in dannioninsilaa iio Société Historique Franco-Colombienne Devenez membre de la Société Historique Franco-Colombienne Cotisation annuelle: $4.00 membre individuel $10.00 membre groupe | a‘s Mme Catherine Lévesque 9, Broadway Est, Vancouver Le Soleil de Colombie, vendredi 20 juillet 1979 15 La Société Historique Franco-Colombienne a emménagé au 9, Broadway Est, 8 Vancouver [Code postal: Le bureau est ouvert le lundi, le mercredi et le vendredi, de 9h30 a 15h30. La permanence est assurée par la secrétaire de la Société Historique, Mme Catou Lévesque. Tél. 879-3911. Saviez-vous VST 1V4 | qul existait un journal en francais au début de la colonie? et td LE COURRIER DE LA NOUVELLE-CALEDONIE informait les premiers colons de la Colombie-Britannique Procurez-vous les exemplaires existants du 11 septembre 1858 au 8 Octobre 1858. ECRIVEZ A: SOCIETE HISTORIQUE FRANCO-COLOMBIENNE a/s Mme Catherine Lévesque, 211, 46éme avenue ouest, Vancouver, C.B. V5Y 2X2 PRIX: $1.25 + $0.25 pour la poste : Le rodéo se fit tout de suite aprés le repas, ce qui présentait double avantage pour les concurrents: d’abord d’éviter 4 chacun d’eux de faire son repas avec les membres tout meurtris; ensuite celui qui n’était pas négligeable non plus, de per- mettre un meilleur tasse- ment de la nourriture absor- bée et donc une trés bonne digestion... Mais passons aux choses sérieuses: Perry, en grand costume d’appa- rat, chaps en cuir, avec poils en dehors, chemise mackin- naw écossais, stetson en téte et colt a la ceinture, au centre du corral, vint annon- cer et présenter les cing concurrents qui allaient se disputer les prix offerts par le rancher: une superbe selle au premier, bride au second et éperons mexicains au troi- siéme. Et on pouvait admirer la prestance de cet homme puissant se dressant comme un dieu du cheval au milieu de ses sujets. L’annonce faite, les com mentaires commengaient a se faire entendre quand Perry, reprenant la parole, nous l’entendimes crier, a _ notre stupéfaction: — Et puis, boys, take care, car nous avons encore un autre concurrent que vous ne connaissez peut-étre pas..., one of the french gentlemen... Jean et moi, nous nous re- gardimes, car jamais nous n’avions eu | intention la plus mince de nous trouver ac- teurs dans cette aventure, mais simples spectateurs... Que faire? Il n’était pas _ question pour Jean de mon- ter pour |'instant, a cause de sa blessure au pied encore trop récente et qu'il devait bien bénir, 4 ce moment, en son for intérieur; donc, ne - voulant pas laisser s’éterni- ser les rires qui déja fusaient dans l'assistance, je relevai le gant et prit le risque, c’est-a-dire une bonne chute sur la neige de l’enclos dur et gelé; mais n’avais-je pas déja pris pareil risque en jouant au rugby a Brive, au C.A.B. nouveau-né, ce qui m’avait ~d'ailleurs valu une bonne fracture de l’épaule? Et je n’en étais pas mort pour autant! Comme je n’avais pas pris avec moi, et pour cause, mes « chaps » de cuir que je ne mettais guére que pour la descente en ville, 4 selle, ou surtout pour la visite de nos concessions dans les taillis et les bois, je demandi done a ce fumiste de Perry de me préter l’essentiel pour ce rude ballet. De plus, étant un inconnu pour la plupart des specta- teurs — certains venant de trés loin —, ainsi que je vous lai déja dit, et de plus l’'ami de notre hdte, je devais passer le dernier. La durée minimale de maintien sur le dos du bron- cho était, autant que je m’en souvienne, de 8 secondes pour ne pas étre disqua- lifié, avec faculté de faire une nouvelle tentative, en cas d'échec au premier essai. Il n’y avait ni selle ni bride, mais une simple san- gle a laquelle on pouvait se cramponner, mais d’une seu- le main, en alternant a volonté. Bref, j’étais dans le bain et il fallait que j’en sorte, sinon par un succés, ce dont je doutais fort — car si j’étais un cavalier ordinaire, il y avait beaucoup a faire pour rivaliser avec ces centaures qu’étaient ces hommes de cheval —, tout au moins avec les honneurs... Les-paris allaient leur train et tout ce monde bariolé s'en donnait a coeur- joie. Ite POLE RSA Etant considéré comme un tocard, il y en eut cepen- dant qui, par goat du risque, sans doute, ou pour s’amu- ser, misérent sur moi, _ for the Frenchie, just for fun » [pour le Francais, juste pour le plaisir]. Et le jeu qui n’en était guére un pour moi, je vous l’assure, commenga. Il peut sembler que huit secondes ne sont qu’une infime partie du temps, infinitésimale cer- tes devant une tasse de thé et sur une chaise bien rem- bourrée. Mais je puis vous certi- fier que sur le dos d'un broncho, c’est une autre affaire: un animal déchai- né essayant de se débar- rasser, par tous les moyens, de son indésirable parte- naire, ruades, sauts de mou- ton, chocs contre les per- ‘ches du corral, demi-tours sans préavis, bref, tous les tours les plus vicieux, voila” le siége « confortable » sur lequel nous devions rester assis, si l'on peut employer ce terme, pendant au moins huit secondes. Bref, je ne puis vous raconter dans tous les dé-- tails les hauts faits des cing premiers concurrents dont deux seulement restérent en lice, l’un d’eux étant Jack, fils du captain Schott. C’était donc mon tour, maintenant. J'invoquai alors, avant