6 - Le Soleil de Colombie, vendredi 16 octobre 1987 Les indiscrétions d’Ani La premiére chose qui vous frappe lorsque vous débarquez a Montréal - hormis la température (le froid en hiver, le chaud en été) - c'est la circulation dans les rues, et la «relation d'amour» entre les piétons et les automobilistes. D’ailleurs, les autorités du tourisme québécois devraient faire imprimer une brochure «Comment éviter de servir de chair & pfte aux chauffeurs»; ce fascicule servirait 4 toute personne de l'ouest voulant s’aventurer sur le territoire québécois. Donc, dés votre arrivée sur le sol de la Belle Province - et plus particulisrement sur celui de Montréal - vous devez effacer de votre comportement vos habitudes de civilisés : votre pied au bord du trottoir sur un passage clouté ne fera jamais arréter un bolide lancé 4 70 Km a l’heure ou méme a lallure de la tortue. Le feu passe au vert, vous vous précipitez : lére erreur! Voila le moment od les autos prennent un plaisir a vous écraser les pieds; méme si le bonhomme vous invite a traverser vous n’étes pas, mais pas du tout, en sécurité. Vous attendez, seconde erreur, le feu rougit... et vous étes faits! L’alternative : changer de coin ou bien faire comme tout le monde, regarder a gauche et a droite et traverser la rue en sauve qui peut, passage clouté ou pas. La scéne des piétons coincés au milieu de la chaussée entre les deux voies me donne chaque fois des frissons dans le dos. Mais entre conducteurs, ce n’est pas la joie non plus. C’était un matin, 9 heures, au volant d’une voiture, mon feu vire au vert, je m’avance pour tourner a droite; venant vers moi un piéton dans les 70 ans - «Coutedon», c’est le matin, il faut beau, les oiseaux chantent, je prends mon temps. Mais tout le monde ne pense pas ainsi; le chauffeur derriére klaxonne tout son saofil pour que je coince le piéton. Autre aventure : a un arrét-stop que je fais, un automobiliste me rentre derriére. Il ne m’avait tout simplement pas vue. «C’est de ma faute», dit-il; encore heureux qu'il le reconnaisse! De telles situations, on en retrouve aussi & Vancouver, je n'insisterai donc pas, mais il y a une petite différence ici, et c'est la vitesse. En ville, on roule vite mais ce n'est pas si terrible - 4 part le boulevard périphérique ; l’angoisse, ¢a se passe sur les autoroutes; la vitesse maximale est limitée 4 100 Km, vous n’en verrez pas beaucoup qui restent sur la droite, tout le monde frise les 120, puisque la police ne sévira qu’au-dessus de ce chiffre. D'ailleurs un député québécois (propriétaire de maisons funéraires) a proposé que l’on remonte & ‘120 Km la vitesse maximale autorisée sur les autoroutes québécoises et la diminuer sur les routes secondaires. Les cyclistes, il y en a énormément au Québec puisque la Belle Province se classe aprés la Hollande dans le nombre de vélos; et lindiscipline de certains est flagrante, comme ce «sportif» qui remontait 4 contre-courant au milieu de deux files de voitures en pleine heure de pointe. Les policiers ont ordre de punir les contrevenants a vélo, 4 pied et au volant et de faire respecter le code de la route : stationner en double file c’est trés courant pour aller chercher son paquet de cigarettes, ou méme klaxonner en brillant un feu orange ou méme rouge. Mais le meilleur : les autorités municipales ont posé des panneaux au-dessous des feux tricolores «Attendez le feu vert pour passer»! Aprés avoir vécu plusieurs «trouilles», j'ai acheté une carte d’abonnement (28,50$) pour voyager sous la terre; je prends maintenant le métro et les autobus qui ont un réseau trés bien fait, je me sens plus en sécurité, ouf, du stress en moins! Le mouvement anti-fumeur qui s’est agrandi dans l’ouest canadien n’a pas encore atteint le Québec. La preuve : la mine idiote des restaurateurs lorsque je leur demande s’ils ont un coin non-fumeur dans leur établissement. Et pourtant ¢a vient petit a petit, mais ce sera difficile. Les nouvelles mesures d’interdiction de fumer dans les bftiments publics ne font pas que des heureux, certains