12 Le Soleil de Colombie-Britannique, vendredi 18 octobre 1996 _ Gaspashow met le cap sur la Cote-Ouest Le théatre del’Auberginea entrepris depuis le 10 octobre une tournée provinciale de plus d’une ving- taine de représentations, qui leméne- ra dans les écoles, centres culturels et théatres des quatre coins dela provin- ce, en passant par]ile de Vancouver etle Centre des Arts de Banff, pourse terminera CranbrookaAla finnovem- bre.Compagnie québécoise pour jeu- ne publicfondéeen 1974, 1’ Aubergine compte déja plus de 30 créations ason répertoire et sa feuille de route est tiche de quelques 2 000 rerpésentations auprés de publics aussi variés que fidéles. D’écoles en festivals, de salles de spectacles en chapiteaux, les créateurs de 1’ Auber- gine ontsu créer une forme originale et colorée de divertissement fami- lial. Ils dévoilent maintenant au jeu- ne publicde la Céte-Ouest leur toute demiére création: Gaspashow. Gaspashow, c’est une mégapole de finde siécle, une cité ot régnent la loi et l’ordre et ot toute forme d’amusementcontre-productif est bannie. Les citadins, dont 1’extré- me efficacité et le sérieux frisent le ridicule, y viventsous la surveillance d’un régime militaire, aussi totalitai- re que grotesque. I] reste cependant trois joyeux loustics qui vivent clandestinement dans les souterrains de la ville et qui feront surface dans l’intention de changer |’ordre des choses. Gaspashow est un sepctacle sans parole créé pour les 5 a 12ans et qui s’inspire largement des arts du cirque et du clown, tel le mime, la musique, les jongleries et le diabolo, pour raconter une histoire pleine de rebondissement et d’humour. Gaspashow met en relief la rigueur des citadins et «l’anarchie» des trois roles, donnant ainsi lieu a d’étonnants contrastes visuels et formels. Gaspashow est une création de Richard Aubé, Benoit Auger, Denis St-Onge et Lina Vachon, interprétes par Benoit Auger, Denis St-Onge et Lina Vachon, surune musique origi- nale de Pierre Potvin, interprétée par Fabrice Tremblay. La mise en scéne est signée Richard Aubé. Pour de plus amples rensei- gnements concernant le Théatre de l’Aubergine, ainsi que les dates et lieux du spectacle Gaspashow, veuillez communiquer avec Mme Célyne Gagnon, Coordonnatrice de tournée, au (604) 752-8798 ou par télécopieur (604) 752-8722 a Qualicum Beach, sur l’fle de Vancouver. C) 22 octobre Cassie Hall Elementary School Terrace O 23 octobre Mount Elizabeth Theatre Kitimat Q 25 octobre Vanier Hall Prince George QO) 28 & 29 octobre North Peace Cultural Centre Fort St-John OQ 10novembre Banff Centre for the Arts Banff (Alberta) QO 15novembre Simikameen Ele- mentary Secondary Keremeos O 18 & 19 novembre Charles Bailey theatre Trail QO) 21 novembre TrafalgarJunior Secondary Nelson C) 22novembre Central Elementary School Nelson C) 24 novembre Key City Theatre Cranbrook QO La lutte a l’analphabétisme dans le L’analphabétisme demeure un probléme majeur dans les pays en développement. Parmi les gens ayant quelquescolarité, plusieurs ne dépas- sentpas le cycle primaire. Aprés avoir quitté]’école, ils ont peu ou pas accés aux livres etaux journaux; trés vite ils ne peuvent plus lire. Le besoin de l’écrit se fait surtout sentir en milieu rural ot il n’y a ni bibliothéque ni librairie. L’andemier CODEa expédié outre-mer prés d’un demi-million de livres pour les écoles et les bibliothé- monde ques rurales quiautrementenseraient dépourvues. Les livres, dons d’édi- teurs nord-américains, ont été sélec- tionnés par les partenaires outre-mer. CODE a de plus acheter 250 000 livres chez les éditeurs locaux. Pour plusieurs, ces livres sont la seule sour- ce d’information et de lecture car on n’a pas les moyens de les acheter. CODE fournit surtout le ma- tériel de lecture 4 sa clientéle cible: les enfants de 15 ans et moins et les (VOIR “LUTTE” EN PAGE 16) Pour vous, nous allons PIERRE MARTINEAU LE DON suite...) PAR PERNELLE SEVY (N.D.L.R. Nous nous excusons auprés de nos lecteurs du long