l’ouverture de la loge, tous les saints du para- dis, connus et inconnus, car j’étais en grande détresse. _ Et, tout a coup, ce fut un maelstrém qui m’emporta, virevoltant dans tous les sens, plongeant comme dans un abime et remontant en- suite comme une fléche vers les étoiles, avec cette vision tournoyante de la foule qui criait sa joie, puis un mor- . ceau de ciel, un.carré d’her-, be verte, une bande'de neige sur laquelle il me tardait de venir m’étaler. Bref, ce moment arriva et je me trouvai enfin, roulant a terre comme un lapin sous le plomb du chasseur, les yeux encore clignotants et, je pense, hagards, un peu endolori, certes, mais sans blessure. Et je bénis 4 ce moment, rétrospectivement, les matches de rugby oli j'avais appris a brouter la pelouse parfois assez dure du vieux terrain des Bordes, © a Brive. Enfin, le broncho rattrapé au lasso par les cow-boys juchés sur les perches du corral, je sortis du terrain de « jeux » sous les acclama- tions du public bariolé et bon enfant qui criait: — Bravo, Frenchie! You stay nine seconds and you're the third... 3 Tout abasourdi de mon aventure, je prenais les cho- ses comme trés ordinaires et disais d’un air nonchalant et bluffant comme un damné menteur, que c’était affaire courante en France, car nous avions des écoles d’équita- tion étonnantes, telle Saumur. Ce n’était pas par pure vantardise que je faisais ce petit mensonge mais, dans ce pays de types durs et rudes, il ne fallait pas, pour se faire respecter, leur lais- ser croire qu’on leur était inférieur. En la circonstance, le tout n’était pas de gagner mais, en tout cas, d’essayer. Mais depuis ce jour, et me méfiant d'un quelconque far- felu comme ce brave Perry, j‘évitai soigneusement tout rodéo dans Je pays d’Atha- basca et les environs comme le Baptist Lake ou Cadotte Lake ov nous aurions siire- ment retrouvé des connais- sances et des amis... - Aprés maintes poignées de main et des « au revoir » nombreux et sonores, nous reprimes le chemin de notre « baby ranch » car, en cette saison, les jours déclinant vite, nous voulions rentrer avant la nuit pour soigner nos chéres volailles afin qu’elles pussent profiter de la provende habituelle du soir et se réchauffer pour la nuit en grattant la paille, avant de gagner leurs per- choirs. Les jours d’hiver ‘pas- saient ainsi dans le dérou- lement normal qui n’avait cependant, pour nous, rien de monotone, car chaque heure trouvait le travail a accomplir. Et malgré ce travail, ou peut-étre a cause de lui, j’étais pleinement satisfait de cette vie. Dans notre home assez confortable, presque lu- xueux pour un homestead et b&ti de nos mains, nous pouvions voir, de nos fené- tres, l’écurie, le poulailler, le puits et les clétures, un royaume pour moi, toutes choses que la volonté de l'homme avait ajoutées a cette nature récemment en- core sauvage et inviolée. Et cela était déja une grande récompense. Mais il y avait toujours, aprés une tfiche accomplie, une autre qui se présentait a notre choix, car l’oeuvre de défrichement apparaissait insatisfaite et toujours se renouvelait. L’esprit tou- jours en éveil, je voyais la un coin de vallon a nettoyer (petite Suisse en miniature); les vastes pacages qui des- cendaient vers la riviére devraient étre débroussail- lés dés que nous aurions la possibilité d’y mettre quel- ques tétes de bétail; le lac aurait sa vanne et son ruis- seau sa route bien tracée vers la grande Athabasca qui l’accueillait 4 son terme; la place a foin s’agrandirait par |’arrachage des -brous- sailles et taillis qui, peua — peu, avaient gagné sur elle et l’étouffaient lentement. Tel un Robinson, j’allais constamment a la découver- te, amoureux de notre sol, et a la recherche de tout ce qui pouvait le rendre plus fertile et plus beau. Et la saison s’avancait: le poulailler devenait de plus en plus sonore sous le chant victorieux des poulettes fié- res de l’oeuf pondu. Le soleil, plus haut dans le ciel, attiédissait plus forte- ment l’atmosphére et cer- tains souffles de l’ouest lais- saient présager l’impétueux déferlement du vieux et fidéle « chinook » qui, bala- yant les neiges, ferait le .beau printemps. Chaque jour montrait da- vantage l’emprise de la nou- velle saison: les écureuils, sortant de leurs nids douil- lets, gambadaient en criant dans les hautes branches; les perdrix d’épinettes commen- caient a se poursuivre en caquetant et le male faisait la roue devant ses poules déja moins dédaigneuses. En suivant mes lignes de trappes, je voyais aussi, d'une passée a l'autre, mes piéges s’enfoncer peu a peu dans la neige amollie. Un jour vint ow les pre- miers filets d’eau descendi- rent les pentes pour venir recouvrir, timidement d’abord comme d’un léger miroir, la surface des mares, des creeks et de la rivi¢re encore immobile. Et puis, presque sans transition, la grande attaque du chinook se déclencha, soufflant, sur le tapis tou- jours intact des neiges, I’ha- leine chaude du Pacifique. Les oies et les canards, éternels migrateurs et an- nonciateurs des beau jours, passérent dans le ciel pour regagner les grands lacs du Nord. — Enfin, la riviére, faisant craquer sa carapace de glace, se libérait a grand renfort de grondements et de formidables dislocations. (A SUIVRE ) —