, Janvier 1968 L’APPEL age 9 p SS SSPE airs impériaux devant la foule trinquante, il me défia: “I’m now going to play ‘Auld Lang Syne’ and you sing it in French”. A son éber- luement j’entonne: “On est des étudiants, maudit, on n’est pas pour s’embéter, Premier maudit, qui kick, toryeux, on va Vélectrocuter”, cette fameuse chanson insolente d’étudiants que j’avais apprise dans ma jeunesse. Per- sonne ne comprenait un mot de frangais, heu- reusement pour moi! Mais e¢’était mon tour maintenant et, 4 l’amusement de Ventourage, je lui langai “mon” défi: “Old chap, you will now play ‘Alouette’ and sing it in English”. Sans dire un mot, la mine furieuse, il se leva, et pris la poudre d’escampette. Dommage, nous étions en si bons termes pourtant. . . auparavant. “The big problem in Canada is that French- Canadians insist on speaking French.” Ainsi S’exprimait un avocat écossais éminent de New Westminster 4 la réception provinciale aN du barreau, 4 l’hétel Royal Towers. Les Eeossais et les Irlandais sont bien sou- vent des amis sympathiques A la cause frangcai- se, mais ils semblent beaucoup plus rébarba- tifs, 4 ce sujet que l’élément anglais qui n’a aucune raison d’avoir des complexes, vu qu’il a été victorieux si souvent, sur les autres élé- ments. C’est probablement pourquoi je ne me souviens pas d’une seule fois ot j’ai eu une pri- se de bee avec un Anglais d’outre-mer. Le Com- mandant Bowditch m’a dit une fois: “To us, Gaston, French is the great culture across the channel.” Et le Commodore Plomer, cet hom- me formidable qui aurait di étre Chef de l’é- tat major de la marine si j’avais eu mon choix: “T try very hard to be a good Canadian, but I’m afraid I’m too old to make the grade. My sons and their sons, I hope, will be true Cana- dians.”” Francais et Anglais d’outre-mer se respec- tent mutuellement, Vhistoire les a assagis, ils sont indépendants l’un de l’autre. Ici au contraire, le francais pour les anglophones est une pierre d’échoppement, un probléme; ils ne comprennent pas encore cette culture qui gra- duellement s’infiltre dans leurs traditions. L’histoire les a aigris, les deux ne sont pas indépendants 1’un de l’autre. En majorité nous voyons les Irlandais ca- tholiques se ranger avec l’opinion WASP au lieu du e6té frangais catholique. Il faut done en déduire que la force de la langue commune (méme si celle-ci est empruntée) 1’emporte sur les associations religieuses. Quelques uns de ces Mac et ces O’ semblent parfois les plus irrités du fait francais au Canada. Leurs millions ont perdu le contréle territorial d’outre-mer et ont été forcés 4 adop- ter une langue étrangére 4 celle de leurs aieux. Par contre, quelque 60,000 paysans frangais aprés la conquéte, ont réussi non seulement & survivre, mais & former aujourd’hui une “na- tion” de sept millions d’habitants au Canada méme aprés avoir perdu les millions qui ont émigré aux Etats-Unis. Le méme argument s’applique aux émigrés qui ont cogné a notre porte et ont demandé per- mission de co-habitation, permission qui leur a été accordée a la condition qu’ils adoptent une de nos deux langues officielles et nos cou- tumes. Sont-ils maintenant jaloux des “ceintu- res fléchées” qui ont buché les 3,000 milles de “leur’’ pays? Les Frangais ont eu des droits qu’il faut bien considérer et c’est de ces droits que j’ai- merais discuter aujourd’hui, sans entrer en détails sur les aspects légaux ou constitution- nels que les experts ont discutés et discutent encore. Le 19 avril 1967, le Vancouver Sun annon- cait: “Konrad Adenauer died in his sleep to- day, plunging into mourning the prosperous West German nation he built up from the ashes of its Second World War defeat.’’? A la Com- mission B & B tenue 4 Vancouver, un Cana- dien-autrichien prit la parole pour s’opposer a mes légéreg réclamations sur le traitement des notres dans les forces armées. Il révéla au grou- pe qu’il habitait le pays depuis sept ans déja, qu’il prosperait assez bien ici et qu’il avait ser- vi avec les forces hitlériennes. Le voila qui es- sayait de me dire comment je devais me sentir dans les forces canadiennes, lui qui avait servi cote & cdte avec les Allemands, qui avait combattu une cause ignoble, contribué au mas- sacre d’innocents, répandu la désolation et la destruction dans plusieurs pays. Cing ans aprés une défaite bien méritée, 1’Autriche était indé- pendante, en pleine prospérité et . .. Von y parlait toujours autrichien et non l’anglais, le francais ou le russe. En 1759; les habitants n’envahissaient au- cun pays; ils défendaient leur sol, leurs foyers, leur famille, leur langue et leur religion. Aprés une petite maudite bataille ou ils faisaient fa- ce a une armée organisée et bien disciplinée, avee 24 navires anglais au pied du cap Dia- mant, ils ont été subjugués, délaissés par la France (comme vient de le dire de Gaulle) affamés et remplis de troubles internes. Il y a plus de 200 ans que les Canadiens-francais payent cette petite défaite. Que de sacrifices ont-ils da faire, quel prix ont-ils dai payer pour conserver leur langue et leurs droits et ce, dans un pays que les Louis Hébert avaient défriché de leurs propres mains. “Enough is enough’’ disent les Québecois et aujourd’hui ils refu- sent de payer un prix perpétuel et de survivre seulement. Ils veulent étre chez eux, comme les Allemands et les Autrichiens le sont aujourd’- hui, sans avoir attendu deux siécles. Ils veu- lent un Québec indépendant ou un Canada totalement biculturel, sans demi-mesures; ou le mariage ou le divorce, pas de concubinage. in errant dans les pays étrangers dans “Her Majesty’s Canadian Ship’’, je songeais souvent au hasard qui crée des empires et qui en détruit d’autres. Les Anglais ont eu de la veine d’avoir de si bons chefs, leurs rois, leurs ministres, qui avaient 4 coeur le bien du peuple au lieu de boire du champagne aux bals d’é-