12 - Le Soleil de Colombie, vendredi 11 mai 1990 ARTS ET SPECTACLES. Yves Masson, auteur de piéces pour jeunes « Ce théatre demande humilité et simplicité » Directeur artistique de la compagnie de théatre du Sang Neuf, installée a Sherbrooke (Québec), Yves Masson est également l’auteur de «Fais de beaux réves». Cette pidce, destinée aux adolescents, a été interprétée, cet hiver, par le. théatre La Seiziéme, 4 Vancou- ver et dans certaines écoles de la Colombie-Britannique. Ayant rencontré un vif succés, elle sera 4 l’affiche, de nouveau, au début de l’année 1991. - Le Soleil de Colombie: Quel est le but de cette visite a Vancouver? - Yves Masson: Je n’avais pas pu étre present lors de la diffusion de la piéce. Alors je suis venu pour rencontrer |’équipe de La Seiziéme qui est vraiment formidable. C’est également l'occasion de re- travailler la piéce mais surtout de parler d’une future collabora- tion entre La Seiziéme et nous. On peut envisager la co- production d’un spectacle par les deux compagnies, méme si, géographiquement, nous som- mes situées aux Antipodes. Cette formule permet des projets de plus grande enver- gure et assure une meilleure diffusion au sp%ctacle. - Le S.C.: Comment avez- vous réagi aprés le succés rencontré par votre piéce en Colombie-Britannique? - Y.M.: J’étais trés content. On m’a dit vraiment beaucoup de bien de |’interprétation de «Fais de beaux réves» par La Seiziéme. De toutes facons, j’étais confiant car je connais- sais le metteur en scéne, Roger Gaudet, qui est un artiste de qualité. C’était la premiére fois qu’une autre compagnie jouait une piéce du Sang Neuf et j’ai été trés flatté que La Seiziéme choisisse ce spectacle pour ses débuts dans le théatre pour adolescents. -Le S.C.: Comment étes- vous venu au théatre pour adolescents? - Y.M.: Tout est parti d’une commande d’un spectacle pour jeunes sur la violence. II a regu un bon accueil. Je me suis dit: pourquoi ne pas continuer dans ce domaine? D’autant plus qu’il existe peu de piéces de théatre pour adolescents. J’ai écrit sept piéces en sept ans. Chacune d’elles est accompagnée d’un cahier pédagogique pour susci- ter des réactions aprés le spectacle. Cet outil est trés apprécié par les professeurs des “écoles ol nous jouons. C’est un théatre émancipateur avec lespoir que le spectacle ne tombe pas dans |’oubli lorsque les lumiéres s’éteignent. -Le S.C.: Est-ce qu’il est difficile d’écrire pour les jeunes? - Y.M.: Le théatre pour adolescents demande de |’hu- milité, de la simplicité et beaucoup de travail. C’est un public exigeant, qui n’a pas l’habitude du théatre. On n’apas le droit a l’erreur, le spectacle doit les amuser tout en rejoignant leurs préoccupa- tions. «Fais de beaux réves» parle de _ |l’autonomie, ma prochaine piéce traitera du décrochage scolaire. ll est important d’aborder ce phéno- Le Pro Nova String quartet a |’Alliance Francaise Les violons de la renommée Par Francois Limoge Parmi les derniéres manifesta- tions de sa saison culturelle, l’Alliance Frangaise de Vancou- ver a eu la trés bonne idée de programmer The Pro Nova String pour une soirée entiére- ment consacrée a la musique de chambre. Depuis sa création en 1985 @ Vancouver Nord, qui reste son lieu d’attache, ce groupe de musiciensconnait un succés grandissant comme l’atteste sa présentation dans l’émission West Coast Perfor- mance series de la CBC. Une réussite que |’on doit attribuer, sans conteste, ala qualité des membres du quartet. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un coup d’oeil sur la trajectoire des quatre musiciens, a |’image de Vivian Waters, premier violon et fondatrice du groupe, qui ajoué dans de grandes formations comme le Philarmonique de la Nouvelle-Orléans ou le «Metro- politan Opera Orchestra». Les quatre membres du quartet «The Pro Nova String»: Vivian Waters, Hans-Karl Piltz, Leah Wyber et Sari Inoue Pearce (de gauche a droite). Photo: Terry Peters. Venus d’horizons trés diffé- rents, c'est l’amour de la musique de chambre qui a fait se rencontrer Hans-Karl Piltz (alto), Leah Wiber (violoncelle), Sari Inoue (deuxiéme violon) et Vivian Waters. «Dans ce type de musique, la performance indivi- duelle est trés importante. Tous les musiciens sont a égalité. Il y a une discussion, un dialogue permanent entre nous», expli- que cette derniére. S’il joue pour la premiére fois