a Sa A SS SS En juin 1790, le navire, forte- ment armé, était prét a appareiller mais a l’autre bout du monde, sur les cétes du Pacifique, un commandant espa- gnol, Don Esteban Martinez, capture plusieurs navires marchands anglais, ce qui, bien sir, déplut fortement au roi George III. Ce bon roi, vexé dans son amour propre, exige un dédom- magement a |’ Espagne qui refuse. Nous sommes prés d’un affrontement armé. L’ Espagne, ne pouvant recevoir 1|’ap- pui de la France, alors en pleine révo- lution, accede aux requétes de 1’ An- gleterre. Cela se terminera le 28 octo- bre 1790, par la convention de Noot- ka, qui laissera le champ libre aux anglais. Le 14 décembre 1790 le «So- lide» quitte enfin le «vieux port» de Marseille et, aprés huit mois de navi- gation, aborda nos cétes le 7 aoiit 1791 et jeta l’ancre a Sitka (Alaska). Le 23 aoiit 1791 Etienne Marchand visita les Iles Charlotte et fut ébloui par la beau- té des lieux et l’amabilité des autoch- tones. Pendant que ses marins ache- taient les fourrures tant convoitées, Etienne Marchand établit les premié- res Cartes détaillécs des cétes des Iles Charlotte. La traite des fourrures n’est pas chose simple, le choix des articles a échanger est déterminé par la nature des besoins des amérindiens. Les car- gaisons de traite se compose générale- ment de fusils, poudres et autres munitions, de couvertures, d’étoffe de laine, mais aussi il faut des boites de biscuits, du riz de la mélasse et surtout des spiritueux. Accompagnant tout cela, des haches, limes, couteaux, miroirs, bijoux ct autres tissus de toile comple- tent l’attirail nécessaire 4 une bonne transaction. Un fusil paie générale- ment une belle peau. La valeur de la poudre varie, il en faut rarement plus de douze livres pour servir d’équiva- lent a un fusil et souvent huit suffisent. Les échanges dans lesquels on em- ploicles lainages sont beaucoupmoins avantageux. Etienne Marchand sait tout cela et ses contacts fréquents avec les natifs de ces contrées lointaines le renforce dans |’idée qu’il faudrait, dans l’avenir, entretenir avec eux un com- merce plus suivi. —_ ETIENNE MARCHAND (Suite de la page 1) Notre aventurier, fervent roya- liste, avait un jeu dont il se régalait souvent; chaque fois qu’il rencontrait des amérindiens il criait avec un en- thousiasme non dissimulé: «Vive le roi», et ses interlocuteurs le répétait avec joic, ce qui le remplissait de fier- ié et d’orgueil. Etienne Marchand et ses offi- ciers continuérent a explorer le Pas- sage de Parry et envoyérent une cha- loupe, sous la responsabilité de son second Posper Chanal, longer la cote jusqu’& Rennel Sound. Chanal donna trois noms qui existent toujours: «Otard Creek» en souvenir de I’un de ses amis, «Port Louis» en l’honneur du frére d’ Etienne Marchand et, comme on est jamais micux servi que par soi-méme, appcla le troisiéme site «Port Chanal». Notre navigateur espérait, en venant sur les cétes de 1’ Amérique du Nord, faire une grande provision de peaux, mais lacueillette s’avéra moins fructucuse que prévuc. Les Anglais, désormais chez eux, et surtout les Américains qui ne reculent devant rien, avaient déja essaimé la céte. Un jour, par temps clair, il vit, prés de Barclay Sound, un navire concurrent qui se dirigeait vers le sud, se donnant |’air de savoir ou il allait, Etienne Mar- chand entreprit de Ie suivre, pensant trouver de nouvelles sources d’appro- visionnement en fourrures. I] changea vite d’avis et prit la décision de quitter ce lieu idyllique pour la Chine. Vol. 4 no 2 LE COURRIER DE LA SOCIETE D'HISTOIRE, Juillet 1991 Le «Solide» quitta, avec nos- talgie, ce verdoyant éden, le 8 septem- bre 1791 et mit le cap, toutes voiles _dehors, sur Macao, alors possession portugaise. Il arriva dans ce haut licu de la contrebande le 27 novembre et se ré- jouit de ne point trop voir d’autres navires concurrents, ce qui aurait occasionné une importante baisse du prix des peaux. Aprés avoir rechargé toutes sortes de marchandises, notre naviga- teur sans fatigue reprit la direction de son port d’ attache. L’arrivée du «Solide» 4 Tou- lon, le 14 aoiit 1792, fit sensation! Etienne Marchand avait quitté une France monarchiste et revint natu- rellement en arborant les couleurs du roi, quel ne fut pas son étonnement de découvrir un nouveau drapeau et une «nouvelle» France. Mais les Frangais lui pardonnérent vite et firent de lui un héros national car il fut le premier capitaine de la marine marchande de la France... républicaine. Patrick B. de Montmorency Neda Majzub Suzanne Tremblay Sources: Collection de Margaret Waddington Journal de Pierre Roblet LI a1quiojop =p T1910¢ oF