PE 5h - moriaux, 6, Le Soleil de Colombie, 11 juillet 1975 CHRONIOUWUE D’ARTISANAT La fabrication artisanale appareils et techniques Depuis des temps immé- se vétir a été l’une des préoccupations fondamentales de l’homme. A Vinstar de la laine, le lin est employé trés__tét dans la fabrication des tis- sus. Les procédés’ de transformation n’ont pas de secret pour les Egyp- tiens; les Grecs et les Ro- mains les connaissent é- alement. généralise vraiment en . France qu’a partir du Xié. . siécle et connaft un essor grandissant jusqu’au XVIIé siécle. Aprés un essor d’une centaine d’années, ie Premiére partie: ene 2 La culture Aujourd’hui, il est rare de trouver un habitant qui -cultive cette plante textile, alors que l’usage était en- core courant au début du siécle. La semence avait lieu 4 la mi-mai. On avait choisi une terre légére, que les hommes préparai- ent avec soin. Environ 3 mois plus tard, quand la _tige jaunissait et que la graine. tournait au brun, on arrachait les plantes A la main. Le rouissage Le rouissage pouvait s’ef- ae fectuer de 2 facons, Al’eau ou 4 la rosée. Le but de l’opération était d’isoler les fibres textiles en déta- chant l’aigrette (chénevot- te). Te rouissage A l’eau de- _mandait une quinzaine de jours. [1 fallait enfoncer les tiges de linde2 A 3 pouces sous l’eau, de pré- - férence dans un étang; des planches, apesanties par des pierres, couvraient le lin, l’empéchant de monter & la surface. Quand I’ai- rette se dégageait sur la fibre, il était temps de re- tirer les tiges. A cette méthode europé- -enne, on apréféré le rouis- sage 4 la rosée, qui se pratiquait communément _ dans le Haut et Bas Cana- _ da. Pour ce faire, on éta- lait les tiges sur l’herbe, en les retournant de temps A autre; ’humidité détrui- sait les substances gom- Meuses qui maintenaient la fibre 4 l’aigrette. Trois | _ semaines plus tard ou da- _ vantage selon la tempéra- ture, il fallait du soleil et _ de la pluie, le lin était mis en bottes et transporté dans = aa grande. Le battage Le lin comme jadis le blé et l’avoine, était battu§ au Le fléau comprend 2 lon- _ gues piéces de bois, le + . Cependant, - V’emploi de-ce textile nese ‘lin revient en faveur 4 l’au- be du XVIIIé. Siécle. Des enluminures euro - péennes des XIV6é. et XVé. Siécles illustrent des ap- pareils similaires A ceux qu’employaient nos aieules pour convertir la laine en drap. On y remarquait en effet les plancettes garnies d’aiguilles recourbées pour carder la laine, “la quenouille, le fuseau, le rouet, le dévidoir, l’our - dissoir plat, le métier. Avant l’industrialis«:ion massive et la mécanisation qui caractérisent les temps modernes, les techniques artisanales les plus’ an- ciennes se transmettaient. de génération en généra- tion. -En Noiuvelle-France, la fabrication artisanale des tissus débute lentement et doit étre stimulée par les Gouverneurs et les Inten- dants, Talon notamment; elle se développe au XVIII éme .Siécle, mais connaft- son véritable essor au xixéme Siécle. Le tissage domestique survit encore dans certaines régions ru- rales du Québec, grace A la création, en 1920, 2s Cercles de Fermiéres, qui firent revivre cette indus- trie familiale. Les matieres premieres ‘*maintien’’ et le batte, re- liées par des laniéres de cuir. Le batte est donc mo- bile au bout du maintienet, par l’action de ce dernier, il frappe sur la téte des ti- ges pour libérer les grai- nes. Au Québec, le battage s’effectuait aufléau, méme si cette méthode avait le désavantage d’endomma- ger les fibres textiles sous les coups de l]’instru- ment. Les