délai apporté a publier la suite de ce conte de Madame Sévy, dit aumanque d'es- pace dans nos éditions précé- dentes. Voir le début dans notre édi- tion du 30 aoitt, en page 6.) peine Anthonis eut-il posé ses pinceauxqueloiseau, en effet, chanta. C’était un chant trés pur, une note fliitée faite pour annon- cer l'aurore, se terminant en trilles qui réjouissaient l’oreille. Anthonis, immo- bile, stupéfait, passa de Pémerveillement a leffroi. Qu’avait-il fait! Comment le prieur del’ Abbaye considérerait-il ce pro- dige s'il en avait connaissance? Croirait- ila don du Seigneur ou a une farce de sorcier? Et danscette derniére éventualité qu’adviendrait-ilde lui, pauvre Anthonis? Finir ses jours sur un bdcher ne lui sou- riait pas, ah! mais pas du tout! Anthonis savait trés bien pourquoil’oiseau s’était mis 4 chanter: c’était parce que lui, enlumineur émérite, avait peintavec trop de perfection le bec et la gorge de/’oiseau; parce qu’ilavait, du bout de son pinceau, mis l’étincelle de vie dans l’oeil rond de l'innocente petite béte. lin'y avait rien de démoniaquela-dedans. Anthonis étaittrop doué, voila tout! Mais jamais le prieur ne pourrait croire une chose pareille! Aussi Anthonis, qui était loin d’étre un sot, se remit-ilau travail et, avec dextérité, ferma de deux coups de pinceau le bec de loiseau. Ouf! II avait échappé belle! Cette aventure marqua profondé- ment Anthonis et ilse mit désormaisa se considérer non plus seulement comme unartiste enlumineur, mais aussicomme un créateur de vie doué d’un pouvoir si ~étrange qu’ll lui paraissait diabolique. 1! était effrayé par son pouvoir, mais en méme temps orgueilleux de le savoir en lui. Il brilait de connaitre ses limites. Un jour donc, sur une feuille de parchemin qui lui restait, il peignit un autre oiseau. Lui laissant le bec bien clos, - on n’est jamais trop prudent, - il mit tant de vie dans le regard, tant de réalité dans les détails des rémiges et des rectrices, que loiseau se détacha du parchemin et s’envola par la fenétre ouverte. On ne le revit jamais. Alla-t-il vers une contrée inconnue ol vivent les animaux échappés desateliers d’artistes? Ou bien fut-il man- gé par un chat qui passait par la? Anthonis, bien entendu, se garda d’ébruiter l’affaire. Mais cette seconde aventure le confirma dans ses dons et lui donnaun sentiment de puissance et d’or- gueil qu’il n’avait auparavant jamais res- senti. Dans son atelier, dont il fermait 4 présent soigneusement la fenétre, il se sentait un roi, un magicien, au fond... presque Dieu lui-méme. Alors! IDEE na- quit dans son esprit. Elle se forma tout doucement, comme une petite graine qui germetoute seule sans faire de bruit, sans qu’on|’observe, sans qu’on la voit gran- dir. Et puis un beau jour, clic! voila qu’apparait une plante presque adulte. C’est de cette fagon qu’Anthonis, un soir oll il révait encore plus intensément que d’habitude, setrouvaen train de dessiner, puis de peindre, une belle jeune fille. !I allait la faire sortir du parchemin, la faire respirer, sourire, luidonner lagrace des gestes, les charme desrondeurs [aot illes désirait, elle serait pour luitout seul. Ah! l'excitation avec laquelle Anthonis tra- vailla! Cela lui prit trois jours entiers et deux heures dela quatriéme journée. Car il fallait fignoler, penser au moindre dé- tail! Imaginez sila jeune fille s’était trou- vée avec un doigt crochu ou une oreille malourlée! I!décidad’étre prudent. Vous savez comment sont les gens: toujours curieuxde ce quise passe chezle voisin,- c’est le nom qu’il lui donna, - seulement lanuit. Le jour, ilaurait suffid’uneimpru- dence pour détruire son bonheur: le pro- priétaire surgissant par hasard pour se faire payer le loyer, un prieur ou un abbé venant commander un Livre de Priéres... Qu’aurait dit, qu’aurait fait Anthonis, je vous le demande, pour expliquer com- ment cette beauté se trouvait dans son atelier cheveux au vent, sans coiffe ni hennin, et vétue d'une robe décolletée comme aucune femme décente