18 nnn Les arts: une bonne affaire! “Les hommes d'affaires se compor- tent souvent comme des moutons ... dés que quelque chose est reconnu correct et acceptable, ils ont tendance a suivre la convention.” C’est de cette maniére que s’expri- mait récemment M. David Rockeffel- ler, banquier américain bien connu, lors de son passage 4 Vancouver pour la premiére Conférence mondiale sur les arts, les affaires et la politique. D’une maniére trés colorée, M. Rockeffeller voulait par la, souligner que le milieu des affaires avait de plus en plus tendance a soutenir finan- ciérement les efforts des créateurs et des producteurs parce qu’a la prati- que, la formule s’était avérée des plus valables et des plus rentables pour les gens d’affaires eux-mémes. Les sommes rendues disponibles par le gouvernement fédéral pour financer la rapide expansion des arts et de la culture au Canada ont vite atteint leurs limites; la crise économi- que déja perceptible au milieu des an- nées 70 est venue confirmer le besoin pour les arts et la culture de diversi- fier, autant que possible, ses sources de financement. Rapidement, les ressources publi- ques jusque 1a destinées aux arts et ala culture (immobilisation, fonctionne- ment, administration...) étaient ré- affectées vers de nouvelles priorités gouvernementales. De nouveaux mots tels autofinacement, rentabilité, gestion par objectifs firent alors leur apparition dans le langage quotidien des organismes artistiques et culturels. Pourtant, méme et sur- touten période de restriction budgé- taire, tous s’entendent pour reconnai- tre importance de garder fortes nos sources de création et de production artistique et culturelle. Tous s’enten- dent aussi pour affirmer qu’aucun or- ganisme ne saurait survivre que de ses revenus générés au guichet! Il importe donc de réexaminer le role des divers partenaires impliqués dans le financement des arts et de la culture, et de définir un nouveau mo- dus vivendi permettant de maintenir et d’augmenter les ressources consa- crées aux arts et a la culture au Can- ada. Le Conseil des Arts du Canada dont le principal objectif est de financer les arts professionnels, est passé d’un budget global de $12 millions en 1971-72 a plus de $67 millions en 1984-85. Cependant, 4 l’analyse des dépenses des gouvernements provin- ciaux, il ressort que pour la méme période, l'ensemble de leurs dé- penses culturelles représentaient 4 peine 0,5% de leurs dépenses totale (le Québec venant en téte avec 22,91 $ par habitant), alors que l’aide culturelle des municipalités de l’en- semble du Canada représentait a peine 1,2% de leurs dépenses totales (Ontario étant en téte avec 29,96 $ par habitant). Bien qu’au départ, les arts et les affaires semblent avoir bien peu en commun, le financement des arts et de la culture en provenance du sec- teur privé passait pour la méme pé- riode, de 5% des dépenses des or- ganismes culturels en 1972 412% en 1985. Lanalyse des données qui précé- dent montrent clairement que le sec- teur privé a su assumer un leadership certain dans le soutien aux arts et 4 la culture au Canada et que l’interven- tion du gouvernement fédéral ne pouvait plus longtemps constituer une mesure substitutive de la respon- sabilité collective, et plus particuliére- ment du niveau municipal. En ce sens, Vancouver constitue sans doute un point de comparaison intéressant si on veut juger de l’effort relatif des différents partenaires dans le financement des arts et de la culture au Canada. En effet, en mars 1983, la ville de Vancouver publiait une étude économique intitulée “Arts mean Business”. Cette étude démontrait clairement le rdle majeur joué par les quelque 85 groupes artistiques et culturels dans Jl’articulation d’une stratégie de développement économi- que pour la ville de Vancouver. ‘A strong arts community can spell the difference between life and death for a city” concluait Stuart Backer- man, conseiller culturel au départe- ment deplanification sociale de la ville de Vancouver et co-auteur de |’é- tude. Tout simplement parce que le fi- nancement public ne pouvait que se faire plus rare pour les arts et la culture et, pour faciliter la transition vers le secteur privé, le maire de Vancouver, Mike Hartcourt annongait la création en juin 1984 du “Vancouver Partner- ship for Business and the Arts”. Deux ans plus tard, on peut dire sans l’om- bre d’un doute que la ville de Van- couver a été a l’avant-garde en inté- grant le monde des arts et de la culture comme composante majeure de sa re- lance €conomique. 11 incombait a la municipalité de faire prendre conscience aux gens d’affaires qu’il leur revenait d’assumer le leadership et la créativité néces- saires a la concrétisation de ce “ma- riage de raison” entre les arts et les affaires, mariage qui ne pouvait que réussir aux deux partenaires. Déja, les gens d’affaires se sentent plus concernés par la qualité de leur environnement et n’ont plus 4 étre convaincus du bien-fondé des arts et de la culture. C’est ainsi qu’on a vu Chevron Canada commanditer le “Cherniavsky Junior Club”, la Com- mission du Centenaire de Vancouver et le B.C. Young Artists Exhibition; on a aussi vu Opus Framing Ltd. subven- tionner le New Music Society et les conseiller en terme de Marketing/ levée de fonds, Cornwall Publishing Company réalisér gratuitement le cat- alogue d’une exposition du Emilie Carr College of Arts et The Bentall Group voir a la télédiffusion d’un concert de Noél ou participait le Van- couver Chamber Choir. Sur le plan individuel, vous pouvez vous aussi vous impliquer que ce soit en terme de conseiller financier au sein d’un conseil d’administration, ré- daction de contrats, conception graphique, imprimerie, études de marché, levée de fonds, relations de travail, ... et j’en passe. Iln’en tient qu’a vous de confirmer que les gens d'affaires ne sont pas des moutons, puisqu’tls Lont déja dé- montré a plusieurs reprises. Plusieurs ont déja eu la sagesse d’investir dans les arts et la culture et peu ont eu 4 le regretter. En tant qu’intervenant ré- gional, vous étes plus que tout autre, en mesure de savoir ol et comment soutenir les activités artistiques et culturelles de votre région ... @ vous de prouver que les arts sont une bonne affaire! Réjean Bernard Président, Chilam & Associés i eT Tn