Le Moustique Volume3 - 2** édition Février 2000 Frédéric Chopin, HU il y a cent cinquante ans déja ... (suite ...) Chopin était tenu pour le plus grand pianiste de son temps et, pourtant, il repugnait a se produire en public et ne le faisait que trés rarement. Mais il a révolutionné la technique du piano. L'un des inventeurs de formes les plus singuliers, il a retiré le scherzo de la symphonie et en fera une ceuvre autonome. Il compose des préludes sans suite, porte le nocturne 4 son apogee et crée la balade instrumentale. I! libére I'harmonie de toutes contraintes, ouvrant une voie royale a Debussy, Fauré, Ravel, au Jazz qui s'emparera de sa fameuse note bleue pour en faire sa marque de fabrique. Chopin osera la polyrythmie et la polytonalité, associera le modal et le tonal, dissoudra le sentiment de tonalité dans des ceuvres singuliérement mouvantes. Cette musique, la plus raffinée de son siécle, est sortie tres vite du cadre des cercles savants et cultivés pour gagner le coeur du grand public et finir parfois, pour le meilleur en chansons - Serge Gainsbourg -, pour le pire en arrangements pour ascenseurs. Elle fait se rejoindre la musique baroque instrumentale par sa concision et I'intégration des ornements a la mélodie méme et la musique du XX°® siécle dans les métissages auxquels elle nous a habitués. Il fut un temps ou l'on refusait 4 Chopin le statut de compositeur de tout premier plan - davantage la critique que les musiciens. Trop sentimental, trop confiné au seul piano, trop facile d'accés, pas d'ceuvres longues, développées, disait-on. Et puis l'on a eu conscience que la grandeur de Chopin tenait précisément a son art unique de la concision en son temps, la concentration, sa capacité d'invention, la liberté absolue de son harmonie. Chopin est I'exemple méme du compositeur qui compose sans se soucier ni de son temps, ni de modernité. II s'appuie sur son adulation des grandes ceuvres du passé, sans jamais les citer, pour écrire la musique la plus neuve, la plus audacieuse du premier romantisme. Ignorant ses propres audaces, il révolutionne la musique méme. Le grand pianiste et pédagogue russe Heinrich Neuhaus affirmait que la << Quatriéme Ballade condense Tristan et Isolde de Wagner en quelques minutes >>. Extraits de l'article d' Alain Lompech dans Le Monde du 18 octobre 1999.