o jique e - 1" éditio anvie ————— ee ee Eee] - Tana te ; erebe we. Ah ! oui, on n’utilise pas ces salutations dans la région. Ils ne comprennent pas trop bien le bambara. Ici, ce sont des malinkés patoisants. On se moque un peu de moi, il faut dire que je n’ai pas d’allure. J’ai certainement les traits tirés et le nez pincé, la déshydratation qui s’accentue, les cheveux hirsutes et raides de poussiére, jaunatre, bien entendu. Plutét chancelant et bafouillant, je n’ai pas la prestance des grands explorateurs si bien rendus dans les images d’Epinal. Qu’importe les apparences, moi, j'ai soif. Les enfants a demi nus et poussiéreux se précipitent vers ’intrus, chacun voulant me serrer la main. - Toubabou, Toubabou ! Bonjour, ¢a va ? Les plus petits fuient en hurlant se réfugier dans les bras de leur sceur ainée. Souvent pas beaucoup plus grandes qu’eux. Elles les soulévent par un bras, les plantent a califourchon sur une hanche et s’approchent a leur tour, toutes empreintes de leur supériorité de petite mére. Ah, mais voila Mamadou Ouley Condé. C’est un vieux copain ! Au sens strict du terme, il est encore plus vieux que le chef du village. Il garde sa main prés de la poitrine et d’un petit geste dédaigneux, il chasse les enfants qui, comme des mouches, s’agglutinent autour de moi. Lui va pouvoir me dépanner. Mais pas sans la litanie des salutations obligatoires : Aniké... etc. Je le couvre littéralement de postillons baveux. Puis la conversation commence enfin. - Abedi? ¢ava? - M’mankéndé, n’fadi manyi ! je suis trés malade, mon corps ne va plus ! Ah bon ? Il avait l’air pourtant en pleine forme le vieux bandit. - | bara kéréya ? tu deviens vieux ? - Sisan n’bara ké, koni n’bara kossiaman yé, ka kossiaman lon. N’ fadi lé tesonna oko. Plutét longue la tirade. Je n’ai pas compris, la téte est lourde (j’ai surtout soif). Je lui demande de répéter et je comprends qu’a présent, il est avancé en age, qu’il est devenu sage (interprétation de « il a beaucoup vu et beaucoup connu »), mais que c’est son corps qui ne suit plus. - Pourquoi ne vas-tu pas voir un médecin ? Je sais qu’il n’y en pas dans la région, mais, tous les deux, on pense naturellement a un guérisseur. « Je n’ai pas assez d’argent » me répond-il. Je m’y attendais un peu. Les griots et les guérisseurs font de bonnes affaires dans la région. Je lui dis de venir me voir au camp. II y a la un agent médical qui, tout en n’étant pas infirmier, n’hésite pas a se faire passer pour docteur. II est assez terrible ! Si on ne lui donne pas ce titre, il ne soigne pas. C’est tout ! Je ne l’aime pas trop, il a une téte de renard. Bien que payé par le gouvernement et quelques organismes privés, il exige de ses malades une contribution supplémentaire que bien peu peuvent se permettre. Au camp, il fait la loi, il est riche. II fait fortune avec le trafic de médicaments. II est aussi le seul a connaitre un peu la médecine. Si je lui améne Condé personnellement, peut-étre n’osera-t-il pas abuser de la situation. ... Suite page suivante...