dans une institution franco- phone, la présence du quartet a l’Alliance frangaise n’a rien de surprenant. «Nous essayons de nous produire dans des lieux différents, hormis les quatre concerts que nous donnons, chaque année, ala Presentation House», poursuit Hans-Karl Piltz. Les amateurs de concerts estivaux pourront ainsi les ‘retrouver, cet été, au festival Mozart de Whistler. Mozart qui sera également au programme, le 16 mai a l’Alliance francaise, aux cdétés de Brahms et de Malipiero, compositeur italien de la fin du 19@me. «Dans nos concerts, il y a toujours un compositeur contemporain,» rappelle Sari Inoue, citant pour exemple le canadien Alexandre Louis. «Nous voulons promou- voir les créations contemporai- nes et habituer le public a ce type de musique, sans toutefois choisir des oeuvres par trop hermétiques». The Pro Nova String Quartet - Mercredi 16 mai, 20 heures - Entrée gratuite mais réserva- tions conseillées - Alliance francaise, 6161 rue Cambie - Tél. : 327-0201. Pour écrire ses piéces, Yves Masson se replonge dans univers des adolescents. Notre photo: Yvan Morissette du théatre La Seiziéme dans «Fais de beaux réves». mene. Que deviennent ces jeunes? Que leur réserve l'avenir? J’écris pour les adolescents mais les adultes sont toujours présents dans la fagon dont j’aborde la thémati- que et ils apprécient aussi mes spectacles. C’est primordial. En ce qui concerne |’écriture proprement dite, elle doit étre rapide, un veritable jeu de ping-pong ou l’action§ est omniprésente. Il faut tenir compte des habitudes culturel- les des jeunes. - Le S.C.: L’adolescence est souvent présentée comme un age difficile. Qu’en pensez- vous? - Y.M.: L’adolescence est une période d’intense remise en question. De fait, les 12-17 sont trés perméables aux idées. II est nécessaire d’avoir un échange avec eux, de les interroger mais également de leur fournir des propositions. Dans mes piéces, les adolescents ne sont pas timorés et les parents des bourreaux. Il y a beaucoup de spectacles ou l'on glorifie l'adolescence, je pense que c'est bien plus complexe que cela. C’est pourquoi le théatre pour jeunes implique beaucoup de travail. - Le S.C.: Justement. Com- ment |’auteur adulte fait-i] pour rester en contact avec ce monde trés différent? - Y.M.: Je vais dans les lycées Suivre des cours. J’observe, je prends des notes. Ce n’est pas une recherche scientifique mais elle demeure trés utile, elle nourrit mon imaginaire. Par exemple, j’ai constaté qu’en classe, |’habillement est uni- sexe. Toutes les filles portent des pantalons. C’est un fait de société qui m’interpelle. Mais si dans |’une de mes piéces, j’ai unesceéne qui se passe al’école, les filles seront en pantalon. Le public doit pouvoir s’identifier aux personnages. Propos recueillis par Francois Limoge « Souvenirs de la Maison jaune » au Vancouver East Cinema Histoire d’une folie ordinaire .Par Francois Limoge Bunuel peut étre, Tati pour- - quoi pas, Bukowski sdrement. On peut reconnaitre toutes ses influences dans le film «Souve- nirs de la Maison jaune» du réalisateur portugais Joao Cé- sar Monteiro. Mais quitte a vouloir classifier ce film dans une catégorie bien précise, exercice 6 combien périlleux, «Souvenirs de la Maison jaune» se range, sans conteste, dans la série des oeuvres loufoques, drdles et décapantes qui font le bonheur des piliers de cinéma- théques. Agé d’une cinquantaine d’an- nées, le réalisateur portugais, issu. d'une famille rurale bourgeoise marquée par |’esprit anti-clérical et anti-Salazart de la 1ére République, conte histoire d’un pauvre diable végétant dans une pension de famille de Lisbonne. Personna- ge bien peu avenant que ce Jean. de Dieu, interprété par Joao César Monteiro lui méme. Squelettique, victime de dé- mangeaisons incessantes, il fume cigarette sur cigarette. Lorsqu’il ne chasse pas d’hypothétiques punaises dans son lit, Jean de Dieu joue les voyeurs et colle son oeil a la serrure de la chambre de Julieta, la plantureuse fille de Dona Violeta. Occupation non sans risque étant donné le caractére de Dona Violetta, qui méne sa pension d’une main de fer. Un véritable «garde chioume» qui coupe |’électricité tous les soirs a 9 heures pétantes pour faire des écono- mies. Lubrique et amoral ce Jean de Dieu lorsqu’il prend les derniers sous de sa _ vieille maman, femme de ménage. _ Suite page 13