n’en por- tait dans la ville? Anthonis fermadoncles yeux de la belle et rangea soigneusement le parchemin dans ses cartons. Mais le soir, quand la lumiére descendit, que le volet fut ajusté derriére sa fenétre et les deuxchandellesallumées placées sur sa table, ilreleva les paupiéres de Gheertenje etluidessinalesyeuxles plustendres du monde. Labelle se détachadoucementdu parchemin, soncorpsgonflaet prit forme, elle mit ses bras blancs autour du cou de son peintre et, d’une voixangélique, pro- nonga son nom: «Anthonis !» Anthonis était émerveillé. N’ayant jamais été ba- vard, il ne sut quoi lui répondre. Mais lorsqu’on a les bras d’une jolie femme autour du cou, onapas besoin de parler beaucoup, n’est-ce pas? Au petit matin il Pétendit sur le parchemin ot elle repritsa forme plate de figure peinte et, pour plus de sécurité, il mit le parchemin dans un tiroir qu’il referma hermétiquement. Toute la journée il calligraphia des caractéres enjolivés de volutes, et peignit des fleurs, desiris, des oeillets des sables, desancolies sauvages. Letemps passa lentementa songré et, le soirvenu, ilouvritletiroir et retrouva sa Gheertenje aussi séduisante que laveille. Desjours et des nuits se succédérent. La vie n’était pluslaméme pour Anthonis. Ilse trouvait le plus heureux des hommes. Mais en mémetempsil vivait dans la crainte con- tinuelle d’étre surpris, et parfois il se demandait avec angoisse jusqu’ou allait son talent et of commengait oeuvre du diable, Cara cette époque on parlait beau- coup du diable, on Je voyait partout, a l'affit au coin de chaque rue, essayant d’entrainer les pauvres humains vers les régions sombres de l'enfer. On le disait trés puissant, et l'on disait aussi qu’il s’emparait aisémentdel’esprit des hom- mesorgueilleux. Malgré ses nuits de bon- heur, Anthonis était donc rongé par l’in- quiétude. Il continuait néanmoins a faire sontravailavec cette méme recherche de perfection minutieuse qui était tant appré- ciée des connaisseurs. Un jour, il eit 4 remplir une page entiére d’entrelacs. Oh! Commeils’y appliqua! La matiére de ce dessin compliqué représentait une fine cordelette de lin de trois couleurs. On pouvait la suivre dans ses méandres, pas- sant dessus, dessous, se nouant avec légéreté et souplesse, se recourbant puis filant droit vers un autre noeud avec la mémeagilité. Lorsque la page fut termi- née, illarangea dans son tiroirau moment méme olen sortait Gheertenje. A faurore, Gheertenje reprit sa place. Mais le soir, quand Anthonis ouvrit le tiroir, il fut atterré. Pendant la journée s’était passé un drame. Un drame silen- cieux et terrible. La cordelette, si bien peinte qu’onlacroyait réelle, s’était déta- chéea sontour du parchemin. Elle avait défait ses propres noeuds et entrelacs. Anthonis la retrouvaautourducorpsdesa belle, enserrant les chevilles, les bras, la taille, et surtout le cou ow elle était solidement nouée. Gheertenje reposait, toute blanche, dans sarobe de mousseli- ne. Aucune couleur delavie n’était visible sur sa peau. Il sembla a Anthonis, brus- quement, que son coeur était vide et qu'il n’était plus son propre maitre. Le jour méme il se sentit malade, Le deuxiéme jour le médecin l’examina, hocha la téte, et écrivit quelques mots étranges sur un morceau de parchemin quitrainait sur la table. Le troisiéme jour, l’apothicaire le drogua, Le quatriéme, le croque-mort Fenterra. Toute la population d’Oostlekhoven pleura Anthonis. Jamais plus on ne vit en Flandre, et méme en Brabant et en Artois, artiste dont les enlu- minures réjouissaient autant les yeuxet le coeur. Certains pensent que decettetris- te aventure est née la réaction contre la peinture naturaliste. Mais je me garderais bien de laffirmer. On raconte tant de Qu’elles soient bonnes ou mauvaises, étonnantes ou prévisibles, les nouvelles de votre région sont importantes pour ce Soir vous et... pour nous! EN COLOMBIE-BRITANNIQUE Lundi au vendredi SRC roy DE TOUT POUR FAIRE UN MONDE Télévision Colombie-Britannique