EDITORIAL Reve, utopie? (2) | Aprés s’étre demandé quand les Franco-Colombiens se doteront d’un centre culturel et récréatif qui puisse avantageusement se comparer a ceux d'autres communautés, il convient maintenant d’examiner le revers de la médaille. Quels sont les obstacles 4 surmonter? ’ LE'MINEQUOTIDIEN DE LANGUE FRANCAISE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE Directeur: André Piolat Rédacteur: Jean-Claude Arluison Secrétaire: Lyne Paradis’ - ’ Mise-en-page: Richard Lussier HERE PUBLIE PAR LE SOLEIL DE COLOMBIE LTEE, 3213, rue Cambie, Vancouver, C.B., V5Z 2W3 Téléphone: -879-6924 Courrier de deuxiéme classe _ sous le numéro d’enregistrement 0046 ss iF LES HEBDOS Association de la Presse REGIONAUX francophone Hors-Québec . : : { . sos - ‘ ic BABS GR A oe St RGA ERG OE ALCAN Le marché potentiel d’un complexe francais est trés important, c’est indéniable. Mais ce qui est tout aussi indéniable, c’est que ce mot “potentiel” constitue un gigantesque point d’interrogation. La création d’un tel centre attirerait-elle, en masse, les francophones? Ferait-elle sortir de l’ombre des milliers d’entre eux qui ne participent que trés rarement, sinon jamais, aux activités de notre communauté, qu’elles soient culturelles, sociales ou ; ie récréatives? L’existence d’un marché potentiel ne garantit absolument pas le succés. Qui serait prét 4 investir, en toute confiance, dans I’entreprise? a. sibs achat idesdtc es aeat Réunir les fonds nécessaires a la construction est un gros probléme, mais l’auto-financement du complexe est ensuite un sujet constant de préoccupations. Si, un beau jour, divers organismes francophones décidaient de se pencher sérieusement sur la question, ils devraient d’une part étudier comment les autres communautés ont réussi 4 financer la construction de leurs centres et se débrouillent pour les auto-financer. Ils devraient d’autre part faire un sondage d’opinion parmi la population franco-colombienne. anne Sue | Pensez aux petits Les optimistes n’ont pas toujours tort | LPM eS GRRL Sg, ible Ms Ce sondage permettrait de mieux connaitre les désirs et les motivations des francophones, de mieux comprendre leur comportement parfois complexe. Prenons, une fois de plus, l’exemple du centre culturel italien de Dans un monde oi le cy- nisme devient le seul moyen de garder son équilibre men- tal, il est réconfortant de constater que l’optimisme aveugle recoive parfois une consécration éclatante. Main- tenant qu’Ottawa a supprimé nombre de stimulants visant a encourager les Canadiens 4 investir, un des rares motifs d’optimisme qui leur reste est le succés des autres. Mais nous nous écartons du sujet. Un optimiste, c’est quel- qu’un qui n’a pas encore lu le journal du matin. C’est gé- néralement aussi quelqu’un qui manque d’expérience. Un examen plus détaillé révéle cependant qu'un opti- miste,c’est quelqu’un quis’en tire honorablement quand les -choses sont au plus mal — et aucune entreprise nouvelle- ment établie ne saurait survi- | vre si son dirigeant ne possé- dait pas une solide dose d’op- timisme pendant les premié- res années de vaches maigres (ou enragées). En fait, plus . dun optimiste s’est enrichi simplement en rachetant I’af- faire d’un pegsimiste (person- ne qui, de deux maux, choisit non pas le moindre, mais prend les deux 4 la fois). L’optimisme était 4 peu prés tout ce qu’avait John Bulloch quand, aprés avoir quitté le collége de Toronto ou il enseignait le commerce, il créa la FCEI voici sept ans. Les Canadiens le connais- saient — il avait été le prési- dent-fondateur du Conseil canadien pour une fiscalité équitable, groupe créé pour combattre les projets de “‘ré- forme” fiscale contenus dans un Livre blanc célébre du gouvernement fédéral — mais il n’avait aucune source de fi- nancement valable (ni de per- spectives d’en trouver une). C’est alors qu'il réussit un véritable tour de force. Bul- loch etsa poignée de collabo- le gouvernement pour qu'il change sa politique fiscale. Il imputa la faiblesse économi- que du Canada au fait que les gouvernements sont obsédés par le gigantisme et refusent de donner leur chance aux petites entreprises, qui sont pourtant l’épine dorsale de toute économie forte. La FCEI stigmatisa les politi- ques qui imposent trop de régles et de formules aux pe- tites entreprises. Et, avec cha- que critique, Bulloch propo- sait une solution plus ration- nelle. Comme il le dit, ‘‘ilest facile de critiquer. Mais pour ~ gagner la confiance des gens, il faut savoir proposer une so- lution remplagant avantageu- sement celle que l’on désap- prouve.” La Fédération a obtenu des résultats. Les taux fiseaux applicables aux petites entre- prises ont baissé. Les régle- ments tracassiers obligeant les propriétaires — dirigeants a passer trop de temps a rem- plir des formules ont été abo- lis. Des préts garantis par le gouvernement ont été accor- dés a des petites firmes. En- fin, un ministre fédéral res- ponsable de la petite entre- prise (actuellement Tony Abbott) a été chargé de s’oc- cuper du groupe que