Dans les années qui suivirent V’établissement de _ la Confédération, la Police Montée recut comme tache de pacifier l’Ouest canadien et d’y maintenir l’ordre. Elle le fit avec brio. Par William Beahen A Vépoque de. la Confédération, les Prairies ont une population clairsemée d’Indiens, de Métis et de quelques trafiquants blancs. C’est une région en pleine turbulence. Le probléme immeédiat estl’effondrementde la culture etdu mode de subsistance des Indiens des Plaines aprés seulement quelques dizaines d’années au contact des Blancs. Dans leur ardeur de se procurer despeaux pour les échanger contre des fusils et des biens de consommation, les Indiens massacrent les troupeaux de bisons dont ils dépendent pour leur nourriture. Les trafiquants américains précipitent leur déclin en leur fournissant de l’eau-de-vie, ce qui les détruit a petit feu. Le gouvernement du Canada, qui a acheté ce vaste territoire de la Hudson’s Bay Company en 1870, accorde la priorité au maintien de l’ordre dans cette région et veut s’assurer que les Indiens vont accepter l’arrivée des fermiers et des éleveurs blancs sur leurs terres. Pour faciliter cette période de transition dans l’Ouest canadien, le premier ministre John A. Macdonald met sur pied la Police Montée du Nord-Ouest. La longue marche vers Ouest Le 23 mai 1873, le Parlement adopte une loi qui autorise la création d’un corps de police semi-militaire dontles structures sont plus ou moins copiées sur le modéle de la Gendarmerieroyale irlandaise. Dans le cadre d’une discipline sévére, la Police Montée va prendre garnison dans les Prairies pour permettre 1’établissement pacifique des Blancs. Les officiers ont le droit d’agir comme juges et les hommes de procéder a des arrestations. Le recrutement commence a l’automne. On choisit surtout des hommes en provenance de l’armée anglaise et de la milice canadienne. En juin 1874, un premier groupe de 275 recrues se rassemble a Fort Dufferin, au Manitoba, pour se rendre dans 1’Ouest afin d’assumer ses responsabilisés. Le 8 juillet, le commissaire George Arthur French entreprend avec sa troupe une longue marche de 128 km qui va devenir une véritable épopée. L’avance est €épuisante tant pour les chevaux que pour les hommes 4 cause de la chaleur et de la maladie. Les vivres et l’eau sont rares. L’aide de guides Métis leur est indispensable pour trouver le bon chemin et se procurer de quoi manger. Le 1* aoiit, 4 Roche-Percée, le commissaire French divise sa troupe et dépéche l’une de ses cing compagnies vers le nord a Fort Edmonton, poste de la Compagnie de la baie d’ Hudson, pour y chercher du ravitaillement. Lereste de lacolonne continue vers l’ouest en direction de Fort Whoop-Up, repaire des trafiquants d’alcool, prés de la ville actuelle de Lethbridge, en Alberta. Lorsqu’elle y parvient le 9 octobre, la Police Montée constate que, avertis a temps, les trafiquants ont pris la fuite. Le commissaire adjoint James F. Macleod entreprend alors de construire rapidement un fort a qui on donna son nom, dans le but d’y loger ses hommes et aussi comme symbole de l’arrivée d’une force policiére dans 1’Ouest. La fuite des trafiquants d’alcool écarte pour l’instant la menace que l’eau-de-vie apportait au mode de vie des Indiens. La Police Montée met en vigueur un plan de prohibition totale dans les territoires du Nord-Ouest. Mais en méme temps, la diminution rapide du bison prive les Indiens des Plaines de leur principale source de nourriture, d’habillement et de logement. Obliges de demander aide du gouvernement, ils doivent alors signer des traites par lesquels ils abandonnent leurs droits sur de grandes portions du territoire en échange de réserves ou s’installer, de compensations annuelles en argent, d’écoles, de matériel agricole et de bétail. Le gouvernement promet de leur envoyer des mstructeurs qui leur enseigneront l’agriculture et de leur faire parvenir des vivres jusqu’a ce qu’ils deviennent autosuffisants. 4 Le Courrier aotit, 1992 VOL.5NO1 . Sitting Bull au Canada Les terribles guerres indiennes qui sévissent entre-temps aux Btats- Unis témoignent des conséquences qu’ily ade traiteravec les Indiensen employant la maniére forte. En fait, la Police Montée doit faire face a l’une deces conséquences lorsque le chef Sitting bull (en frangais “Taureau Assis”) et des milliers de ses partisans sioux arrivent au Canada pour s’y réfugier contre la colére de l’armée des Etats-Unis. Aprés des années de malentendus et de querelles avec les colons et l’armée 4 propos de leurs droits territoriaux, Sitting bull et les Sioux américains avaient décidé de résister A toute tentative de les fixer sur des réserves. A la bataille de - Little Big Horn, en juin 1876, sur le territoire du Montana, les Indiens anéantirent les cing escadrons du colonel George Custer. Mais leur victoire allait étre de courte durée. Les Sioux avaient dé retraiter vers le nord jusqu’au Canada pour échapper aux forces supérieures en nombre qui les poursuivaient. Lorsqu’ils traversent la frontiére au cours de l’hiver 1876- 1877, les Sioux y sont accueillis par une troupe de la Police Montée sous le commandement du surintendant James Morrow Walsh. La situation est tendue a l’extréme. Les Sioux portent encore les scalps, les uniformes, les armes et les piéces ‘d’équipementqu’ils ont enlevés aux soldats tombés a Little Big Horn. Is en ont assez de se battre, mais ils se méfient toujours des Blancs, méme si ceux-ci portent maintenant des tuniques rouges et non plus des bleues. Il y a aussi les Indiens du Canada qui voient d’un mauvais oeil les Sioux envahir leurs territoires traditionnels et venir leur faire concurrence pour chasser le bison devenu rare. Par bonheur, le surintendant est un policier doublé d’un bon diplomate. Il déploiera envers Sitting bull un heureux mélange derespectetd’autorité pour gagner sa confiance. En fin de compte, Sitting Bulletles principaux chefs sioux acceptent dese conformer aux lois canadiennes et de ne pas tenter de raids au sud de la frontiére. En octobre 1877, se tient une rencontre a Fort Walsh, poste de garnison de la Police Montée, entre Sitting Bull et les. autorités américaines. Le général américain A. H. Terry, l'un de leurs vieux adversaires, offre aux Sioux V’amnistie totale s’ils rendent leurs armes et retournent dans leurs réserves. Les Sioux rejettent!’ offre. Cependant, inquiets du peu d’avenir que leur réserve le Canada, ils repassent la fronti¢re par petits groupes. Le dernier as’en aller est Sitting bull lui-méme en 1881, aprés que le surintendant Walsh ait été muté ailleurs pour avoir montré trop de sympathie envers les Sioux qui auraient préféré rester au Canada. A suivre...La rébellion, ———— lechemin defer ors et les colons Le Soleil de Colombie © ‘at 1992 ‘ Vendredi 7 ao