Critique Littéraire Une insoumise algérienne Les différents chapitres de La Transe des insoumis s'intitulent soit "Ici", soit "La-bas". "Ici" décrit la vie de l'auteur, Malika Mokkedem, en France oii elle finit des études en médecine et devient spécialiste en né- phrologie au Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier; "La-bas", c'est le désert algérien ov elle est née et oi elle a été élevée dans un envi- ronnement pauvre et traditionnel dominé par un ordre masculin bien enra- ciné et oul les femmes sont résignées a des réles effacés. Ce récit autobiographique entrecroise le passé de Malika, son en- fance et son adolescence révoltées, et sa vie adulte de femme libérée mais souvent menacée. Ces deux époques sont reliées par un méme théme : I'in- somnie dont souffre l'auteur depuis sa petite enfance. Incapable de dormir de longues heures, Malika se réfugie dans la piéce ot se repose sa grand- mére, insomniaque elle aussi, et qui lui raconte des histoires de son passé nomade, ce qui éveille chez l'enfant le gotit des départs et celui de la lec- ture. Une fois a l'école, elle dévore les livres. Comme elle se montre douée pour l'étude, sa directrice, une Frangaise, va rendre visite 4 son pére et ré- ussit a le convaincre de laisser sa fille poursuivre des études au lycée. "Pour que l'Algérie soit réellement indépendante, il lui faudra sa propre reléve d'enseignants, de médecins, d'ingénieurs" (144). Dans cette famille ou ni pére ni mére ne savent lire ou écrire c'est une premiére victoire. Il n'y a que quatre filles dans tout le lycée, et elles proviennent de l’ensemble de la région mais au bout d'un an, il ne reste plus que Malika qui sera la seule fille de la classe de cinquiéme jusqu’a la terminale. Elle est objet de mépris de la part des garcons qui se moquent d'elle, l'injurient et lui jettent des pierres. Si elle tient bon malgré les tracasseries et les humiliations, c'est qu'elle est animée par la colére et la révolte face 4 ce milieu aux traditions écrasantes, oil se promener sans voile est un acte de provocation comme si elle était nue (173). Aux vacances, elle doit s'enfuir pour échapper au ma- riage que son pére et un grand-oncle ont arrangé pour elle, selon la tradi- tion. A l'Université d'Oran, elle se heurte encore aux étudiants et méme a un professeur qui la fait échouer sans raison, et aussi aux administrateurs qui ne lui paient pas l'intégralité de son salaire de maitresse d'internat. Si elle continue a se battre c'est qu'elle est déterminée et posséde une volonté de fer. Ayant obtenu de terminer ses études en France, elle est nommée dans le service des maladies du rein au CHU de Montpellier. Suite page 23 14