fumeurs invétérés, employés dans des hépitaux ou chauffeurs d’autobus, «n’écraseront» pas de sitét; en plus, l'association des droits des fumeurs est bien partie du Québec. Aprés ces interdictions, c'est au tour de la prévention des incendies a prendre la reléve. «Quand le fumeur s’endort, le feu se réveille» est une campagne qui vient de débuter pour sensibiliser le Québec, parce que les statistiques parlent d’elles-mémes : sur 5 incendies, 1 est causé par un fumeur. En comparaison avec l'Ontario ot la population est bien plus importante, le Québec arrive épaule contre épaule quand il s ‘agit d'incendies, de décés, de blessés et de dommages matériels (8664,250,712 et 118 millions de dollars), causés par la cigarette. Les célébrités (politiques, de la scéne...) endossent cette campagne, mis A part René Lévesque évidemment. C’est toujours l'Ontario qui ramasse les gros lots : gagnants de millions 4 la loterie, méme les quintuplés viennent de naitre de nouveau en Ontario. On comprend les parents de cette nouvelle famille nombreuse qui préféraient garder l’anonymat : le traumatisme des soeurs Dionne est encore dans les mémoires. Mais rester incognito pesait trop, alors le papa et la maman, des cadres du fédéral, ont dévoilé leurs noms et leur adresse... Mais quelques jours plus tard, ils semblaient décus, la foule des journalistes ne se pressaient pas au portillon de leur demeure. Montréal est un grand village, on ne se marche pas encore sur les pieds, mais ce n’est pas loin. Le cercle des Vancouvérois exilés & Montréal s'agrandit mois aprés mois. Aller dans un magasin de futons sur la «Main» de Montréal et retrouver une futoniste de la rue Bidwell, dans le West-End; se cogner dans un restaurant de la rue St-Denis a un Franco-Colombien qui a joué dans une piéce au Centre culturel, ou bien rencontrer au Festival des films du monde une ancienne employée du pavillon du Canada sonédes exemples. Mais la meilleure, elle s'est passée a la fin du mois de septembre, dans une file d’attente devant un cinéma. Ce soir-la tous ceux qui avaient des notes de téléphones interurbains de plus de 15$ pouvaient avoir une place gratuite dans les cinémas Odéon. Derriére moi, un couple qui plaisantait, et comme le cuntact se fait trés vite ici, on a engagé la conversation «nos filles au Japon, a Vancouver...», j'ai sursauté et encore plus quand j'ai appris que celle qui vivait 4 Vancouver écrivait dans Le Soleil de Colombie, jétais avec les parents d’Esther Gagnier : la francophonie canadienne est une grande famille! Vous verrez peut-étre trés bient6t deux films européens en francais, l'un belge l’autre francais : «Noces barbares» et «Travelling Avant». Allez les voir, d’abord parce que vous ne perdrez pas votre temps et puis parce que la vedette masculine, Thierry Frémont, un comédien qui monte et dont on parlera beaucoup trés bientét, ressemble incroyablement a notre ancien coopérant, Charles-Henri Buffet. Vexillogistes : nom bizarre qui signifie amateurs de drapeaux et il y en a des honnétes et d’autres qui le sont moins, d’aprés le responsable des drapeaux a Ottawa. Lorsqu’un dignitaire politique séjourne ou traverse la capitale canadienne, les rues sont “pavoisées de drapeaux de son pays et sur les 200, plusieurs disparaissent en souvenir. Apparemment le plus convoité : la banniére étoilée des Américains. «Cats» est maintenant chez nous pour 14 semaines. Aprés avoir fait un malheur chez vous, ici la comédie musicale n’emballe pas, elle rendrait plutét sceptique, sur les 200 000 billets 900 000 ont été achetés. Le public francophone hésite : 45$ la place (plus les frais) c’est de l’argent! On nous a bien prévenus, la comédie est visuelle donc il faut avoir de bonnes places le plus prés possible de la scéne, et ce sont aussi les plus chéres. Les Francophones préférent, pour la méme somme, accumuler piéces de théftre (le choix est immense), comédies musicales en francais ou opéra-rock comme «Vis ta vinaigrette», «Pied de poule», ou méme «Napoléon» qui arrivera le printemps prochain avec Serge