par Keith SPICER + Courtoisie du Vancouver Sun VICTORIA. Le ventre au soleil au bord de l’eau, vous sirotez votre biére et le spectre du cheik Yamani vous hante. Réveur, vous vous demandez si, aprés les prédictions du ministre du pétrole d’Arabie Séoudite sur la montée en fléche des prix de l'or noir, vous serez transformé en iceberg en 1985 ou seulement en 1990. Et puis vous vous souve- nez d’Alastair Gillespie. Vo- tre sourire revient, vous prenez un petit coup de biére et vous bénissez tout bas ce roi-soleil des temps modernes, le ministre cana- dien de I’Energie. Le 4 juillet, en deux communiqués habilement concoctés, M. Gillespie a éclairé d'un rayon d’espoir les Canadiens , frappés d@énergétite aigué; il appor- te aussi au parti libéral du Canada — quien avait déses- pérément besoin — une cau- se “dans le vent” pour aller a la prochaine bataille électo- rale, quand Pierre Trudeau et George Gallup décide- ront de la déclencher. Pourquoi une autre cause? Avec l'unité nationale et Dieu de leur cdté, les libé- raux ne pourront-ils pas se ménager encore un petit couronnement aux urnes? Non. Le sauvetage de la ‘nation et le droit divin a gouverner sont maintenant des points d’appui trop ris- qués. Les gens ont entendu le gouvernement crier si souvent au loup pour René Lévesque qu'ils entendent maintenant peut-étre plus de renards libéraux que de loups “séparatistes”. Qui plus est, un parti libéral qui en est réduit a s’enorgueil- lir d’étre seulement moins incapable que ses adversai- res manifeste une fatigue surprenante, méme pour un gouvernement au pouvoir depuis 15 ans. L’ascension au Québec du chef libéral Claude Ryan a également dilué le cocktail molotov de l'unité nationale pour les libéraux fédéraux. Trudeau et Ryan veulent tous deux “sauver le Canada” en ralliant les Qué- bécois et du coup on a un probléme a Ottawa: ily a deux messies au lieu d’un. Joe Clark, qui ces jours-ci se dore le nombril en France sur la Céte d'Azur, Joe Clark donc le sait si bien qu'il est en train de nous faire croire qu'il est le frére jumeau de Ryan, enlevé sans doute par une nourrice amoureuse d'un cowboy albertain. Avec tout cela, et avec les médiocres scandales qui es- cortent tout gouvernement vieux de 15 ans, M. Trudeau ne pourra gagner la prochai- ne élection que s'il imprime dans l'esprit du public l’ima- ge d’un parti a double préoc- cupation... mais 42 messie unique. Comme Janus; le dieu romain a deux visages qui pouvait voir le passé et l'avenir, M. Trudeau devrait se lancer dans sa campagne électorale en parlant conti- nuité (sa constitution remise au gout du jour) et crois- sance (l’énergie). L’accueil favorable réservé aux décla- rations plutét prosaiques de M. Gillespie démontre que le meilleur moyen d’escamoter Vimage d’un parti sans éner- gie ni imagination, c’est jus- tement de parler énergie produite de fagon imagina- tive: soleil, déchets, marées, vent, et méme la terrifiante énergie nucléaire. Voyez comment M. Tru- deau pourrait manoeuvrer Vouverture énergétique de M. Gillespie: e ravitaillement garanti: si la multiplicité des sources d'énergie (pétrole, gaz natu- rel, charbon, hydroélectrici- té, atome, vent, marées, “biomasse”) est montée en épingle, les Canadiens au- ront le sentiment rassurant qu'un gouvernement prévo- vant prend bien soin de ne pas se brancher sur un seul circuit afin que nous ne nous retrouvions jamais coincés par, disons par exemple, un embargo sur le pétrole dé- erété par l'OPEC; © bénéfices économiques: avec un éventail de dix sources d’énergie environ, le L’ombre du ciel par Roger DUFRANE “Arbre, grand arbre, om- bre des cieux...” J'ai tou- jours trouvé trop d’emphase a ce vers de Paul Valery. Et pourtant, ce vers ramasse, avec originalité, la splendeur des arbres; qui se nourris- sent de terre et d’azur. J’ouvre les tentures du salon. Le ciel bleu, strié de fins nuages, est traversé par un vol d’oiseau. Hors ce signe de vie, tout dort encore en ce dimanche ma- tin. En face, les maisons, peintes comme des jouets, se baignent d’ombre et de lu- miére. Nul bruit ne vient de avenue ov tantét rouleront les autos. L'arbre du trot- toir, dont le feuillage décore ma grande fenétre, agite a peine ses feuilles vertes et argentées. Arbre splendide! En quel- ques années, son tronc squa- meux, aux reflets mauves, a quintuplé de volume. Ses racines, j'allais dire ses ten- tacules, viennent déja bosse- ler mon jardin et la tondeu- se s'y heurte. Ses branches, chant de gloire vers l'azur, se vétent d'un somptueux feuillage. Je n’ai pas vu pousser le géant du trottoir. Tout au plus; 4 de rares intervalles, lui ai-je jeté un regard et lui ai-je dit, comme a un enfant qui vous dépasse: “Tiens! Comme tu grandis!”