eee Oe [VOUS MEN DIREZ TANT DELIMA PREND LES GRANDS MOYENS Seule ce matin-lA dans sa cuisine aprés l’ouragan du déjeuner, Délima se sentait déprimée. Comme la mére de famille de la chanson de Jean Ferrat, elle se trou- vait ‘‘entre les courses et la vaisselle’’. - On ne voit pas le temps passer, faut-il pleurer, faut-il en rire | Ah, plaignons la ménagére ! Son sort n’est pas toujours rose. Ouf ! Les enfants sont par- tis pour l’école, Rosaire est lui aussi parti pour le chan- tier. Notre héroine buvait son troisiéme café, la téte baissée et les idées noires. Mais ce qui chagrinait Dé- lima, ce n’était point le tohu- bohu matinal, c’était le fait qu’on lui avait livré la veille sa cuisiniére électrique der- nier cri, et qu’elle s’était apercue que, bilinguisme of- ficiel ou non, les indications sur ladite merveille, toute de chrome revétue, étaient en anglais. Et elle entendait déja les enfants commander 4a la cantonade : - Mets le rond du milieu & ON ! Oy bien ‘‘Maman, l’oven A high c’est trop chaud pour ré- chauffer le paté chinois ”’. Notre Délima est en train de penser. Elle se remémore les recommandations de 1’ Office de la langue francaise A ce sujet. Sur les manettes de commande (Knobs), On et Off se traduisent par Mar- che et Arrét. Oven, c’est le four. Low et High signifient 4 peu prés Doux et Chaud en frangais. Hot (pour le four) se traduit par trés chaud. Pour les deux éléments de cuisson (l’un est le grilloir et l’autre le four proprement dit) qui se trouvent dans le four a hublot panoramique (oven window), les deux in- dications anglaises pour 1’ allumage Broil et Oven cor- respondent au frangais : Grilloir et Four. On dit aussi Voute et Sole. La voute est la plaque chauffante de la partie supérieure, et la sole celle de la partie inférieure - du four qui peut s’élever bien sQr 4 une température beau- coup plus haute. Le dessus de la cuisiniére se dit table de travail, table de cuisson ou foyers de cuisson (top heating elements). Il y a aussi un magnifique tableau: de bord qui contient entre autres deux voyants de controle (oven lights) quisi- gnalent l’allumage de la lam- pe-témoin du four. La minu- terie (timing device) se com- pose d’un cadran avec de nombreux boutons de régla- ge thermostatique. Les po- Sitions des manettes ou des boutons poussoirs permet- tent de choisir les ° diffé- rents modes de cuisson ; cuisson au four (bake), ro- tis (roast). N’oublions pas que le four contient un gril- loir infrarouge, pour les grillades, avec deux allures de chauffe (two temperature settings). Ce four est auto- nettoyant (self - cleaning Oven). Dans sa dépression, Délima se console en se disant que, grace au tournebroche, elle pourra préparer de bons poulets. - (tournebroche se dit en anglais rotisserie, qui a un autre sens enfranc¢ais.) - Délima se léve et prend une feuille de carton. Elle découpe de petits carrés sur lesquels elle écrit de son écriture du dimanche les précieuses rubriques en bon frangais. Elle les colle en-. suite sur l’anglais de la cui- siniére. Puis rassérénée elle commence A préparer le dimer. Rosaire lui, que ce soit cuit en francais ou en anglais, cela ne le pré- Occupe guére. Son estomac ne connafit point d’autre langage que l’appel enivrant d’une appétissante tourtiére qui bientdt va trdner en plein milieu de la table familiale. Louis- Paul Béguin LECOIN PHILATELIQUE L’un des timbres d’Anni- versaires Généraux émis cette année par les Postes britanniques était un timbre de 3p marquant le 50éme anniversaire de la décou- verte de la tombe du jeune pharaon égyptien Toutankhamon. Cette décou- verte fut le plus grand évé- nement dans l’histoire de l’archéologie et il est donc surprenant que cette cir- constance n’ait pas été mar- quée alors par une émission spéciale de timbres-poste. Cependant, au cours de ces derniéres années, Toutank- hamon a été représenté sur un certain nombre de: tim- bres et les plus récents pourraient constituer la base d’une intéressante collection thé matique. Le nouveau timbre anglais coincide avec l’exposition Organisée sous les auspices conjoints du British Museum et de deux quotidiens natio- naux ; cette exposition, qui fut ouverte au British Mu- seum a Londres le 30 mars continuera jusqu’en septem- bre. Un petit nombre seule- ment des trésors de Tout- ankhamon est exposé, mais telle est leur valeur que les mesures de précaution pri- ses pour en assurer la sau- vegarde ont été extrémement minutieuses. Ce n’est que la jtroisiéme fois que les reli- ques du jeune quitté 1’Egypte. On ne sait pas grand’chose au sujet du jeune ro! lui- pharaon ont méme, outre qu’ilrégnapen- dant la: 18&me dynastie, vers 1350 avant l’ére chrétienne, rétablit la