Lama. «Bonjour Docteur», que vous voyez vous aussi sur Radio-Canada, énerve bien des téléspectateurs québécois. La raison, l’accent «pointu» francais de certains comédiens. Comment la fille et la petite-fille d'un Québécois pure laine et. qui ont toujours vécu au Québec peuvent parler a la francaise? Parce que la maman est francaise. Mais une critique de télévision explique dans sa chronique qu’une personne qui a été élevée au Québec méme en allant au collége Marie de France n’a pas-cet accent. Le petit dernier de la famille l’a aussi, méme en plus prononcé. Il y a done beaucoup de Frangais dans cette série. En revanche, un patient, qui est Noir, avait un accent ce qu'il y a de plus Québécois. D’aprés la directrice des dramatiques de Radio-Canada, les accents devraient s’estomper; les comédiens vont peut-étre apprendre a parler avec l’accent de chez nous. LE SOLEIL DE COLOMBIE est 4 la recherche d'une personne bilingue désireuse de se faire un supplément de revenu dans la vente de publicité. Salaire 4 la commission. Faire parvenir votre C.V. au Soleil de Colombie, 3283 rue Main, Vancouver, C.B. V5V 3Mé. SONDAGE DEL'ASSOCIATION DE LA COMMUNAUTE GILMORE Voulez-vous communauté? «Gilmore Community Association's fait actuellement une recherche sous forme d'un sondage et d’un questionnaire qui sera distribué dans la région comprise entre l’avenue Wellingdon, la rue Union, la route Boundary et Burrard Inlet jusqu’au 20 octobre 1987. «Gilmore Community Association soutenu par «Gilmore Community School’4 et «Gilmore Community Council's demande votre implication. participer a J’organisatin de _ notre Pour obtenir plus d’information, appelez Marilyn Hosein au 298-2425. -EXPOSITION. Boris Volkoff Né de parents russes a Neuilly s/Seine, prés de Paris, il y a de cela quelques années déja, Boris Volkoff manifesta trés t6t son goat pour le dessin et la caricature, au point que ses manuels scolaires étaient plus «graffités» qu’étudiés... Ses dispositions pour la peinture le firent entrer aux Beaux-Arts de Genéveen 1945. — Ses dispositions pour la fronde I’en firent sortir premier de sa promotion... deux ans avant les autres! || etudia donc a Paris dés Boris Volkoff * 1949 avec le peintre russe Mané-Katz et a Academie de la Grande Chaumiere, tout en commengant Sa carriere de journaliste en 1950. Parti en 1958 faire le tour du monde ala voile, il organisa a chaque escale des expositions pour financer l’aventure: Vigo, en Espagne, en 1958; Iles Canaries : trois aLas Palmas en 1958 et 1959, une quatrieme a Santa Cruz de Tenerife en 1959. Apres avoir finalement traverse l’Atlantique, il jéete l'ancre aux Antilles ou il exposera de nouveau : Antigua en 1960 ; Ste-Lucie en 1961, Port of Spain (Trinidad) en 1962 ; la Barbade en 1962 et la Martinique en 1963 ou il signe alors un contrat avec un collec- tionneur qui lui prendra 40 toiles entre 1963 et 1964. ll emigre ensuite au Canada. Pris par son travail de journaliste, Boris Volkoff délaissera la peinture pendant de nom- breuses années, ne reprenant ses brosses et couteaux que tres episodiquement. Ce nest qu’en 1984 qu'il recommencera a travailler assez regulierement pour ensuite présenter une quarantaine de toiles, pres- que toutes non-figuratives, en novembre 1986 a Ville Mt-Royai. Il expose aujourd'hui un choix d’acry- liques et d’huiles de diverses tendances, car il a un défaut (qualité ?) : il aime tater de plusieurs genres tout en conservant cependant une unite dans ses fonds, géné- ralement foncés ou noirs. II laisse parler son imagination, son humour aussi, pour montrer dans ses oeuvres I'expression de ses désirs, envies, chagrin y ou frustrations. Car évidemment, il veut les faire par- tager! a * Boris Volkoff est le rédacteur en chef de «Circuit fermé», journal interne publié a lintention des employés du Centre de Produc- tion de Montréal de la société Radio-Canada. B. Volkoff expo- se ses oeuvres du 14 au 29 octobre ad la salle Raymond-David a Montréal. Alors si vous passez par la... Article tiré du «Circuit fermé» de septembre.