’évangélisation parmi les Indiens et les métis.” (Rév. L.N. St-Onge, dans le Dictionnaire Chinook du Pére Demers.) LORIGINE DU JARGON (selon le Dr. Geo Gibbs, c. 1863) Pour compléter cette étude, voici un extrait de la préface du Dictionnaire Chinook, du Dr. Geo Gibbs, publié par le “Smithsonian Institute,” Washington, D.C., mars 1863: Articles relevés du “Kamloops Wawa” “_. .Lorigine de ce jargon—une langue conventionelle semblable a la LINGUA FRANCA de la Méditérannée, au NEGRO-ANGLO- HOLLANDAIS du Surinam, au PIGEON-ANGLAIS de la Chine et a plusieurs autres langues mixtes—remonte aux navigateurs marchands de fourrure du siécle dernier. Ces “loups de mer” explorérent, au cours de leurs voyages durant les quinze années précédant 1800, les cdtes escarpées du Nord-Ouest de l’Amérique. Leur rendez-vous habituel était au Nootka Sound. Durant les échanges avec les Indiens, ils apprirent un grand nombre d’expressions et de mots Chinook. Ils les utilisaient de la méme facon lorsqu’ils traitaient sur la cote de l’Orégon. “_..Cest a l'arrivée de la Compagnie Astor que le Jargon Chinook connut une plus grande importance: de nombreux mots anglais y furent introduits, ainsi que, pour la premieére fois, des mots francais, ou plutdt, du patois frangais tel que parlé au Missouri et au Canada. Egalement, vinrent enrichir le vocabulaire du Jargon Chinook les dialectes des tribus indiennes environnant le Fort Astoria (siége de la Cie Astor): le “chinook pur’ et le ghehalis. “Les mots adoptés de chacune de ces langues, (le patois francais, langlais, le “chinook pur” et le ghehalis) étaient, de toutes évidence, faciles a prononcer. Mais, lorsqu’il fallait se rapporter A un objet ou une notion inconnus jusqu’alors par les Indiens, le ou les mots employés sortaient des vocabulaires frangais ou anglais exclusivement. “.. Au cours des années, alors que la “civilisation” pénétrait dans le milieu des aborigénes, le jargon Chinook devint plus riche, plus précis. Il fut mieux connu des employés de la Cie de la Baie d’Hudson et de ceux de la Cie du Nord Ouest, qui succédérent a la Cie Astor. L’Orégon se peuplait, les colons américains qui s’y établissaient se familiarisaient vite avec le Jargon, seule langue de traite et de commerce au niveau régional. En peu de temps, le Jargon devint la langue populaire, le language universel, le lien commun de communication a travers les territoires entiers de l'Orégon, utilisé autant par les diverses tribus indiennes que par les “Blancs.” “Son emploi fut cependant géographiquement limité tant que la plus grande partie du commerce se fit en Orégon; mais aussitdt que des postes de traites importants et des forts (militaires et autres) furent construits plus au Nord, dans les territoires britanniques, le Jargon suivit Pévolution et immigration humaine pour s’étaler jusque dans des territoires presque inhabités des régions de la Haute Colombie et de la Vallée du Fraser. Enfin, parmi toutes les tribus indiennes habitant entre le 42e-et le 57e paralléle de latitude, il n’est pas rare de trouver un interpréte parlant le Jargon... .” 13