ENS TEES OSS ta Le Soleil de Colombie, vendredi 14 janvier 1983 —5§ Un univers d’anachronismes Suite de la page 1 En vingt-quatre heures, les jeux sont faits. On me remet un passeport visé d'une auto- risation de voyager dans plus de 10 villes, avec la possi bilité d’en rajouter en cours de route. Marée de vestes prolétariennes Vian! D’un coup séc le time machine ferroviaire vous - transporte brusquement dans cet univers d’anachronismes comme si Marco Polo atter- rissait & Montréal aujour- d'hui. Dans la grisaille de ce matin d'hiver, sans cerbére a ses trousses on écarquille les yeux comme pour mieux voir cette énigme de vivre commu- ne a chaque peuple: marée de vestes prolétariennes vertes et bleues, ruées de foules vers les bus, grincement des carrioles tirées par l’effort des bras, vieillards accroupis sur les talons, odeurs fétides de vian- de, arémes d’ épices. . En retour ces visages incré- dules et troublés scrutent vos cheveux bouclés et votre long nez. Péril blanc, envahisseurs dhier, pourquoi sommes-nous soudainement devenus amis? Cette amitié Monde-Chine on l’a encadrée, comme tout le reste, dans 90 villés’ permi- ses de Chinois endimanchés, a l'abri d’une Chine rurale qui créve dans ses haillons; au sud de Shanghaf, il n’y a pas de chauffage dans les batiments Vhiver et les campagnes sont forcées d’acheminer _ leurs meilleurs légumes verts vers les centres bureaucratiques et touristiques. C’est dans les sentiers inter- dits de la Chine qu’on s’esto- maque. A Heng Yang, par exemple, les policiers ne se sont pas génés pour balayer de leur “Circulez, circulez” les badauds attentifs a la conver- sation anglaise que j'avais avec deux étudiants chinois; aussi humili¢e que mes amis, comme un enfant pris en fla- grant délit, téte basse, j'ai suivi la foule. Intoxication psychologique Encore faut-il comprendre que la Chine a beau jeu d’entretenir l’écart entre le peuple chinois et le monde: démystifier la Chine dans lesprit occidental serait peut- étre le prélude a un effondre- ment politique. En plus de cacher un état de pauvreté et de stagnation économique honteux, le périmétre interdit révéle un conservatisme étroi- tement lié 4 la continuation de l'intoxication psychologi- que du passé. Cette rencontre avec un étudiant dans la gare de train d'une cité interdite avait quel- que peu bouleversé mon sé- jour en Chine. Soucieux d’adhérer a la consigne d’accueillir chaleu- reusement les étrangers sur son passage, mon nouvel ami offre la maison de son oncle comme refuge en attendant le train de soirée. I] s’en est fallu d'aussi peu pour que nous nous retrouvions devant une table bien garnie entourés des voisins éberlués, A peine avons-nous franchi la porte pour une courte pro- menade qu'un gros bolide noir s'arréte devant nous. Dans un parfait anglais une des quatre personnes s’identi- fie comme étant le représen- tant de l’agence de voyage Luxingshe; il veut voir mon billet de train que j'ai acheté aux guichets du peuple plutét qu’au Luxingshe afin d’éviter le supplément de 70% imposé a l'étranger Doublement hors-la- loi, sueur froide au front, je me voyais déja au cachot. Pourtant pas un clignement d’oeil. Le soi-disant agent de voyage ne connaissant étran- gement pas la différence entre un billet vendu par son agence et un billet de train vendu au peuple chinois fait plutét figure d’agent de sécurité publique. L’universitaire chinois a disparu et je suis réexpédiée a la gare de train frigorifiée. Comble de malheur je le revois dans le train ce soir 1a et il m’apprend qu'il s’en tirera avec une dénonciation publi- PAR LES FABULEUX FORFAITS DE SKI VIA A BANFF. Imaginez-vous dévalant les pentes des Rocheuses canadiennes. 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Il se cache derriére des milliers de carreaux de fenétres crasseux des monsieur . Wen comme celui que j'ai rencontré a Pekin. Fils unique issu d’une famil- le autrefois bourgeoise, mon- sieur Wen, mécontent du régime politique de son pays, révait depuis la mort de son’ pére en 1973, d’aller étudier “pendant un certain temps” au Canada. Notre premiére rencontre m’avait laissé bou- che bée. Inquiet de ne pas éveiller les soupcons des autorités, monsieur Wen portait cravate et complet, se faisant ainsi passer pour un homme d’af- faires japonais lorsqu’il fran- chissait les remparts de mon hétel. Sa bienveillance et sa sollicitude a l’égard d'une Canadienne avaient toute leur raison d’étre. Invitée a la table des Wen, il y avait de quoi s’étonner en voyant le téléviseur couleur, obtenu en fraude de Hong Kong, trancher le décor mo- deste de vieux lit enfoncé, de _ miroir bigarré et de chinoise- ries. ~ SITU AS CEQUIL —. FAUT... ~™“IMBATTABLE”.. LA VIE DANS} ESF FORCES. avec des Mesiedie Pete: de chef. Si tu as ce qu’il faut, tu peux recevoir un entrainement au sein du personnel navigant Voyages Demander a un Chinois ce qu'il pense de sa Chine et de son Mao c’est comme deman- der & un cancéreux a quoi ressemble sa douleur. Réveil brutal a la réalité, colére réprimée, silence transparent et amer collé au coeur, pour- tant ce soir-la, monsieur Wen se confie en racontant l’incro- yable récit de sa famille éprouvée et victime du régime politique. Cédant aux priéres de monsieur Wen, je rédige une lettre qui sera envoyée au gouvernement canadien. Avec plus d’audace encore, flanqué entre deux Canadiennes, ac- croché a nos bras pour dé- jouer les sentinelles, il traver- sera la barriére de l’ambassa- - de du Canada a Pékin. La "On s’estomaque sur les sentiers interdits de la Chine Ls lueur d’espoir sera de courte durée puisque non seulement c'est la bureaucratie chinoise installée a Hong Kong qui digere les cas d'immigration, mais encore on a “temporai- rement égaré” le dossier Wen! En 1983 seule la légende subsiste de l’époque des pous- se-pousses, des d’opium et des riziéres candides. Dans’ les villes le silence de cellu- les libérales gronde fébrile- ment. L'intelligent et vif es- prit chinois mirirait-il une autre révolution, celle de l’embourgeoisement? En attendant, il ya quel- ques jours & peine j'apprenais que monsieur Wen se dé- brouillait de mieux en mieux en anglais, surtout depuis son arrivée au Canada. ainsi qu’un salaire en méme temps. Enfin, tu entreprendras une carriére sire, peu égalée dans le civil. -PENSES Y VIENS DONC JASER AVEC ° NOUS WRZ 19F ° COMMANDANT CENTRE DE RECRUTEMENT - DES FORCES CANADIENNES “Centre de Recrutement” 547 rue Seymour Vancouver, C.B. Téléphone: 666-3136