a Le Soleil de Colombie, Vendredi 11 aoat 1978 Les lointaines retombées des explorations de Vancouver Par Alexandre Spagnolo Président du Cercle Fran- ¢ais de Coquitlam L’Ouest, d’un lointain né- buleux territoire, devint une vaste et incalculable sphére de colonisation et de déve- loppement. Ainsi, les grands travaux de Vancouver eu- rent une signification inesti- mable a leur juste valeur. Ces travaux se répartis- sent en plusieurs catégories: comme explorateur, Vancou- ver fit le relevée de la céte du Sud-Ouest de l’Australie et ajouta, aprés Cook, de nombreux noms a la carte du Pacifique-Sud. La cartographie était sa passion depuis ses premieé- res expériences aux Indes Orientales sous les ordres d’Alan Gardner. Ses délimi- tations et relevés de la céte nord-ouest de l’Amérique sont des chefs-d’oeuvre. Edward Heawood et le Professeur George David- son, de l'Université de Cali- fornie, rendirent un impres- sionnant hommage 4 |’oeu- vre de Vancouver. Vancou- ver, disent-ils, joua le réle d'une abeille transportant le pollen, il laissa dans les lointaines iles et terres, des semences, graines, outils et animaux domestiques; mieux encore, il propagea des idées. A Hawaii (les Sandwich), il introduisit le concept de la justice et de l’ordre social, la non-croyance aux idoles. Il fit faire des progrés a la science de la navigation. II entrevit la future grandeur du vide des rivages conti- nentaux, qui auront de grands ports dans un proche avenir, notamment sur la céte nord-ouest: le port de Vancouver en est une preu- ve. Vancouver n’eut pas de Janvier-Mars 1794 aux Tes Sanwich.Les indigénes sont enchantés de frayer avec les équipages du “Discovery” et du “Chatam” du Capitaine Vancouver femme dans sa vie, ses années furent passées sur les flots, il n’a presque pas connu de confort. Vingt- deux années de ses quarante années furent, disions-nous, Etranglés par la récession par Dieter BUHL traduit de l’allemand par Leon HURVITZ] (Suite) BATAILLE DEFENSIVE ET CONSTANTE. Les francophones se sont constamment trouvés en ba- taille défensive. Le pacte qu'ils conclurent avec les pionniers _ britanniques contre les arrogants révo- lutionnaires américains, et qui prépara le terrain pour la création du Canada, ne leur a pas apporté des avantages trop stables. La Belle Province est dépuis déja longtemps un ilot soli- taire au milieu d'une mer anglo-saxonne. Les cing mil- lions de Québécois franco- phones constituent, par rap- port aux 250 millions d’an- glophones qui habitent le continent, une minorité infi- nitésimale. Alexis de Toc- queville, philosophe _politi- que du siécle dernier, voyait la situation avec d’autres yeux lorsqu’il constata que “tout parle francais’. Au- jourd’hui, mis a part le Québec, c’est seulement dans quelques régions du Manitoba que la langue fran- caise est toujours vivante. {M. Buhl est évidemment mal informé. —— Tr.] Afin de sauver la langue, le PQ a fait passer la Loi 101, qui contraint les Anglo-Sa- xons résidant au Québec, qui jusqu’ici, motivés soit par Varrogance, soit par la pa- resse, ont refusé d’appren- dre la langue frangaise, de devenir bilingues. Puisque l'anglais est mal- eré tout l’idiome courant de ‘a direction de toutes les grandes sociétés “‘ano- nvmes”, ladite loi n’a fait quaiguiser une tendance dé- ja assez dangereuse: plus de 140 firmes ont déplacé leurs eentrales au dehors du Qué- bec, de sorte — que les per- tes imposées a la population de la province par cet exode ont doublé au cours des derniers mois. En dépit des inconvé> nients économiques provo- qués par sa politique, le PQ adhére a son but: le Québec doit avoir un statut spécial. Au bout d’un processus as- sez prolongé, M. René Lé- vesque envisage sa patrie liée au Canada par un pacte, qui correspondrait “plus ou moins a‘celui du Conseil Nordique, des pays du Béné- lux ou de la Communauté Economique Européenne”. D'ici l'année 1980, les Québé- cois auront a se pronon- cer dans un référendum sur le futur statut de leur pro- vince. Pourtant, les sépara- tistes n’ont aucune raison d'avoir des espoirs exagérés. Car, actuellement, il n’y a que 25% des francophones qui se déclarent sans équi- voque pour la sécession. sur les mers et les océans. Il n’a jamais été “caressé” sur le dos par les autorités La devise des péquistes est celle de la “souverai- neté-association”, dont le contenu reste, pourtant, va- gue. Méme le premier minis- tre ne se laisse pas clouer a une définition précise de son but. Bien différente de son attitude est celle du chef de cabinet dans l’important mi- nistére des relations inter- gouvernementales. Plus que tous les programmes, c’est Mme Louise Baudoin qui incarne le réve des Québé- cois. Petite femme deélicate aux cheveux coupés court, aux yeux verts scintillants et au tempérament enga- geant, elle pourrait assumer facilement le réle de Jeanne- d’Arc du séparatisme. Elle n’hésite nullement a présen- ter franchement, voire ingé- nument, son propre concept de la souveraineté-associa- tion. “Cela signifie que nous souhaitons regagner une part du pouvoir dans les do- maines social, culturel et scientifique, aussi bien que dans ceux de la politique, de l'éducation et des techniques