a Najly Le Soleil de Colombie-Britannique, vendredi 10 mars 1995 - 14 Est-ce ainsi que les hommes vivent... PAR JOHANNE CORDEAU x Je vous dirai, sous le sceau de l’aveu, que je ne connaissais pas VPoeuvre de Robert Lalonde. D’ailleurs, puis-je dire que je la connais aprés cette premiére rencontre avec Le Petit Aigle a téte blanche? Pas le moins du monde. Lalonde, tout comme Aubert, personnage principal de ce roman, a passé, dans un effleurement d’ailes, pour s’enfuir vers le -paradis, ou: Venfer, c’est selon... Avec ce huitiéme roman, Robert Lalonde, qu’on dit, en quatriéme de couverture, «jouer sur scéne les poétes oubliés, incarnant de plus en plus des voix qui crient dans le désert», a remporté le prix du Gouverneur-Général 1994. Dés les premiéres pages, j’ai été frappée par ce quej’ appelleraisle vertige du verbe. On se sent happé par |’affluence tranquille des mots lourds de conséquences. On n’écrit pas impunément un langage de «chassé de paradis» avec les mots désir, oubli, diable,. amour, On s’accroche de plus en plus au pinceau La galerie West End 4 Victoria présentera, du 9 au 25 mars, une exposition de 25 superbes peintures de la paysagiste Louise Martineau. Née au Québec, Louise a développé trés t6t un intérét pour les paysages de sa _ région: Charlevoix, Beaupré, Baie St-Paul, etc. A l’huile, sa touche est a la fois spontanée et généreuse, traduisant avec précision son amour des couleurs vives et contrastantes. : On associe déja son oeuvre 4 celle de Henri Masson, célébre paysagiste canadien des années 30. Louise Martineau en sera a4 sa 3éme exposition exclusive, sa premiére dans l’Ouest canadien. Au cours des six demiers mois, elle a venduune quinzaine de toiles, signe évident d’une artiste qui est populaire - sans étre commerciale - et dont les oeuvres semblent représenter un trés bon placement. Soulignons en terminant la compétence, |’affabilité de la directrice de la galerie West End, Mme Colleen Towstego. Elle n’hésite jamais 4 prodiguer ses conseils aux clients et 4 partager ses vastes connaissances. Elle nous a confié, fait intéressant, que la clientéle des galeries est de plus en plus jeune. Nombre de jeunes couples investissent en effet désormais dans la beauté artistique en achetant des toiles pour décorer leur maison ou appartement. Nul doute que grfice a exposition, beaucoup se rendront compte que Mme Martineau est un choix judicieux. Le correspondant du Soleil sera présent pendant la premiére et fera partager aux lecteurs les sentiments des invités. Jacques Clau condamnation, sans mettre sous sa plume affiitée les émotions éclatées de ces personnages, parfois d’une animalité troublante et souvent d’une humanité transcendante. La vie d’ Aubert débute 4 peu prés au début du siécle et ses pérégrinations le conduiront dans la région de Québec et aux tréfonds des foréts et de lui-méme. Les lieux visités par Aubert s’appellent sensualité, passion, folie, purgatoire, mort. Dans notre condition d’étres ~vivants: et pensants «(...) nous sommes coupables d’un seul péché, celui de nous rappeler le paradis et de vouloir le retrouver cofite que cofite». : Puisque la vérité «n’est d’ aucun intérét tant qu’on ne va pas voim, Aubert se met en route et rencontre des personnages blessés, qui battent de l’aile, mais que la poésie fera renaitre. De son frére Vianney, qui Vinitie 4 «(...) ’'un de ces amours contre le bon sens», 4 Pauline, amie douce, apaisante qui veille sur son poéte bien-aimé, ils paveront tous de leurs bonnes intentions et de leur amour, le paradis d’ Aubert. Le Petit Aigle a téte blanche avait déja eu des pressentiments de ce paradis tant désiré, «(...) le dictionnaire, la Mattawin, les illuminations de la poésie; les livres, les musées des vieux pays et méme l’ardeur de |’amoun». Le paradis prend quelquefois des allures de folle épousée. Par la folie, Aubert se cache et en arrive 4 dire que «(...)l’oubli estlenoir paradis qu’on mérite quand on se laisse _passer pour fou en espérant une douce imbécillité, qui n’appartient . en propre qu’aux bétes et aux ames vendues au diable». Cependant, le Petit Aigle connaitra une seconde naissance quand il donnera une voix au poéte. «(...) Le paradis n’était pas ce qui était arrivé, et dont il fallait 4 tout prix se souvenir, mais ce qui pourrait arriver et que le poéte avait mission d’appeler, comme le sorcier appelle la pluie ou le soleil.» Hanté par le paradis perdu, Aubert finit par oublier sa vie durant, de rencontres en blessures, d’oubli a la folie, de résurrection 4 la chute, qu ila fuit cette promesse de paradis. Je dois reconstruire le vent le ciel la terre les visages et aussi la vitesse de ma fuite L’écriture de Robert Lalonde, avec ses expressions truculentes et ces images lyriques, m’a laissée atterrée. J’ai été aisément dépassée par cette jungle d’une douce folie et d’espérance. Peut-étre que certains d’entre vous avez choisilacéte ouest dans votre fuite. Vous saurez alors comprendretrés bien les Petits Aigles a téte blanche. 2 2h oe oe ae ak a Robert Lalonde, Le Petit Aigle a téte blanche, Editions du Seuil, Paris, 1994,269p. * Gracieuseté de la librairie Manhattan Books & Magazines, 1089, Robson, Vancouver, tél.:681- 9074. 