ad cats américains, les politiciens du Midwest et les grandes sociétés améri- caines de l’automobile de comploter contre l'investissement et l'emploi au Canada). La suite logique d’une accep- tation des vertus du marché est le libre-€change avec les Etats-Unis. Le commerce occidental repose sur trois grands ““marchés communs” dont chacun compte plus de cent millions d’habitants — la CEE, les Etats-Unis et le Japon. Si un pays n’a pas un accés assuré a l’un de ces grands marchés, son économie ne peut pas s’épanouir. Sila déception engendrée par la po- litique nationaliste (une bonne partie de la population, y compris le mouve- ment syndical, ne veut pas mettre de l’eau dans son nationalisme) explique en partie l’enthousiasme retrouvé pour la “réciprocité”, cette explica- tion ne suffit pas. Sur chaque dollar que gagnent les Canadiens, plus de 20% proviennent d’exportations des- tinées au marché américain. Etant donné limportance unique de ce commerce, nous €prouvons le désir tout a fait naturel d’obtenir de meil- leures garanties d’accés au marché américain. Inéluctablement, l’énorme déficit dans la balance des paiements aux E,-U. crée une demande publique a Washington pour une politique pro- tectionniste. Le tarif de 20% imposé par les Américains sur nos exporta- tions de produits de cédre symbolise notre vulnérabilité aux NTB (non- tariff barriers) explicitement permis par les régles du GATT. La commis- sion Macdonald a bien insisté sur lévolution inquiétante du GATT, évo- lution qui considére ces NTB comme barriéres permanentes et cherche sim- plement a les normaliser. Dans ce texte, j'ai insisté sur l’ambivalence innée des Canadiens 4 l’égard des E.- U. Le Toronto Globe & Mail I’a bien illustrée, A plusieurs reprises depuis avril 1984, le jounal a demandé 4 un échantillon de Canadiens s’ils étaient en faveur du libre-échange entre le Canada et les Etats-Unis. Au début, 78% étaient d’accord, 17% contre, 5% indécis. Depuis, il y a eu une évo- lution constante vers les derniers ré- sultats obtenus en avril 1986 attestent que 52% sont d’accord, 36% contre, 12% demeurent indécis. Lorsque le Globe a posé des questions plus pré- cises, on a vu que la majorité croit que le libre-€change augmenterait la pro- ductivité de notre économie, mais craint que la “réciprocité’’ mette en danger notre souverainté politique et ce que nous avons d’une culture indé- pendante. Comme au temps de Laurier, les réponses varient selon les régions. Malgré un certain affaiblisse- ment, plus de 60% des Canadiens de Ouest sont favorables au libre- échange. Les Québécois et les habi- tants des provinces atlantiques sont aussi en majorité d’accord; les Onta- riens, en 1986 comme en 1911, sont les plus hostiles. Actuellement, les Ontariens sont divisés également: 45% pour, 45% contre. En 1986 comme en 1911, une coalition bizarre se forme a partir de l'Ontario. Les na- tionalistes culturels veulent faire de Toronto le centre culturel du pays, et limiter importation de produits culturels américains au Canada. IIs craignent que le libre-échange ne compromette l’ensemble des subven- tions et interventions gouvernemen- tales qui ont contribué 4 la croissance des industries culturelles cana- diennes. Les grands syndicats du sec- teur industriel font aussi partie inté- grale de cette coalition. Ils ont peur que le libre-€change ne mette en péril les emplois protégés actuellement par les barriéres tarifaires. Un autre groupe qui se méfie du libre-échange est celui des banques canadiennes, qui jouissent depuis toujours de légis- lation qui limitent sévérement toute concurrence étrangére dans leur sec- teur. IL PARAIT Qu'its YorT SUPPRIMER le FILET... 11 Conclusion Je reviens a la question: 4 quel point devrions-nous intégrer notre écono- mie avec celle des Etats-Unis? Je con- clus que les avantages €conomiques sont suffisament importants pour qu'il vaille la peine d’explorer l’op- tion du libre-échange. Je conclus aussi que lidentité canadienne est mainte- nant suffisament mtre pour survivre a la légére perte de souverainté politi- que qu’imposerait nimporte quel traité de libre-échange. Finalement, la coalition contre le libre-échange pro- duit chez moi l’effet contraire de ce qu’elle recherche. Je trouve chez les chefs de cette coalition beaucoup de zénophobie et un conservatisme (méme si certains se croient ‘a gauche’’) dont l’effet serait d’immobi- liser nos institutions Economiques. II est ironique de noter que I’élite mon- tréalaise, accusée pendant si longtemps par les amisede Trudeau d’entretenir une attitude renfermée et “tribale”, est maintenant plus préte que |’élite torontoise 4 relever le défi ameéricain. Je reste quand méme cana- dien: j’€prouve une certaine ambiva- lence. Je pense que nous, Canadiens, avons créé un Etat-providence (Medi- Care, etc.) bien supérieur a ce qu’ont les Américains, et que ces réformes jouent un réle essentiel dans la réduc- tion des inégalités créées par une économie capitaliste.