Alphabetisation par Reine Degarie «Lalphabétisation a transformé ma vie», dit Omer Caissie. Quelque quatre années plus tot, par amour pour ses enfants, il est retourné apprendre a lire et a compter. Cela n’a pas été facile. Il a dd surmonter ses peurs et un grand manque de confiance en lui-méme. Grace aux cours en alphabétisation, et a son courage personnel bien sur, il est maintenant beaucoup plus heureux a la maison comme au travail et il est devenu trés engagé socialement. Omer Caissie est né a Stlsidore, petit village de la Péninsule acadienne au Nouveau- Brunswick. Il est le sixieme d’une famille de 12 enfants. A I'age de sept ans, sa vie a commenceé a basculer quand son pére est mort. Pourtant, ses résultats scolaires ont été bons pendant les trois premieres années. Puis, pour tenter d’échapper a la grande pauvreté, la famille est déménagée plusieurs fois et la situation s‘est empirée. Avec les problémes qui s‘accumulaient a la maison, sans un support nécessaire pour le motiver a étudier, le jeune Omer n’avait plus la capacité de se concentrer suffisamment a 'école, puis il a appris a se défendre a coups de poings. ll a quand méme poursuivi ses études jusqu’en huitiéme année. A 15 ans, n’en pouvant plus de la misére, il est devenu bucheron. L’année suivante, il est allé travailler avec son frére ainé a St. Catherines, dans le sud de l'Ontario, pour devenir tout comme lui, couvreur de toitures. Un métier qu'il exerce encore, mais avec la responsabilité de contremaitre. Les années ont passé. M. Caissie s‘est marié et a eu deux filles. Un jour, quand son ainée lui a demandé de lire une histoire, le pére a réalisé qu'il n’était pas capable. Il se débrouillait bien un peu, mais pas assez pour lire un texte et, au travail, il trouvait toujours quelqu’un pour le faire a sa place. Je me suis dit que javais un probléme. Je voulais pouvoir offrir a mes enfants ce qui mvavait tant manqué: le support familial pour réussir a I’école. Je ne voulais pas leur transmettre mes peurs». C’est ainsi que M. Caissie a décidé de s'inscrire a ABC communautaire de sa région. Une de ses grandes frayeurs a été de faire face aux gens surpris de découvrir qu'il ne savait pas lire. Il a dd prendre son courage a deux mains pour. entreprendre les démarches, lui qui nosait pas discuter avec des professionnels, ni son médecin, ni méme son avocat que pourtant il payait. A cause de son travail, M. Caissie ne peut suivre des cours que deux soirs par semaine et pas réguliérement car des contrats l’obligent parfois a se déplacer a l’extérieur. Une de ses ambitions est de se rendre jusqu’au niveau équivalent a une douziéme année. Apprendre a s‘aimer, a aimer Grace a son apprentissage en alphabétisation, M. Caissie dit avoir appris beaucoup plus que lire, écrire et compter. «Ca m’a montré a aimer, a m’aimer et a reconnaitre mes qualités. L'alphabétisation a sauvé son mariage, raconte-t-il. Je ne m‘aimais pas, je ne pouvais donc pas donner de l'amour. Je n’avais pas confiance en moi. La, tout va vraiment bien. Ma femme voit mon é€volution et elle m’appuie beaucoup.» Au travail aussi, sa vie a changé. II peut discuter d’égal a égal avec des architectes et des ingénieurs lors des réunions, lui qui avait tellement peur des professionnels. II sait mieux communiquer avec les ouvriers de son équipe et donne a chacun la chance de s’exprimer. De plus, il fait de la sensibilisation auprés de ses patrons. «lls voient bien ma transformation. Je leur dit que si j'ai pu le faire, d'autres aussi en ont besoin. Je leur vends l'idée que Cest rentable d’avoir des employés plus éduqués.» Reconnaissant, M. Caissie veut donner aux autres ce qu'il a recu. Lui qui n’avait jamais osé simpliquer dans la communauté, il accumule les engagements sociaux. II fait des présentations dans des écoles et devant des clubs sociaux pour parler dalphabéetisation. Il est devenu membre de I'Association des parents et enseignants de Societe et developpement La transformation d'un homme nommeé “Caissie” St.Catherines. Il a été président du conseil d’administration de l'ABC communautaire de Welland et est un des fondateurs du regroupement provincial d’alphabétisation. Il est maintenant le vice-président de la Fédération canadienne pour |'alphabétisation en francais. Ses premiéres responsabilités sociales ont été pour défendre la place des apprenants au sein des organismes d’alphabétisation. || continue de soutenir cette cause. «ll ne faut pas oublier que nous ne sommes pas des enfants d’école ni des déficients et que nous avons un role a jouer. Il faudrait inviter davantage les apprenants a participer aux décisions qui les concernent.» Omer Caissie est convaincu que «l'alphabétisation est une porte qui s‘ouvre sur un monde incroyable». Omer Caissie, apprenant et. vice-président de Ia Fédération canadienne pour l'alphabétisation en francais (FCAF). Photo: Gracieuseté de |'Office national du film Lalphabétisation en francais: un immense besoin Plusieurs groupes d’alphabétisation des adultes francophones naissent un peu partout a travers le Canada. Afin de leur offrir une possibilité de concertation et d’échanges, la Fédération canadienne pour l'alphabetisation en francais eee a ete creee en mars ae Selon les derniers chiffres nationaux: disponibles, provenant dune étude effectuée par Statistique Canada en 1991, 38% de la population active canadienne éprouvent de la difficulté a lire, a. écrire et a compter. A l'exception du Québec, |’ organisme fédéral nia _ pas cru bon de tester séparément les populations francophones du pays. Cependant, i ressort que 42% des personnes qui ont subi le test en francais ont éprouvé de la. oo difficulté. Afin de combler cette lacune, la FCAF développe actuellement ¢ des outils ee ] obtenir des statistiques précises sur les capacités en a en ete et en arithmétique des francophones. La jeune Fédération fait aussi la aonctes de ralprsbedsstions en francais au ene et elle appuie le travail de ses membres. Elle est en quelque sorte une voie de transmission entre les gouvernements et les organismes qui oeuvrent en alphabétisation | francophone. La directrice générale de la FCAF, Luce Lapierre souligne que la tendance actuelle en alphabétisation vise plus que I'acquisition de connaissances scolaires. La __ croissance personnelle par l'amélioration de I'estime de soi est devenue une dimension absolument nécessaire. Une nouvelle philosophie qui fait des merveilles et dont le témoignage d'Omer Cassie, ci-contre, en est un bel exemple. L’édition anglaise Spelling it out & in french (ICEA) ALPHABETISATION «L’analphabétisme, d’abord et avant tout un phénoméne social (...) Un effort collectif 4 faire en alphabétisation.» des outils d’information et d’analyse sur les ressources en alphabétisation avec la collaboration de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada Une étude En toutes lettres & en francais, par Andrée Boucher (ICEA) 12$ Les actes du séminaire En toutes lettres & en francais, par Josée Gauthier (ICEA) 5$ INSTITUT CANADIEN D’EDUCATION DES ADULTES (ICEA), 5225, RUE BERRI, BUREAU 300, MONTREAL, QUEBEC H2J 2S4 TéL.:(514) 948-2044 TELEC.:(514) 948-2046 INSTITUT CANADIEN D’EDUCATION DES 12$ & (+ frais. d’expédition) ADULTES 4 ~~ FRANCOPHONIE