3 oe 2 oe 2 a 2k Robert Lalonde sera au ler Salon du Livre de Vancouver, le jeudi 9 mars pour |’ ouverture officielle, de 19h30 421h30. Lesamedi 1 1 mars, ilparlera du diable avec Gérald Messadié. Toujours le 11 mars, vous pourrez le rencontrer plus informellement dés 20h30. Pour plus d’ information: 327- 0201. Godard a l’atfiche PAR RICHARD BEAMISH Marset avrils’annoncent bien pour le cinéma de langue francaise a Vancouver. Aprés une série de films québécois, le Pacific Cinematheque présente plusieurs oeuvres du metteur en scene francais Jean- Luc Godard, du 12 mars au22 avril Bande a part Bande a part, tournéen 1964, dans Bande a part. est histoire d’un cambriolage prometteur, monté par trois étudiants parisiens qui tombent dans la criminalité par avidité et par désir de réussir un coup spectaculaire et facile, comme dans un film d’Hollywood. Anna Karina, Claude Brasseur et Sami Frey, qui paraissent tous dans d’autres films de Godard, jouent des personnages perdus et rencontrent dans un roled'Odile, fille gentille Anna Karina, Claude Brasseur et Sami Frey. sans ambitions, qui se cours d’anglais ridicule et qui passent leur temps a trainer dans des cafés tout en organisant le cambriolage. Anna Karina, longtemps 1’actrice numéro un de Godard, est superbe dans son mais faible, qui se laisse entrainer par Franz et Arthur, deux rudes soupirants, qui obligent la pauvre a participer au cambriolage dans la maison de sa tante. _Bande a part est un excellent film. Excentrique, cinglante, et trés bien faite, cette oeuvre offre aux spectateurs une critique moqueuse de 1’influence du cinéma, et sans doute d’autres médias, sur la vie des gens. Le cambriolage n’est qu’un prétexte qui permet aux personnages masculins de faire les caids, comme au cinéma américain, dans une opération douteuse et mal organisée. La débandade s’ensuit et ceux qui s’en tirent partent envers d’autres fantaisies. kook ik Une femme est une femme Une femme est une femme n’est pas tout 4 fait du méme genre Anna Karina et Jean-Claude Brialy, dans Une femme est une femme. que Bande a part, n’ayant pas comme théme la criminalité ridicule, mais on constate plusieurs ressemblances entre les deux films. Mettant en vedette Anna Karina, Jean-Paul Belmondo et Jean-Claude Brialy, ce film est histoire d’ Angela qui, 4 cause d’un prospectus sur la fécondité, veut a tout prix se faire un enfant, mais Emile, !’amant d’Angela, ne veut pas, ce qui pousse Angela dans les brasd’ Alfred (Jean-Paul Belmondo). Encore une fois, on voit une femme entre deux hommes, mais Angela est plutét acerbe et sa vie avec Emile est une longue série de chicanes, souvent enfantines et amusantes, tandis qu’Alfred fait la cour a Angela. Angela est aussi danseuse de cabaret et sa vie montre bien la piétre condition des femmes, souvent réduites 4 la prostitution ou bien a un métier semblable. tk SUR LES PLANCHES Mon premier choix cette semaine: The Cherry Orchard de Anton Chekhov, au Vancouver Playhouse jusqu’au 18 mars. Une comédie légére qui se passe dans la Russie du siécle demier, alors que l’aristocracie perdait ses droits. On y montre les passions de gens de différentes classes sociales. Les Ranévskaya, une famille sur le bord de la faillite, doivent vendre leur domaine. C’est une mise en scéne vivante de Christopher Newton avec des acteurs comme Norman Brow- ning, Nicola Cavendish, Duncan Fraser et Corrine Koslo, pourn'en nommer que quelques-uns. Informationsetbillets :873-3311. Quelques spectacles Mom’s The World, une comédie écrite par un collectif: Linda Carson, Jill Daum, Alison Kelly, Robin Nichol, Barbara Pollard et Deborah Williams. Les mystéres de l’enfance et les premiéres expériences des jeunes meres. A voir au Arts Club Revue Theatre sur |’ile Granville, jusqu’au 8 avril. Informationset billets :687-1644. Moliere’s Misanthrope est une adaptation amusante et satirique du Misanthrope de Moliére de V’auteur vancouvérois Leonard Angel. Une étude sur l’honnéteté et l’art. A voir jusqu’au ler avril au Gastown Theatre, 36, rue Powell. Informations et billets : 280-2801. Sisters de |’auteur canadien Wendy Lill. L’aventure d’une religieuse en route vers une école amérindienne. Les 10 et 11 mars, le spectacle, mis en scéne par. Rebecca Brown, se tiendra a Vuniversité Simon Fraser. Informationsetbillets :291-3514. eoeoevoaneoeoeoeoeoeeoeoe7eoe7e7ee ee ee ee ee eeeeeeelelel elke e eee 8 ee nel Chabert) Varsity Theatre, a partir du 10 mars. Avec Gérard Depardieu et Fanny Ardant. Dix ans aprés labatailledEylauen 1807, le {5 Colonel Chabert (Depar- dieu) revient a Paris et dé- couvre qu'il est sur la liste des disparus. Durant ce temps, safemme (Ardant) a déja réclamé sa fortune et s'estremariée 4 l'homme po- litique Count Ferraud (André Dussolier). La comtesse refusant de re- connaitre le colonel comme étant son mari, un procés est enclenché pour que Chabert retrouve son nom, sa femme et sa fortune. Un film a voir. Ak tok Just Cause, Famous Player Theatre. Une jeune fille est tuée dans la «Florida Everglades» et la police force la confession d'un homme qui aurait peut- étre été l'auteur du crime. Huit ans plus tard, le pro- fesseur Paul Armstrong (Sean Connery) doit trou- ver la vérité derri¢re ce crime etlibérer un innocent. tt