Apprendre a philosopher Critique de Simon Henchiri Roger-Pol Droit a publié un recueil d’essais intitulé 101 expériences de philosophie quotidienne. Il s'agit en fait du retour de notre mémoire aux gestes de tous les jours accomplis au travail, dans la rue ou dans la famille. L’auteur dresse une liste de cent legons (plus une), legons tirées d’observations simples, ordinaires, parfois anodines. En voici quelques titres : - Compter jusqu’a mille - Courir dans un cimetiére - S’arracher un cheveu. Dans une introduction appelée aventures de tous les jours, \'auteur qualifie son livre de divertissement ou, ajoute-t-il, « le futile donne a penser, le dérisoire conduit au sérieux, la profondeur part du superficiel ». Son principe est le suivant : la philosophie n’est pas nécessairement un sujet théorique absolu et hermétique. La philosophie peut résulter d’une expérience qui s’est déroulée dans « des situations trés banales ». Les Sujets cités dans le Paragraphe précédent sont des exemples parmi la centaine qu’il ©xpose dans ce livre. Ce livre est présenté d'une facon curieuse, a la maniére d’un livre de recettes de cuisine. Chacun des articles mentionnés en exerque trois données qui définissent l'expérience. -la durée pour marquer le temps nécessaire -le matériel pour indiquer l'objet de l'expérience -et l'effet pour donner le résultat obtenu En voici un exemple : Imaginer qu’on va mourir : « Des accidents invraisemblables vous guettent partout, a chaque seconde. » écrit l'auteur. On peut étre écrasé « par un autobus, un camion, une voiture, voire une moto ». On peut risquer sa vie derriére le volant de sa voiture, dans un avion ou dans un train. « Le décés est une certitude dira-t-il. Nile jour, ni l'heure, c'est entendu. Mais inéluctable, absolument. Assuré, sans défaut, sans exception ». Il n’y a pas de quoi se réjouir si l'on pense a tout ce qui nous guette dans la vie. Il vaut mieux se comporter en philosophe, en Stoicien pour ne pas sombrer dans le chagrin, pire encore dans les « ruminations morbides ». Pour éviter la panique, ne doit-on pas réconcilier les deux extrémes, l'impossible et l’inéluctable? Ne doit-on pas vivre comme si la mort n’est qu’un réve, un cauchemar que I’on oubliera chaque matin? C'est en cela que la philosophie intervient dans la vie et éloigne I'idée de la mort, sinon dans le temps, du moins dans notre cerveau, dans notre ame. Roger-Pol Droit est chercheur au Centre national de recherche scientifique en philosophie et chroniquer au journal Le Monde. Il a publié plusieurs volumes dans ce domaine de la pensée dont La compagnie des philosophes et La compagnie des contemporains. Roger-Pol Droit, 107 exp€ériences de philoso- phie quotidienne, Paris, Editions Odile Jacob, Collection Poches no 105,2003.