| fee rst een net ane “VOYAGES Le Soleil de Colombie, vendredi 19 janvier 1990 - 11 Le Havre, troisiéme port d’Europe Par Jean-Claude Boyer Train Bayeux-Le Havre, 24 septembre 1984. J’apercois une rare chaumiére normande, puis, a l’entrée du Havre (sur la Manche, a l’estuaire de la Seine), une grande roue de cirque toute illuminée. Les piles de mon baladeur s’épuisent au beau milieu de la toccata et fugue en ré mineur de Bach, au moment ot le train entre en gare. C’est ici que j'ai embarqué pour la verte Irlande le 31 aodt. Fort impatient, ce jour-la, de découvrir le vieux pays de saint . Patrick, je n’avais gardé du Havre qu’un vague souvenir. M’y revoiladonc, désireux cette fois de bien observer ce qui se présente a ma vue. Je me rends d’abord a ~ l'Auberge de l’UCJG (Union Catholique des Jeunes Gens). On accepte de m’héberger (5$) bien que je n’aie pas de carte de membre. Libéré de mon sac a dos, je m’aventure au hasard: des rues sous un ciel menagant. Repas léger «sur le pouce» dans un marché. Les commer- cants vantent leurs marchandi- ses d’usage courant avec l’éloquence zélée de prédica- teurs. Un grand panneau publicitaire me frappe: «LUS- TUCRU pour les félés des pates». Le nom de ce personnage fantaisiste (chan- son «La Mére Michel») évoque la menace qui planait sur nous, enfants, si nous osions rentrer a lamaison, le soir, apres |’heure convenue; le grand Lustucru nous «ramasserait» pour nous emporter dans son grand sac loin de nos parents. C’était a mes yeux une sorte de Pére Noél de |’enfer. J’approche maintenant, com- ’ me malgré moi, d’un étalage de cartes postales. Serais-je deve- nu «cartoolique»? L’une d’elles présente une chaumiére tradi- » tionnelle; au-dessus du toit: un * trou! La légende raconte, en alexandrins, les «vertus» du fameux... trou normand («faire letrou normand» : boire un verre d’alcool entre deux plats pour «creuser» l’estomac), «festin» rimant avec «trop plein», «Calvados» avec «plat en sauce». Derniers vers: «L ‘appé- tit retrouvé grace a ce vieux calva, vous serez frais et rose jusqua la fin du rpas.» Joyeux rappel de lanoce normande a la Maupassant: «On se mit a table a cing heures du soir; a onze heures on mangeait encore». La dréle d’expression «faire cul sec» (vider le verre d’un trait) se retrouve, bien sGr, au coeur de ce poéme immortel. La fatigue a vite fait d'interrompre ma chasse a linsolite. Le temps est a l’orage. Retour a |’auberge d’un pas lourd. Les fracas de tonnerres’intensifient. Je m’en- dors aisément, ce soir-la, indifférent aux foudres de Jupiter. Le lendemain, lever t6t. Café au lait et croissants. Puis longue promenade. Insérons ici quelques faits historiques. C’est Francois ler qui fonda ce port en 1517 - avant méme la découverte du Canada - sous le joli nom de «Havre-de-Grace». S’y dresse peu a peu une véritable «forét de mats». Le port regorge de _ produits coloniaux: coton, café, tabac, bois exotiques... Ces richesses sont redistribuées a travers |’Europe. En 1850, le «Franklin» parvient a faire la traversée New York-Le Havre en quinze jours... © Au cours dela Premiére Guerre, a la suite de l’invasion de la Belgique par |’armée allemande, Ste-Adresse (station balnéaire. du Havre) devient le siége provisoire du gouvernement belge... Le port est compléte- ment anéanti pendant la Deuxiéme Guerre, et la moitié de la ville détruite. Aujourd’hui, grace aux aménagements d’Au- guste Perret, Surnommeé «le magicien du béton armé», le port du Havre est accessible aux plus gros navires. C’est le premier port francais trans- atlantique et le troisiéme port d'Europe. Mes pas me ménent d’abord a la magnifique avenue Foch, qui s’ouvre sur le large par la «Porte Océane», symbole des liens étroits qui unissent le Havre ala mer. Pelouses ombragées diar- bres, constructions aux lignes horizontales d’une grande unité architecturale, sculptures néo- figuratives. Je respire profondé- ment lair frais du matin. Boulevard Frangois ler, chaus- sée Président-Kennedy. Cathé- drale Notre-Dame (XVie s.), église Saint-Joseph. Maison de la Culture et musée des Beaux-Arts André-Malraux, fort modernes. L’«Oeil», monumen- tale sculpture en béton. Regard prolongé sur la plage du Havre et de Ste-Adresse, étendue sur 2km. La-bas, entrée et sortie d’un long tunnel routier. En retournant a_ l’auberge teprendre mon sac a dos, je remarque sur les armes de la ville la salamandre couronnée de Francois ter. Grand étalage de cartes postales, de |’autre cétédelarue. Jen’y résiste pas. En voici une pittoresque: boite aux lettres belge! Une autre, aux dessins humoristiques, offre trois conseils pour bien se porter: «Prendre une cuite par mois, aller au trédne’ un coup par jour et au ‘petit bonheur’ une fois par semaine». Une troisié- me carte présente «la route des falaises», du Havre au Tréport, le long. de laquelle s’entassent plusieurs: petites photos. Sur une autre, assortiment de boites a fromage rondes: camembert, livarot, —_ pont- l’évéque... Je lis enfin la priére du Normand, illustrée par un couple recueilli, un pressoir, des pommes et des poules: «Mon Dieu, donnez-moi la santé pour longtemps, de l‘amour de temps en temps, du boulot pas trop souvent, mais du calvados tout le temps...» Amen. Vive la Normandie! ll faut maintenant que je me hate pour ne pas rater le prochain train pour Rouen. Ouf! juste a temps. Le _ Havre s’éloigne lentement, sous un soleil radieux de fin de septembre. Un compagnon de voyage havrais m’apprend que sa ville est la patrie des écrivains Bernardin de Saint- Pierre et Queneau, et du compositeur Honegger. J’y pense, c'est’ au Havre que mourut Octave Crémazie (1879), le chef de file du romantisme canadien. Au total, je garde du Havre le souvenir d’une grosse ville bourgeoise qui fait assez peu pour vous plaire. Et l’on concoit facilement qu’elle ait pu causer un certain ennui a Jean-Paul Sartre, obligé d’y enseigner la philosophie. S’en serait-il vengé en y écrivant LA NAUSEE? Apparait bient6t Rouen, pré- fecture de la Seine-Maritime. Liée économiquement au Ha- vre, elle forme avec lui Vavant-port de la_ région parisienne. Mais pour moi, Rouen a une toute autre dimension: elle est avant tout la ville natale de Corneille et de Flaubert, ainsi que le lieu du supplice de Jeanne d’Arc, patronne de la France. C’EST 8 SQUE! . E i} ALCOOL... TROP, ‘TROP SOUVENT, " VISITEZ NOTRE STAND SUR LES TRANSPORTS Pacific International Auto Show ~ BC. du 19 au 28 janvier 1990 Stands 309, 311, 313 Place Stadium Eee - Energie, Mines et Ressources Canada Lhon. Jake Epp, Ministre L’ENERGIE DE NOS RESSOURCES Energy. Mines and Resources Canada - Hon. 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