experts favorisaient plutét l’égrenage au pei- gne de fer. On saisissait une poignée de lin pour la passer sur de grosses dents de fer fixeées 4 une piéce de bois massive; ces dents retenaient les grai- nes. Cette méthode se pra- tiquait courammenten Haut Canada. Le brayage «= Tous les automnes, a- prés le battage, l’habitant invitait ses voisins et pa- rents 4 la corvée de‘‘bray age’’ (broyage du lin). On réunissait les ‘‘brayes” - (broies) disponibles, afin d’occuper tout le monde u- ne jounnre entiére. L’opé- ration avait pour but de ré- duire le lin en filasse. La broie consiste en un chevalet de bois dont la traverse supérieure — est composée de 3 lames éga- lement en bois; un bras articulé vient se rabattre commie une mdchoire sur la traverse, broyant ain- si l’aigrette fragile qui - vole en éclats. Afin de rendre les tiges plus cassantes_ et faciles 4 broyer, on les faisaitd’a- bord sécher sur un feu. LE BATTAGE AU FLEAU Dessin : Henri Julien (1851-1908) L’Almanach du Peuple, 1917 LE BROYEUR DE LIN Fusain Marc-Auréle de Foy Suzor-Coété (1869-1937) Musée du Québec : On choisissait un endroit propice au traitement: la proximité d’uncours d’eau réduisait les risques d’in- cendie, et l’orée du _ bois protégeait” contre le vent. On creusait d’abord une fosse d’un pied de profon- deur environ pour y instal- ler le feu. Certains préfé- raient une fosse trés lar- ge et peu longue, d’autres la construisaient d’une lon- sueur double desalargeur. On plantait un pieu A chaque coin, que l’on reliait en- suite par des traverses. - Une échelle, des rondins de bois vert ou de simples perches posées sur les tra- verses formaient une grille _pour supporter le lin. Une dame 4gée et expéri- mentée était souvent dési- gnée comme ‘‘chauffeuse”’. Il fallait connaftre l’art de maintenir un feu intense, mais sans flamme, car les tiges de lin grillent vite. Pour éviter la ‘‘grillade’’ accidentelle, occasion des quolibets des-participants, la chauffeuse gardait A la portée dela mainunseau d’eau dans lequel elle trempait un balai pour as- perger le feu au besoin. (Le four 4 pain servait par- fois 4 sécher le lin). Les poignées de lin, une fois séchées, étaient par- tagées entre les six, sept ou huit ‘‘brayeurs’’. Com- me le lin était coriace au début, les hommes _ four- nissaient. le premier ef- fort. La fin de la corvée «ECOCHOIR» XIX¢ siecle | bois de merisier Longueur 19%" (50 cm) était annoncée par la chauf- _feuse qui dirigeait les opé- rations. Une grillade en donnait le signal, on pre- nait un repas en commun suivi d’une veillée. L’écochage ‘Malgré le travail des broies, la filasse portait encore quelques aigrettes qui devaient tomber au mo- ment de ‘‘l’écochage’’ - (teillage). Deux planches de bois réunies 4 angle droit ou undossier de chaise servait d’appui pour cette. opération. A laide d’un long couteau de bois franc au tranchant arrondi, on frappait la filasse déposée sur l’extrémité de la plan- che verticale. Ce coutelas, appelé ‘‘écochoir’’ débar - rassait les fibres de la me- nue paille indésirable. Peignage - Pour obtenir un lin plus fin on nettoyait ensuite la fi- lasse avec un peigne (sé- ran) ,a dents de fer ou de bois. Les filaments qui ne Passaient pas au travers des dents prenaient le nom "*d’étoupe de peigne’’, fi- lasse de seconde qualité. De méme, la grosse filasse tombée sous 1’écochoir s’appelait ‘‘étoupe d’éco - choir’’, lin de 3éme quali- té. z : A la suite de tous ces trai- tements, les fibres semblaient 4une chevelure souple, préte Ase nouer sur la quenouille pour étre filée. - res=-. | | '