capitale 4 Thé- ‘bes, réinstaura Amoun et files autres dieux et: mourut dans sa 18éme année. Le Jtrésor inestimable qui rem- plissait sa tombe était d’un éclat incomparable, du fait surtout que la tombe, seule parmi celles des autres pha- raons, était demeurée in- tacte pendant 33 siécles. En 1902, ’archéologue américain, Théodore Davis, obtint des autorités égyp- tiennes une concession pour faire des fouilles dans la Vallée des Rois. A cette épo- que, la Vallée avait été si bien explorée par des expé- ditions précedentes qu’on estimait qu’il serait peu pro- bable d’y faire de nouvelles découvertes. Neanmoins, Davis découvrit plusieurs tombes qui avait échappé A ses prédécesseurs. Ce- pendant, en 1914, époque ou sa concession fut cédée A un Anglais, Lord Carnarvon, il semblait que les secrets de la Vallée des Rois avaient été complétement révélés. Carnarvon, sportif, cou- reur automobile et arché- ologue amateur, passait l’hi- ver en Egypte pour des rai- sons de santé et s’occupait, depuis 1906, de fouilles ar- - chéologiques, en collabora- tion avec Howard Carter. Ils. décidérent de se con- centrer sur une petite zone triangulaire prés de la tom- be de Ramsés VI, mais, en travaillant d’une maniére constante et systématique, ils obtinrent des résultats impressionnants. Dés l’an- née 1917, certains indices avaient révélé la présence d’une tombe, mais ce ne fut que le 3 novembre 1922 qu’ils découvrirent l’entrée du sépulcre, sous les décom- bres de fouilles effectuées précédemment autour de tombes avoisinantes. Carnarvon rejoignit Carter plus tard ce mois-1a et ils travaillérent tous deux sur Vemplacement. La tombe elle-méme fut découverte en décembre 1922 et au cours des mois qui suivirent, l’an- tichambre, lannexe, la chambre des trésors et la chambre sépulcrale furent graduellement révélées. Les travaux avancérent len- tement et ce ne fut que le 3 février 1927 que les trois cercueils furent ouverts successivement et que la momie de Toutankhamon fut enfin exposée. Etant donné importance de cet événe- ment, il est surprenant qu’il n’ait pas été marqué par des timbres spéciaux Acette époque, bien que les Postes égyptiennes eussent émis de nombreux timbres repré- sentant les antiquités du pays. En réalité, Toutankhamon ne fit son début philatélique qu’en 1947, année od son masque funéraire en or parut sur le timbre de 50 mils égyptiens d’une série émise en honneur de 1’Exposition Internationale des Beaux- . Arts. Un autre timbre de cette série reproduisait le — portrait sculpté de la belle- mére du pharaon, la reine Nefertiti. Celle-ci orna les | timbres. de valeur élevée appartenant A la série dé- finitive de 1953 ainsi que le timbre de 1956 concernant la campagne internationale en faveur des musées. Ces. derniéres années, Toutankhamon a figuré sur. un certain nombre de tim- bres égyptiens. en or trouvée dans sa tombe La lampe - parut sur le timbre défini- tif de 20 mils émis en 1960 et son masque funéraire fut représenté sur le timbre définitif de 500 mils émis en 1964 4 l’occasion de la Féte des Méres reproduisait une frise représentant le roi Ikhnaton et sa famille, d’ aprés la décoration sur la tombe de Toutankhamon. Un2 série de quatre timbres, mis en circulation en 1967 pour marquer le Jour dela Poste, représentait la statuette en or du dieu Anubis, la téte ~ en albatre du jeune pharaon, le magnifique sarcophage orné de pierreries et sculp- té A partir d’un seul bloc massif. de quartzite jaune trés fine, ainsi que la sta- tue du roi, et quelques-uns des principaux objets re- cueillis dans la tombe. La peinture sur le dos du troéne enseveli dans la tombe fut reproduit sur un timbre de 1967 qui célébrait le Jour des Nations Unies. Le trésor de Toutankhamon fut exposé 4 Paris il yacing ans. Aucun timbre francais ne fut €mis en cette occasion, mais la République arabe du Yemen remédia plutdt tardi- ‘vement &4 cette omission en produisant en 1970 une série de timbres commémorant l’Exposition de Paris et re- présentant le masque funé- raire, le sarcophage et au- tres objets trouvés dans la tombe. Plus récemment, le ro- yaume de Bhutan dans l’Himalaya émit une série’ de timbres représentant de exemples remarquables de l’art de diverses civilisa- tions et choisit le masque funéraire de Toutankhamon pour représenter l’art de l’Egypte antique. Au cours “de la derniére décennie, de nombreux timbres provenant de toutes les parties du monde ont reproduit les tem- ples de la Nubie, pour faire connaftre la campagne de lV?UNESCO en faveur de leur} préservation et ilse pourrait bien que Toutankhamon riva- lise avec les Colosses d’Abu Simbel comme théme phila- télique populaire. LE SOLEIL, 6 OCTOBRE 1972, XIII