| 6, Le Soleil de Colombie, 17 Janvier 1975 Deux semaines en Chine Deuxiéme d’une série d’articles écrits par M. Vincent Prince, éditorialiste émérite de la ‘*PRESSE’* de Mon tréal quiaavec l’autorisation de la ““PRESSE”’, a offert Sa collaboration spéciale au Soleil de Colombie. Un peuple en liesse féte 25 ans de révolution par inj - MHF (Vincent Prince), RRIVES hier soir, & Pékin, ce n‘est que ce matin que nous pouvons contempler la ca- pitale chinoise & la lumiére du jour. Nous pourrons dailleurs le faire & loisir puisque nous se- rons ici jusqu’a jeudi aprés-midi. Prés de cing jours en visites et _téceptions de toutes sortes. Notre hotel donne sur la grande avenue de la Paix Eternelle. Tout a cote, c’est la Cité Interdite avec ses monuments et palais d’une autre époque. Les grands édifices gouvernementaux, tous situés dans le voisinage, sont généreusement pavoisés et décorés. Il faut dire que Pékin est en liesse. Au- -Jourd’hui, dimanche, ainsi que lundi et mardi, seront jours de congé. On féte a la grandeur du pays le 25e anniversaire de la “Li- bération” ou de la prise du pouvoir par les communistes. Des fétes pour un million d‘invités Pekin est une ville qui, a V’instar de Canton, ne compte a peu prés pas d’édifices en hauteur. Ses quar- tiers ouvriers et ses rues commer- ciales ne donnent aucun signe de grande richesse, méme si les ma- gasins et marchés semblent regor- ger de denrées et marchandises de toutes sortes. Comme & Canton aussi et davantage encore, les pan- peaiireciamne a oe carre- ours vous rappellent les pensées et les directives de Mao. Les photos géantes de ce dernier sont omni- tes — dans bien des édifices on retrouve méme sa statue — et voisinent parfois avec celles des grands du marxisme: Engels, Marx, Lénine et Staline, Comme & Canton, et comme dans les rues des autres villes que nous visiterons plus tard, les cyclistes oc- Cupent presque toute la chaussée. ares autos des hauts fonction- naires ou visiteurs, de méme que les autobus du & coups de klaxon. C’est un beau tintamarre du matin au Soir. La foule est dense. Pendant ces jours de réjouissance, on la voit par- tout, sur les trottoirs ou dans les pares En ces derniers endroits, des spectacles ont été organisés qui ten- dent & raviver la flamme révolution- naire. Les soldats nombreux se mé- lent & cette foule et semblent faire corps avec elle. Les gardes rouges, facilement identifiables leurs bras. Sards de cette couleur, sont évidem- ment aussi de la partle. Lundi soir, ce sera le grand ban- quet dans l'immense salle du peuple, banquet qui réunira 4,800 convives et que présidera le premier minis- tre Chou En-lai. Mardi soir, les fes- tivités se termineront par un gigan- tesque feu d’artifice au Stade des Travailleurs, un amphithéatre de prés de 100,000 places qui sera plein & craquer. En tout, on aes- timé que prés d’un million de Péki- nois ont participé a l'une ou autre des manifestations organi- sées a cette occasion. : Nous avons profité de notre sé- jour a Pékin, bien sir, pour visiter des centres d’intérét touristique comme la Vallée des Tombeaux des empereurs Ming, la Grande Mu- Taille, le Palais impérial d’été, le Temple du Ciel et la Cité Interdite, mais il convient de retenir surtout les entretiens que nous avons pu avoir avec des hauts fonctionnaires de Vadministration et avec les re- présentants les plus autorisés du monde de la presse. Vingt millions de journaux Au niveau de la presse, nous ren- controns successivement les direc- teurs de la radio-télévision, de }’A- gence Chine Nouvelle et du “‘Quoti- dien du Peuole”, Au- niveau des hauts fonctionnaires, nous aurons comme interlocuteurs le vice-pre- mier ministre Tang Siao-ping, etle Vice-ministre des Affaires étrangé- res Yu Chan. A titre de journalistes, nous nous intéressons particuligrement au monde de la presse écrite et par- lee. Nous apprenons notamment que si a peu prés chaque famille a son appareil récepteur de radio, la Chine entiére ne compte encore que 200,000 téléviseurs pour une po- pulation de prés de 800,000,000 d’ha- bitants. La télévision, encore en noir et blanc-méme si !’on fait ac- tuellement des expériences en vue de déboucher sur la