12 Le vendredi 10 octobre 1997 LE S(_)LEIL Tu as crié Let Me Go : Rencontre avec la cinéaste Anne Claire Poirier ans Tu as crié Let Me Go, Anne Claire Poirier, la cinéaste québécoise, par- tage avec le public l’expérience d'une tragédie personnelle : le meurtre de sa fille Yanne. La réalisatrice en profite pour lancer un débat sur la tolérance face a la drogue. Le documentaire; tourné en noir et blanc, exprime sous la forme d’un poéme dit par la cinéaste, V'incompréhension, la _ rage, la douleur et la peine devant DE VANCOUVER 2, - 22 novembre 1997 =] Studio 16 MORICO 15 novembre, Studio 16 1545 7eéme Avenue O., Vancouver Billets : GEORGES MOUSTAKI 22 novembre, Centennial Theatre 2300 Lonsdale Ave., North Vancouver Billets : _ DANIEL BELANGER 2 novembre, Richara's on Richards 1036 Richards Street, Vancouver Billets : ISABELLE LONGNUS 8 novembre, 1545 7éme Avenue O., Vancouver Billets : 5 $ (membres) 8 $ (non membres) 23 $ (membres) 28 $ (non membres) 23 $ (membres) 28 $ (non membres) 10 $ (membres) 15 $ (non membres) Billets en vente Radio-Canada Colombie-Britannique la perte de son enfant ; une séparation déja entémée par la toxicomanie. Yanne Poirier était héroinomane. La réalisatrice cherche & comprendre le probléme gran- dissant de la drogue. Elle interroge des travailleurs de rue, des toxicomanes, des thérapeutes, des parents ou amis (dont le chanteur Dan Bigras) qui ont vécu une tragédie semblable a la sienne. Elle les questionne sur la ou les causes qui poussent les jeunes a se tourner vers la drogue. Anne Claire Poirier n’obtient pas une réponse unique, claire, nette ou précise, mais elle constate cependant que la société se lave les mains de ce probléme en incriminant les toxicomanes : « On en parle toujours comme étant quelque chose d’extérieur & nous. On en -parle comme de quelque chose qui concerne la police, la justice, puis on s’en lave les mains un petit peu comme société... les moyens qu’on a Le Vancouver International Film Festiva utilisés jusqu’A maintenant, faut quand méme constater qu’ils ne donnent pas les résultats auxquels on s’attendait, ga c’est évident. » Le documentaire apporte, en terminant, l’idée de tolérance envers ce fléau ; peut- étre la société devrait-elle cesser de juger les jeunes dans la rue, d’imposer des interdits et de se demander plutét ce qu’elle a a leur offrir. Quelles sont les valeurs qu’on propose aux jeunes dans une société —_ profondément individualiste ? Anne Claire Poirier est trés heureuse de sa collaboration avec Vécrivaine Marie-Claire Blais, pour le poéme, et avec Marie Bernard, pour la musique. Le film a été tourné en noir et blanc afin d’exprimer un regard « autre », un état d’esprit qui correspondait aux propos de la cinéaste. La réalisatrice a tourné sur les lieux mémes de la tragédie. Tu as crié Let Me .Go commence et se termine sur de superbes images d’icebergs se séparant des glaciers et errant vers les mers du Sud. La cinéaste symbolise ainsi la transformation de sa fille, mais aussi de la mére. représentent Vaboutissement d’un « voyage » commencé avec le deuil de cette perte et la réconciliation avec la vie. Mme Poirier constate que son film a déja provoqué bien des discussions au Québec. Elle dit avoir regu nombre de lettres et appels téléphoniques de parents déclarant avoir changé leur attitude envers la drogue aprés avoir vu le film. Anne Claire Poirier conclut : « Quand on dit de quelqu’un que c’est un drogué ou un junkie, c’est comme si on avait tout dit, on ne prend pas la peine de voir que Les icebergs c’est une personne dont il s’agit. » SYLVAIN AUMONT Rencontre avec le cinéaste Atom Egoyan roman de américain Russell Banks, The Sweet Hereafter raconte Vhistoire d’une dapté du Pécrivain petite communauté de la Colombie-Britannique en deuil de ses enfants. The Sweet Hereafter a remporté le prix spécial du jury, ainsi que le prix du_ jury oecuménique au dernier festival de Cannes; cela en fait le film canadien le plus récompensé dans Vhistoire de ce festival. Atom Egoyan est réputé pour la rigueur intellectuelle de ses films : Family Viewing, Speaking Parts ou Exotica une froideur clinique, brillante, mais difficilement dernier film du cinéaste canadien emprunte une nouvelle direction. La décision d’adapter le roman de Russell Banks (un autre de ses romans, Afflictions, vient d’étre adapté par Paul Schrader) permet au cinéaste d’apporter possédent accessible. Le une dimension plus humaniste a son travail. Le cinéaste déclare : « J’étais intrigué par lidée d’observer une communauté située en-dehors dun milieu urbain. Plus particuliérement, j’étais intéressé par le personnage de Nicole (Sarah Polley). Comment elle vit avec son drame de l’inceste ; sa négation, sa réaction devant les craintes de son pére qui ne cherche qu’a s’aider lui-méme... il y a une grande dignité et une grande force dans le geste de Nicole, vers la fin du film. » Egoyan ajoute que l’acteur britannique Ian Holm, dans le réle_ principal de Mitchell, (Pavocat cherchant & aider les membres de la communauté), n’a pas été son premier choix: « Donald Sutherland devait faire le film, mais il a da se retirer avant le début du tournage parce qu’il était épuisé. La partici pation de Tan Holm est devenu un heureux accident parce qu'il est extraordinaire dans mon film. » The Sweet Flereafter a été tourné dans la région de Merritt, en Colombie-Britannique, ainsi qu’& Toronto pour les intérieurs. Egoyan, qui a grandi a Victoria et & Vancouver, a voulu tourner dans cette région qu’il connaissait vaguement, plutét que dans le nord de V’Ontario qui lui est complétement étranger. Le s financement du film a_ été structuré de telle maniére qu’Egoyan n’a disposé que de 5 jours de tournages pour saisir les scénes extérieures. Le scénario d’Egoyan souligne le paralléle entre histoire de Nicole et le poéme de Robert Browning The Pied Piper of Hamelin. Le poéme n’est pas inclus dans le roman. « C’est un ami & moi, Alan Bell, qui, & la lecture du scénario, m’a_ fait remarquer les similarités entre mon histoire et le poéme de Browning, indique le cinéaste. Pai vite fait d’acquérir le livre et sa lecture m’a_ rapidement convaincu qu’il fallait Pinclure dans le film. » The Sweet Hereafter marque une étape importante dans le cinéma d’Atom Egoyan. La direction photographique de Paul Sarossy, la musique, aux tons celtes et sud-américains de Mychael Danna, le jeu des acteurs et surtout la mise en scéne d’Egoyan participent & un film qui passe & un cheveu d’étre son chef-d’ oeuvre. Lucide et émouvant. The Sweet Hereafter sort en salles commerciales le 10 octobre. SYLVAIN AUMONT