A ka sitahihabitii Tourisme Pelerinage OMBIEN de personnes pou- vait-il y avoir, 4 Sainte-Anne- de-Beaupré, le 25 juillet, veille de la féte de sainte Anne?’ Selon I’assistant-recteur du Cen- tre, 100,000 personnes vien- draient en pélerinage dans cette seule fin de semaine: Le directeur du Cyclorama croit étre plus prés de la réalité en coupant ce chif- fre en deux. Un officier de police en voit encore moins. ‘Mais tous sont d’accord sur un point: @ y a, a Sainte-Anne, autant de monde quil y a 10, 15 ou 20 ans. L’important, pour eux, n’est peut-étre pas le nombre des pélerins; ce qui compte, finalement, c’est que ce nom- bre demeure. Le petit village, accroché a la rive du fleuve (les gens de la region disent : “Ja mer’’), continue donc sa vocation déja ancienne de plus de 300 ans, re- cevant les pélerins de toute l’Améri- que du Nord, fidéles 4 leurs promes- — ses ou a leurs traditions. Les taciicns! tidéles La valeur ‘‘tradition’’ semble ici im- portante. Plusieurs personnes rencontrées ve- naient a Sainte-Anne réguliérement depuis 20 ou 25 ans. Ils se retrouvent chez eux dans ce lieu de priére ma- -jestueux, entouré de petites maisons simples et presque pauvres, toujours anciennes. Dans son aspect exterieur, Sainte-Anne ne change pas. Et ceux qui y viennent semblent heureux de cette fidélité. ' On prie d’ailleurs de la méme facon qu’autrefois. On assiste a la messe, on se confesse a l’un des 4 prétres qui étaient en service ce dimanche matin, on fait briler un lampion a un dollar. Le soir, toutes les priéres indi- viduelles se fondent dans une grande procession au flambeau ow il n’y a plus qu’une priere et qu'un chant. Autrefois, les pélerins arrivaient en train et s’installaient pour deux pu trois jours dans les petits hdtels qu village. C’était l’époque des grands pelerinages. Aujourd’hui, ts s‘aménent pour Ii plupart au volant de leur automobile: il y en avait prés de 500 qui remplis- saient le parking, avec une vingtaine d’autobus. Quelqu’un faisait la remar- que: “Il y a moins de peélerins et plus de touristes.” De fait, il est parfois difficile d’en faire la différence. Qui est Ia ? Pelerins ou touristes, ils sont de tous les ages, mais surtout d’un cer- tain age et d’un Age certain. Il ne faut pas s’attendre a y voir des ado- lescents, sinon ceux qui doivent en- core suivre leurs parents pour les randonnées du dimanche ou pour les vacances. Un groupe de 192 pélerins est venu par avion nolisé des Etats-Unis. Ils appartenaient a une association de Springfield, Mass., du nom de “Ahearn Memorial Pilgrimage”. Les membres sont répandus a travers les Etats ameéricains et ne sont pas tous catholiques. Le fondateur du groupe, Andrew Ahearn, fut miraculeusement guéri de son infirmité médicalement incurable . en 1922, a Sainte-Amne. {1 promit d’or- ganiser alors des pélerinages d’infir- mes chaque année au lieu de sa gué- rison. Aprés sa mort, sa famille conti- nua l’engagement. Cette année, on comptait 72 malades en chaises rou- Jantes. Des aides, avec des uniformes spéciaux ol l’on lit ‘“‘St. Anne’s- Aid’, s’occupent d’eux pendant les neufs jours complets du pélerinage. L’un d’entre eux rend ainsi une partie de ses vacances ‘depuis 22 ans. “C’est un service qu’on rend a sainte Anne et aux malades”, dit-il simplement. Un autre groupe attirait encore plus Vattention. : Eux-mémes s’identifient comme des Les foules sont aussi nombreuses G ‘a Bestia cord besoin demeure. “gypsies”. Ils étaient environ 2,000, le 25 juillet, comme a chaque année pour la féte de sainte Anne. Is vien- nent de partout en Amérique, parlent une langue qui leur esi propre ef se reconnaissent a des traits de figures particuliers. Les ““gypsies’’ se rencon- trent a la sainte-Anne. Ils sont de ~“purs gypsies’, disent- ils, de nationalites différentes, mais dont les grand parents ont tous été. en Russie, en France ou ailleurs, de simples romanichels. {ls sont mainte- nant tous riches, semble-t-il. Hs ont gardé Jeur langue et leur foi. Et par- dessus tout, la dévotion & sainte Anne. Op a lVimpression de rencontrer }a- bas des gens que Jon ne verrait nulle part ailleurs. Les motivations Mais pourquoi sont-ils venus? Qu’est-ce qui motive suffisamment ces gens a prendre leurs vacances. faire de longues distances pour venir pas- ser un jour ou une semaine dans ce petit village du Québec? Les hotels sont trés simples: les restaurants trop peu nombreux et peu attirants: Ja nature n’a rien de parti- culier, sinon le Saint-Laurent qui est souvent plus beau ailleurs. Et les miracles sont peu frequents Le pere J.M. Bégin affirme que, si les pélerins viennent au début pour obtenir des faveurs temporelles, c’est Les p&icinages changeat d’habit mais le finalement des faveurs spirituelles quiils obtiennent. Pour répondre aux divers besoins, Jes péres ont sur les lieux un expert en counselling et ils ont ouvert l’an dernier un centre d’oe- cumenisme. Ils estiment que les péle- tins viennent principalement chez eux pour trouver - une alimentation pour leur foi. Une infirme, totalement paralysée des bras et des jambes et qui faisait} partie du groupe de Springfield. expli que: os “La premiére fois que je suis venue ici, c était’ pour demander ma _ guéri- son. Maintenant, je ne demande plus qu'une plus grande foi. Je peux main- tenant. remercier le Seigneur d’avoir ceile infirmité : je rencontre ainsi con- stamment des gens qui sont pons et gentils.” Et elle tourne doucement jes yeux vers une aide’ qui, debout a ses cotés, lui donne a manger... De Pavis du directeur des “Ahearn Pilgrimages”, les pélerins viennent principalement demander des faveurs pour «autres personnes qu’eux. Ils viennent prier pour les autres. Pour eux, iis ne demandent que le courage d’accepter leur situation et de survi- vre ainsl. Le pére Gendron, recteur du centre, considére que Sainte-Anne doit demeu- rer pour que les croyants puissent trouver des lieux privilégiés de foi. Il —reconnait quil y a la une forme de religion tres populaire qui ne peut sa- tisfaire tout le monde. LE SOLEIL, ler OCTOBRE 1971, Xili