couleur, offre L'Agence Chine Nouvelle, une agence gouvernementale relevant du Conseil des affaires d’Etat, est la principale courroie de transmis- Sion de linformation tant pour la presse parlée que pour la presse écrite. Son directeur, M: Chu Mu- Chih nous explique que son agence - publie les nouvelles dont le peuple peut profiter, toutes les nou- velles qui peuvent contribuer a hausser la conscience révolution- naire de ce méme Eeunie, a lui mieux faire comprendre "esprit et Vaction du parti. A un journaliste canadien qui lui demande si, dans son esprit, la presse doit d’abord servir les intéréts de la population, il répond: “Ces intéréts coincident, car le gouvernement est au service de la population.” A un autre journaliste canadien qui s’inquiéte de la part abondante faite par l’agence a la propagande Marxiste-léniniste, il explique qu’il n’y a pas contradiction entre “for- mer” et “informer”, qu'il n’y a pas telle chose que la nouvelle pure. Il ajoute que Jes critiques des Des feux d’artifice, des édifices illuminés créaie te lors des célébrations du 256 anniversaire de | bre dernier A Pékin. lecteurs sont acceptées et publiées “quand elles sont justes”. Le “Quotidien du Peuple” est Yorgane du Comité central du parti communiste chinois. Son directeur, M. Chen Chun, partage évidem- ment la méme philosophie que son collégue de l’Agence Chine Nou- velle. Ils’agit pour lui de renseigner ‘chaque Jour le peuple sur la ligne du parti, de diffuser la propagande marxiste-léniniste. Le fait divers n’a pas sa place dans un tel jour- nal, sauf s’il peut servir d’exemple & ce qu'il faut faire ou ne pas faire pour se conformer a la ligne révolutionnaire. On s’étonne que le “Quotidien du Peuple” ait a son service prés de 400 journalistes pour produire un journal d’& peine 4 ou 6 pages. La réponse: un tiers d’entre eux doit constamment retourner dans les champs. ou les usines pour garder le contact avec les masses populai- res-et éviter ainsi la tentation con- tinuelle du révisionnisme, tandis qu’un autre tiers parcourt Je ys a ta recherche de faits pouvant servir d’exemples et de stimulants a Taction révolution- naire. Les autres journaux que nous visiterons, tant & Canton qu’a Shanghai agissent & peu prés de la méme facon. : L'URSS, principal ennemi de la Chine Par coe. me eareens avec lean! politi ues, ° ressort oe ache nouvel- les pour Jes observateurs de la scéne internationale. M. Teng Siao- -ping nous explique que la succes- sion de Mao ne devrait pas soule- ver de problémes majeurs étant nt une atmosphére de fé- a. Libération, le ler octo- donné que le parti, a tous les éche- lons, a réussi 4 faire un juste équi- _ libre entre les jeunes, les gens d’age moyen et les anciens qui, tous ensemble, se stimulent dans le service du peuple et la fidélité ala pensée marxiste-léniniste. Je pré- sent mouvement de critique de Confucius et Lin Piao est de nature - a prévenir le révisionnisme et les erreurs du communisme russe. Quant a la réunification de For- mose a la Chine continentale, M. Teng souhaite qu’elle soit l’aboutis- sement d’une négociation pacifique méme s’il n’exclut pas éventuelle- ment le recours a d’autres moyens. Pour le reste, la Chine s’intéresse d’abord 4 sa propre reconstruction en maintenant sa priorité au déve- — loppement de I’agriculture et de l'industrie légére. De son coté, M. Yu Chan nous parlera surtout des difficiles rela- tions de son pays avec la Russie. Il regrette que les différends idéo- logiques entre les deux partis em- péchent toute négociation au niveau des Etats. Il ne croit pas qu’il y ait détente réelle entre ?URSS et les Etats-Unis, soulignant que la Course aux armements se: poursuit toujours. Il ne craint pas une atta- que d’envergure de la Russie dans un avenir immédiat, mais déclare que la Chine est préte a y faire face en tout temps. La Russie demeure le plus grand ‘ennemi de la Chine. Quant 4 son commerce avec J’extérieur, y com- pris avec le Canada, Pékin est dis- posé a T’accroitre, Thais dans le cadre de négociations qui respec- tent les intéréts de chacun et dans le cadre évidemment de sa propre politique qui vise d’abord a }’auto- suffisance. : ’ | : | Zs , oc | | Sie ] | mE