Le Soleil de Colombie, vendredi 17 aout 1990 - 13 VOYAGES. O Bombay! Dimanche 27 janvier 1985. L’avion en provenance d’Athe- nes s'immobilise enfin a l’'aéroport de Bombay (céte occidentale de |'Inde). Mon premier pas sur le sol asiatique me donne un peu |’impression d’alunir. Une heure plus tard, je me retrouve a un arrét de bus avec cing compagnons de voyage, tentant entre nous d’amortir, pour ainsi dire, l’inévitable choc culturel. Jungle urbaine Il n’est que 5h00 du matin. Pourtant, la vie semble avoir repris son rythme trépidant: charrettes tirées par des vaches bossues, nombreuses voitures noires depuis longtemps démo- dées, sonneries de rickshaws, piétons maigrelets, mendiants, chiens efflanqués... Un gros rat se délecte sur un tas de déchets prés d’une famille allongée dans Bombay Ma Sst ) samisére. Chaleur humide. Des ie autobus affichent en grosses lettres: TATA, mot que l'on utilise au Québec pour désigner un niais. La-bas, une grande affiche de cinéma nous invite déja a fuir, dirait-on, cette dure réalité. Je me sens moi-méme figurant dans une scene de cinéma-vérité. Un vieil autobus bondés’arréte devant nous. Plat au ciel que je n’eusse pour tout bagage que ma brosse a dents! - Se dévoilent maintenant sous nos yeux, peu a peu, les multiples facettes de Bombay, cette gigantesque jungle in- dienne. — Une heure de «spectacle» on. ne peut plus exotique, et nous voila au Sea Shore Hotel (au bord de la mer), non loin de la célébre Porte de |’Inde et du luxueux Taj Mahal Hotel. Un quai décoré. d’une surabon- dance de lumiéres multicolores et de fleurs Ademi fanées asans doute servi aux réjouissances d’un grand mariage. Aprés avoirloué des chambres 4 3$, nous décidons, moi de me coucher, mes compagnons de se promener au hasard. A leur retour, ceux-ci m/’annoncent qu’une Indienne cherche des blancs pour figurer dans un film avec Amitabh Bachchan, une des plus grandes vedettes du cinéma indien. lls ont présumé que j’accepterais, comme eux. Débutera donc demain matin, a l’extérieur de la ville, ma «carriére» de figurant, une des expériences les plus inatten- dues de mon tour du monde (voir «Figurant dans ‘Mard’»). Grand repos a l’ombre. Mise a jour de mon journal, puis conversations avec Indiens et touristes. Un Frangais me préte son guide. Jy lis cette introduction: «Porte d entrée de l'‘Inde pour de nombreux visiteurs, oU ils recueillent leurs premiéres impressions sur son étonnante variété de races, de religions, de couleurs et de coutumes, Bombay est /'une des plus fascinantes mégalopo- lis du globe, née de /a réussite Yao ah a stage NS N- “4 DESH i dras SARELANKA anarchique et écrasante de la révolution industrielle indienne apartir deladeuxiéme moitié du XIXe siécle.» Croissance extra- ordinaire due aux progrés de \'industrialisation (d’abord liée aux textiles), mais aussi au développement des chemins de fer et des installations portuai- res. Plus tard, en faisant le tour de la Porte de l’lInde (arc de triomphe conventionnel en basalte, éléments de style musulman) avec un Néo- Zélandais, je lui apprends que ce monument fut érigé pour commémorer l’arrivée en terre indienne du roi George V et dela reine Mary (1911). Gandhi profita de cet événement pour lancer son mouvement de «non-coopération non violen- te». Devant nous se dresse orgueilleuse fagade victorien- ne du Taj Mahal Hotel, le plus prestigieux du pays, parait-il. Souper, non, hélas! au Taj Mahal, mais dans un restaurant bon marché avec mes compa- gnons de ce matin. Echange de cent commentaires sur nos premiéres heures en Inde. Mike, de Los Angeles, accumule les détails pittoresques, parfois teintés de racisme. (Une actrice grassouillette lui a «souri a l'envers» sur une affiche renversée appuyée contre un mur.) Il fait suivre ses observations d’une sorte d’ex- pose sur «the lateral thought» (la pensée oblique) auquel je ne comprends rien. Délicieux, ce riz frit aux légumes. J’en mangerais volontiers tous les jours, évitant ainsi les mets trop épicés et, peut-étre, les maux d’estomac. En sortant de table, j'apprends