administratives”. Les autres Canadiens sont-ils préts a britanniques, jamais honoré, jamais fété, peut-€étre, parce qu’il ne cherchait pas les honneurs. Si Vancouver avait plus longtemps vécu, on aurait pu se souvenir de lui comme de Villustre Horace Nelson (1758-1805), de Hardy et du reste des grands capitaines des mers et océans, parce qu'il personnifia l’esprit de la Marine Royale, la force de la’ discipline de fer, la recher- che de l'efficacité des hom- mes et du matériel, le tout, l'ensemble, tels que l’histoi- re de la Marine Royale britannique n’avait jamais connus. Mais son étoile était contre lui. En 1803, il était déja oublié. II ne fut pas, en 1809, le témoin ou le participant de la présomptueuse préten- tion que chaque port hostile de l'Europe pouvait étre bloqué par les navires de son pays. Plusieurs récits assez ro- mancés avaient été en ins- tance de publication mais les autorités britanniques en a- vaient arrété la publication, _ notamment ceux de quel- ques officiers des deux navi- res du Capitaine Vancouver, parce qu’ils étaient assez inéxacts et passablement farfelus... : Aprés la publication de la premiére édition de son “Voyage of the Discovery” avec un Atlas, les plaques de cuivre de ses cartes furent volées. Une édition fut pu- blige en 1799, une seconde en six volumes, en 1801. Une traduction en frangais fut _livrée au public francophone, en 1802. Pour les amateurs d’his- toire, il y a lieu de signaler les publications suivantes: --George Godwin “Vancou- ver a life” (1757-1798) Edi- tions Philip Allan (Londres) 1930. --Jean-Francois de La Pé- rouse (1741-1788) Voyage of the Discovery, Paris (1797) publié neuf ans aprés sa disparition dans le Pacifique. -G.H. Anderson: George faire ce jeu? “Les Anglo- Canadiens accepteront la sé- cession, parce que ce sont des gens bien pratiques.” Comment veut-on que ceux- ci comprennent les souhaits des francophones? “II nous faut leur expliquer, on ne peut plus clairement, que nous sommes une nation, que pour nous autres le gou- vernement national siége a Québec, non pas a Ottawa”. Conformément 4 ces pro- pos, Mme Baudoin se pré- sente a l'étranger —— com- me le font, d’ailleurs, beaucoup de ses compatrio- tes —— en se qualifiant de “Québécoise’”’, non pas de “Canadienne”. Cela ne-sem- ble étre que conséquent pour une femme habitant une province dont le premier ministre est accueilli en . France comme chef d’Etat. Le Québec se fait repré- senter a l’étranger par un réseau de 16 légations offi- cielles (tandis que les neuf autres provinces n’en main- tiennent ensemble que 24), réseau qui s’étend de Diis- seldorf jusqu’a Tokyo. C’est Vancouver, the life of a Norfolk Sailor (King’s Lynn) 1923. --Archibald Menzies: Jour- nal of Vancouver's Voyage 1792. British Columbia Ar- chives 1923. Victoria, B.C. -Edmond S. Meary. Cap- tain Vancouver’s Discovery of Puget Sound (New York) 1907. : --Alan Morley: Vancouver from Milltown to Metropolis. Editions Mitchell Press, Vancouver. Troisiéme édi- tion 1974. _ Les Lieutenants du Capitai- ne George Vancouver Si Vancouver n’eut jamais d’honneurs, il n’en cherchait pas d’ailleurs, ne fut jamais amiral. Voyons briévement ce que devinrent ses princi- paux lieutenants et collabo- rateurs, entrainés sur les bases de la discipline de fer du Capitaine Cook, -que, lui- méme, Vancouver recut de son illustre chef. Lieutenant Robert Barrie, d'origine américaine, com- battit les Francais prés de La Barbade, ile des Petites Antilles, en 1801, détruisit 17 navires effectuant le par- cours de Nantes a Brests. Lorsque Lucien Bonapar- te (1775-1840), critiqua la politique de son frére Napo- léon, et celui-ci en fit autant envers Lucien au sujet de son mariage avec une rotu- riére, ces dissensions obli- gérent Lucien a s’établir en Italie sous la protection’ du — Pape Pie VII, qui le fit Prince de Canino; quand Napoléon fit prisonnier le Pape, Lucien décida de fuir aux Etats-Unis; c’est alors, en cours de route (1810), | qu'il fut capturé en pleine mer avec son énorme butin? par la flotte de Robert Barrie. : Interné en Angleterre, puis relaché. Revit son frére “Napoléon, alors a I’'Ile d’El- be. Rentra en France au cours des Cents Jours et enfin mourut en exil en Italie. . : _ En 1819, Robert Barrie fut nommé au Haut-Canada, a- vec le rang de vice-amiral et le titre de“Sir”. - 1882, installa — 4 Paris — la premiére mission canadien- ne a l’étranger. A cette époque, le gouver- nement fédéral demanda au Québec d’assumer en méme temps la représentation glo- bale du Canada. Une telle idée n’entrerait plus dans Vesprit d’Ottawa. En tout cas, ayant a son dos les Québécois entétés, le gou- vernement du Canada ne poursuit que difficilement une politique étrangére co- hérente. L’époque ou les activités politiques sur le plan mondial catalysaient Vunité canadienne est révo- lue depuis longtemps. Les années de la création du sys- téme monétaire mondial de Bretton Woods, de !’Organi- sation des Nations-Unies et de l’'Otan représentaient lage d’or de la politique étrangére canadienne. En tant que grenier pour les ‘affamés du monde et expé- diteur de troupes de paix au nom de l’ONU, le Canada s'est fait mieux renommer que jamais. (A SUIVRE)