repré- sente Bulloch. Et entretemps, une chose amusante s’est produite. Vop- timisme dément de Bulloch est brusquement devenu une réalité. La FCEI a dépassé le cap des 50,000 entreprises membres pour devenir, par ses effectifs, la plus grande organisation du monde au service de la petite entreprise. » Assez disserté sur l’opti- misme. Tout cela, en fait, ne vise qu’a démontrer que ce que nous, les pessimistes, con- sidérons comme de l’optimis- me n'est tout bonnement que du réalisme. »”Pensez aux petits” est un message adressé Sous forme d'éditorial parla mPRTS TEN Se MTSE YT HALCEIEE fe Reeerationcamacieoneae’ F-. entreprise indépendante®© . Vancouver. Des entreprises italiennes ont puissamment contribué a cette belle réalisation; des ouvriers italiens, macons, électriciens..., ont travaillé bénévolement. Notre communauté est-elle en mesure de suivre cet exemple? Sur le plan économique, il est certain que nous ne sommes pas aussi puissants que plusieurs groupes “ethniques”. Dés son ouverture, l’énorme auditorium du centre italien avait recu des réservations s’étendant sur plusieurs mois, pour des spectacles, des diners et des mariages. Un auditorium francophone connaitrait-il le méme succés? Enfin, des entreprises, associations, familles italiennes ont fait des dons qui se sont élevés a une jolie somme. Les montreraient-ils aussi généreux? Aurons-nous, un jour, une maison de retraite francophone, 4 Vancouver? ~ Jean-Claude ARLUISON Franco-Colombiens se sts eee es —~— Une voix qui prétend étre celle de la sagesse conseille de cesser de se tracasser; les francophones n’éprouvent pas le besoin d’un tel centre, la location du théatre Métro ou d'autres salles devrait satisfaire tout le monde, en attendant que les Franco-Colombiens soient devenus plus forts économiquement, et que, d’autre part, leur esp: rit de communauté se soit davantage épanoui. Le nationalisme: au Québec francais. et au Canada anglais Dans une grande confé- rence qu'il a prononcée a - l'Université Laval de Qué- bec, le professeur Abraham Rotstein, économiste de To- ronto, a-décrit le nationa- lisme canadien-anglais et a montré en quoi il différait du nationalisme québécois. Ce dernier nationalisme repose sur des objectifs d’au- todétermination culturelle, politique et économique. Les Québécois veulent étre mai- tres chez eux dans tous les domaines.* Vintégrité du territoire Pour les Canadiens an- glais, le nationalisme consis- te a sauvegarder a tout prix lintégrité du territoire. M. Rotstein désigne cette éthi- que territoriale sous le nom de «mappisme». Le conférencier a cité- quelques chiffres qui illus- trent la subordination et ae actity tet ee du Canada anglais. Les trois-cinquiémes des ‘grandes sociétés canadien- nes sont entre des mains étrangéres (américaines pour la plupart). C’est la méme chose pour plus de la moitié des syndicats de tra- vailleurs. Soixante-quinze pour cent du pétrole et du gaz naturel du Canada est gouverné par des capitaux étrangers et ilen est ainsi ° pour la plupart des riches- ses naturelles. Dans le domaine culturel, le tableau est encore plus noir Quatre-vingt-seize pour cent desfilms sont étran- gers, tout comme les trois- quarts des programmes de télévision en langue anglaise que les enfants regardent. «Culturellement’ parlant, nous sommes des étrangers dans notre pays», affirme M. Rotstein. mentalité de défricheur Les Canadiens anglais ont ass conserve: leur’ nientalité de défricheur. Ils voient le pays comme l’extension de la terre individuelle. Le Cana- da, pour eux, c’est comme une terre paternelle s’éten- dant de l’Atlantique au Paci- fique. Ce genre de nationalisme est 4 l’origine du refus du droit de passage a l’oléoduc de la vallée du Mackenzie. Il cimente également le mou- vement d’opposition contre Yexportation massive et in- contrélée des richesses na- turelles. Un nationalisme canadien qui continuerait de reposer principalement sur l’intégri- té du territoire présenterait de sérieux inconvénients - dans la crise constitutionnel- le actuelle, tant pour le Canada anglais que pour le Québec. Les Canadiens an- glophones des autres provin- es ne peuvent pas compren- dre ce qui se passe au: Québec et encore moins y étre'sensibles!! @! 59% 45 En effet, si le nationalis- % me territorial est incapable de cerner et de combattre V’érosion culturellle et la dépendance économique de sa propre société, comment peut-il comprendre les pré- occupations des Québécois? le dialogue est nécessaire Quelles que-soient les formules constitutionnelles choisies, les bases d’un ac- cord et d’une réconciliation pacifiques tiendront, en fin de compte, 4 la capacité du Canada anglais 4 envisager. sa survivance aux termes des nouveaux accords. Selon M. Rotstein, le na- tionalisme québécois devra trouver au Canada anglais une contrepartie avec la- quelle il puisse communi- quer dans un langage com- mun, un partenaire capable de comprendre et de formu- ler les mémes objectifs d’au- todétermination culturelle, politique et économique. vated VE Se OS | (Suite p.3)