a Yves, un Montréa- lais, que «cake» est un mot francisé(gateau garni de raisins secs, fruits confits). Mmm, ce serait bon. Gros rats gris Avant d’éteindre la lumiére, ce soir-la, mes deux compagnons de chambre se plaisent a raconter d’horribles histoires de rats ala Hitchcock. Ils en ont apercu plus d’un, cet aprés- midi, dans des ruelles insalu- bres de Bombay. Faisons maintenant de beaux réves! (Lorsque, de retour a Vancou- ver, je parlerai A un ami de mon séjour ici, il me recommandera un article sur les rats dans le «National Geographic» de juillet 1977. Une photo saisissante montre des techniciens d’un institut de Bombay - spécialisé dans la prévention de la peste - en train de classifier, selon les différents quartiers de la ville, quelque 4,000 rats tués en un seul jour. Par ailleurs, une autre photo aété prise dans un temple hindou ot des milliers de rats sont vénérés et nourris de sucreries, de grains et de lait. On leur consacre, chaque année, une petite fortune, alors que tant d’Indiens ont du mal a ' survivre... Paradoxe parmi tant d'autres.) Le lendemain, 28 janvier. Nous voila tous les six a attendre, avec une vingtaine d’autres «blancs», |l’autobus qui nous conduira au plateau de tournage. Lachaleur se fait déja écrasante. Départ a l'heure prévue. Joyeux bavardages, de plus en plus animés. Traversée d'interminables faubourgs. J’apercgois parma fenétre, parmi tant de scénes plus exotiques les unes que les autres, ce que j'appellerais des «tapoteuses de galettes»: de vieilles femmes accroupies tapent a mains nues de la bouse de vache mélée de paille pour en faire, me dit-on, une fois séchée, de.la matiére combustible. Nous ne mettons pas moins d’une heure pour sortir de la ville a travers la circulation et les cohues inimaginables qui hantent les rues de Bombay. De retour, vers 18h00, de cette premiére journée de figuration, je m’empresse de me rafraichir sous une douche froide (il n'y a pas d'eau chaude), puis d’ajouter quelques lignes Amon | journal. J’observe ensuite les va-et-vient en attendant de retourner au restaurant avec mes cing compagnons. Ils me paraissent bien affectueux, ces jeunes hommes indiens; les uns se tiennent par la main, Les mots croisés de Tima Sekkat iV. Vv vi Vil Vill ix xX 2. Sont a jeter. - A payer. 3. Issu. - En matiére de. - Nous fait suer. 4. Pied de vigne. - Pour les touristes. 5. Sont anciens. précieux. 6. Convoqué. - Vient d’aller. - Il est 7. Semi-réaliste. - Chaleur animale. 8. Infinitif. - Les quatre saisons. - Extrémiste. 9. Elleest blanche. - Gagné. 10. Choisit. - Savoir faire. 1 | 2 Grille5 ° 4 5 6 7 8 9 10 HORIZONTALEMENT : VERTICALEMENT: 1. Invasion. |. Rival. ll. Lisiére. - Ventiler. lll. Notre-Dame. - Crapaud d’Amérique tropicale. - Deux romains. IV. Relatif. - Le bord de la mer. V. Force. - Venu = au monde. Vi. Fin de matinée. - Mille pattes. Vil. Mouche. - Via. Vill. Régle. - Débute un roman. IX. Piéce a jouer. - Cellule fécondée. X. Déchiffré. - ll parole. Solution de la semaine derniére {2a ANG AV, Ve VEE VIL NAL aX xe TIS INE [RMIT TEAL E 21N Gis Cin Grille 4 stelalalalo p , 414 = O}! Je SIA EJALVICh Je 6 IE N rI& 74 LAT AD ar € 810 1@ ao LIL JEJATS 9INTE IQ [Ft THvic offs Tals tsye Ml cle Ts d'autres par la taille ou le cou, comme les gais libérés de San Francisco. L’un d’eux m’adres- se un sourire franc, découvrant des dents d’une_ blancheur parfaite. Attablé plus tard devant un autre riz frit aux légumes, je m’étonne de|’énergie qu'il nous reste a tous aprés une journée aussi éprouvante, a cause, bien sur, de la chaleur torride. Les blagues fusent, et les devinet- tes - dirais-je gauloises. Je demande, a brile-pourpoint: «Comment peut-on commettre un meurtre dans un bain de vapeur sans que personne ne puisse découvrir l’arme du: crime?» On donne vite sa langue - au chat. «A /’aide d'un long glagon pointu.» Cela jette un froid dans |’assistance. Vient le moment de payer |’addition. Assiette comble de riz frit et eau gazeuse: 1$, le prix d’un petit sac de glacons a Vancouver! Par Jean-Claude Boyer Ga,ca fat du bien! GF.