. Cette eréature bocagére méritait plus de considéra- tion. Elle vit de toutes ses fibres. D’année en année, elle déploie des costumes de plus en plus chatoyants. Vienne I'hiver et l’'arbre s’at- triste. Dépouillé de ses feuil- les, luisant de pluie ou cra- quant de froidure, il médite dans l'ombre qui l'environne et il finit par se dire: “Que faire pour continuer a plai- re? I] n'est pas bon de perdre le goit de l'existence. Il faut essayer de rester gai pour égayer les yeux.” Alors, surmontant son apathie, l'arbre se vét de neige. Il prend des poses insolites, figées et pourtant transitoires, féeriques. Et soudain le Printemps redescend parmi nous. Pour sa bienvenue, l'arbre se pare d@habits neufs. Une myriade de fleurs roses le trans- forment en gigantesque bou- quet qui flambe au soleil. La grande fenétre du salon se mue en un immense tableau rose sur fond bleu, une oeuvre a trois volets mou- vants, car la nature poursuit son cours. Bientét, la pelouse cache ses verts sous les pétales. Mon voisin tique des yeux et brosse furieusement avec son rateau de bambou les intruses. II disparait, revient porteur d’une échelle, y grimpe et le voila mainte- nant qui ratisse ses gouttié- res. Va-t-il, dans un dernier sursaut de colére et d’éner- gie, grimper 4 l’arbre et secouer les derniéres fleurs? Non! Il hoche la téte, mar- motte un “Dammit!” et ren- tre dans sa cambuse en bou- gonnant. Quant a moi, je laisse le peintre des jours fignoler a V'aise son oeuvre infinie.. Monsieur le Printemps d6te aux branches de plus en plus de rose qu’il ajoute 4 mon gazon. La vie est un per- pétuel changement. Le Canada peut choisir la moins chére lorsque les change- ments dans les réserves mondiales ou les nouvelles techniques font valser les prix. Si nous nous libérons de l’emprise des fournis- seurs étrangers, notre pi- teux dollar pourra faire meil- leure figure en Floride et a Hawaii; e emplois dans les tech- niques de pointe: a lui seul, le programme d’amorcage relativement modeste de M. Gillespie créera, selon son auteur, 39,000 années-hom- — me de travail sur les sept ans a venir. En nous pla- cant parmi les pionniers avec la seule énergie solaire (nous sommes en téte, sur le plan mondial, avec l’énergie électrique d'origine nucléai- re), nous pouvons offrir a des dizaines de milliers de jeunes Canadiens de nouvel- les carriéres stimulantes dans les laboratoires et les usines; e souci de l’environne- ment: Ottawa subventionne déja des projets modestes dans le domaine du vent et celui des marées; en aidant les petits inventeurs qui veulent capter I’énergie du soleil ou de la combustion des déchets, nos dirigeants prouveront aux amoureux de la nature qu'un gouverne- ment qui massacre les bébés phoques n’est pas entiére- ment dans les mémes draps que les magnats — inhu- mains dit-on — du Big Busi- ness; © neutralisation des tories les conservateurs de Joe Clark sont déja a l’assaut de . (énergie solaire, mais ils ne possédent pas I’énergie poli- tique pour mettre la ques- tion en valeur. Désormais temps approche ot l’arbre redeviendra vert. C’est alors que ses verts prendront les tons les plus_intenses, sur- tout (cela arrive), sous la pluie. Aprés les canicules, |’ar- bre changeant va s’épanouir’ en apothéose dorée. “Te rappelles-tu, me demandera- t-il, le costume rose de mon printemps? C’était au temps ott je folatrais avec les moineaux. Deux enfants jou- aient 4 mes pieds. Deux oisillons tombés des nids s‘essayaient au premier vol. Derriére le carreau, le chat noir gringait des dents. Et me voila maintenant en ha- bit d'automne, me pavanant a tes yeux avant que tu te retires parmi tes sales bou- quins. Les bises vont me redépouiller. Tu m’en,verras tout marri. Mais je sais ce qu'il en est. Aprés la pluie, le beau temps. N’oublie pas: Je. renaitrai vétu de vert, vétu de rose, vétu d’or. Je jon- glerai avec les moineaux. Mes feuillages chanteront dans la lumiére. Et toi, et moi, nous serons tous les deux un an plus vieux. les libéraux peuvent — fort injustement mais avec une efficacité dévastatrice — se présenter comme les mis- sionnaires du progrés, les tories n’étant bons qu’a en- tonner des amen; e long terme égal longé- vité: le vieil argument-mas- sue du gouvernement — le droit divin 4 gouverner — perd du terrain mais lors- qu'on parle énergie il faut 20 ou 30 ans pour mener a bien toute planification: dans no- tre subconscient une petite voix sussure qu’ il faudrait que les gars qui ont com- mencé ces exotiques projets puissent les finir. Nous y voila donc: la formule Janus pour nous garantir encore un siécle ininterrompu de pouvoir li- béral. L’énergie dominera les 20 prochaines années de la vie politique canadienne tout comme la constitution a occupé les 15 années pas- sées. Et le parti qui rafle la nouvelle cause aura du mé- me coup, a chaque déclic dinterrupteur et 4 chaque démarrage d’auto, la recon- naissance des consomma- teurs d’énergie per capita les plus gourmands du glo- he: nous, les Canadiens. Alors, le ventre au soleil et une Brador a la main, fermez les yeux et pensez a Alastair Gillespie. Les libé- raux ont déja engagé les services de Dieu. Si Gilles- pie arrive 4 persuader le soleil d’en mettre un aussi hon coup pour son parti, il pourra peut-étre prendre la reléve quand le premier ministre Trudeau se retire- a, en l'an 2000... 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