- 6 Le Soleil de Colombie, Vendredi 29 Juillet 1977 LES FRANCOPHONES Léonce GAUDREAULT Par: MANITOBA—We will not be bussed, never... on n’est pas des noirs”’. Il ne s‘agit pas 1a de propos tenus par des Américains de la majorité blanche mais ceux de parents franco-manitobains qui s‘opposent a ce que leurs enfants inscrits a une école bilingue soient déplacés vers une école plus éloignée afin de permettre de transformer leur école en institution d‘en- seignement francais pour les enfants de parents qui croient que l‘école bilingue est finale- ment I’un des meilleurs instru- ments d’assimilation des fran- cophones 4 la majorité anglo- phone. Aux Etats-Unis, on connait les oppositions a |'utilisation du transport scolaire (bussing) comme moyen de _ permettre Vintégration raciale. Au Ma- ‘ nitoba, certains parents fran- cophones opposés a la franci- sation des écoles se servent de cet argument pour contrer la lutte menée par les élites franco-manitobaines pour des institutions d’enseignement en francais. Ils utilisent aussi,tout comme le font les anglophones du Québec, |l’argument de la liberté de choix des parents pour la langue d’éducation de leurs enfants. Aprés quelques années d’ex- périmentation, la majorité des éducateurs franco-manitobains (enseignants, commissaires) en sont venus a la conclusion que l'école bilingue menait directe- ment ce groupe déja fortement minoritaire ( 4 o/o) a I'assi- milation. A cette voix, s'est ajoutée celle de la Manitoba Teachers Association qui elle aussi a reconnu ce phénomeéne en appuyant la position des éducateurs francophones. C’est aussi la lutte que méne la So- - ciété franco-manitobaine (SFM) en réclamant J‘institution d’un systéme éducatif francais total et autonome. ; Chez les quelque 20 o/o de parents actifs, les deux tiers sont maintenant convaincus du danger d’assimilation et soutien- nent l’objectif de l’école fran- gaise mais cela ne suffit pas a amener le gouvernement a prendre carrément position en ce sens. a SO me i re or i OT ee ne EE er ent ee ee eee mm Oy AU MANITOBA LA CRISE DES ECOLES Premier d’une série d’articles parus dans “Le Soleil” de Québec. Ces reportages sont le reflet d’une réalité franco- phone hors Québec, _ telle qu’elle apparait au journalis- - te Léonce Gaudreault, de Québec. (Le Soleil, 29 avril 1977) Le parti au pouvoir gouverne : avec une majorité simple mais i voudrait que les francophones soient unanimes avant de leur ‘ accorder ce qu’ils demandent. i en fait, il ne veut pas intervenir au niveau des commissions sco- laires, 4 majorité anglophones, pour les forcer a suivre la voix de la majorité des parents. Dans une récente directive du ministre de l’Education, les commissaires ont trouvé ce qu’ils souhaitaient: ils demeu- rent les maitres de la situa- tion. Ils ont la certitude qu’ils ne se feront pas faire le “coup de Sussex”, c’est-d-dire que le gouvernement du Manitoba n’‘adoptera pas— comme l'a fait |'Ontario dans un cas— une législation spéciale visant a forcer une commission sco- laire 4 mettre en place une école francaise. © Le ministre de la Santé, Lau- rent Desjardins, est lui-méme convaincu de la nécessité de lécole francaise pour contrer la forte tendance actuelle a l‘assimilation mais il s’oppose a ce que les défenseurs du programme “A” (enseignement 4 80 o/o en francais) forcent ceux du “B” (enseignement bilingue), méme s’ils sont mi- noritaires, 4 se rallier. Comment pourrait-il le faire quand |’une de ses propres filles, du reste mariée 4 un anglophone, méne la lutte pour les “B’’. On imagine trés bien les déchi- rements profonds et les drames familiaux que cette lutte ap- porte chez les franco-manito- bains. Les “B” sont accusés par les “A” d’étre des assimi- lés inconscients. Mais ce n’est pas comme ¢a, affirme M. Desjardins, qu’on va les con- vaincre. Assimilés, ils le sont en grande partie. Leurs en- fants parlent constamment an- glais, partout, a I’école, dans la rue, 4 toutes leurs activités sociales... et 4 la maison. L’ap- prentissage de l'anglais ne re- présente pas un probléme pour eux et, pourtant, ils continuent a réclamer I’école bilingue. DE CRISE EN CRISE La Société franco-manitobaine vit de crise en crise pour sa ‘survie. Aujourd’hui, c'est la crise de \’école du Précieux- Sang, hier c’était celle de St- Norbert, avant-hier celle de ‘école Taché, etc. A cette derniére école, qu'on avait di fermer a cause de |'occupation des parents, tout est rentré dans l’ordre en septembre der- * gh PRGwesae nier.Sans tambour ni trompette, cette école est devenue une institution francaise. St-Norbert une autre institution de niveau élémentaire et secondaire de St-Boniface, deviendra elle aussi une école du programme “A” lorsque sera terminée la cons- truction de ses nouveaux lo- caux. ~ Aujourd’hui, c'est I’école du Précieux-Sang— toujours a St- & Boniface — qui fait la convoi- tise des défenseurs du program- me “A”. La lutte menée contre ia commission scolaire et contre le gouvernement de M.Schreyer $ est extrémement vive et risque fort de faire perdre 4 ce gouver- nement NPD le petit appui de la minorité francophone qui lui avait été accordé lors de deux élections antérieures. Une marche sur le palais 1é- gislatif de Winnipeg le 22 mars n‘a pas réglé le problée- me. Depuis la récente rencon- tre, avortée, que devait avoir le premier ministre avec les représentants des franco - manitobains, les ponts parais- sent définitivement ‘coupés.Et ce n'est pas la perspective . d’élections générales dans cette province, prévues pour juin, qui devrait améliorer les choses. Mais cette lutte pour la survi- vance ne se méne pas qu’a I'école du Précieux - Sang, elle doit aussi se faire au Col- lége de St-Boniface. Selon le professeur d'histoire | Robert Painchaud, l'avenir du frangais au Manitoba dépend de I’avenir du Collége de St-Boniface.Mais méme Ia, les effets de |'assimi- lation peuvent étre sentis. Dans la cafétéria, on entend souvent des jeunes francophones se parler entre eux en anglais. Ce phénoméne est diailleurs parfois constaté au centre cul- turel des franco - manitobains. Un article du Winnipeg Free Press publié |'été dernier par ce quotidien qui n’a pas la réputation d’étre favorable a la cause des francophones a- vait sonné I'alarme et obligé la direction de \’école et les professeurs 4 chercher a mettre en vigueur un réglement, daté de 1973, obligeant les étudiants a parler francais partout a l'école. “Winds of assimilation” titrait le quotidien sur le Collé- ge communautaire de St-Boni- face qui occupe le méme im- meuble que le Collége univer- sitaire. Les étudiants nous arrivent déja assimilés, nous confie La- val Cloutier, l'un des dirigeants du collége. Assimilation psy- chologique surtout. Ces étu- diants sont pour la plupart passés par un systéme d’édu- cation anglais, principalement au niveau secondaire. wt vogue la galere! A CHICOUTIMI: Par Leila Lecorps Au coeur de Chicoutimi - (Québec), il existe une maison a la recherche du temps perdu. Sise au’ 669, avenue Taché, la petite maison blanche avec une véranda de bois en avant, toute recroquevillée sur elle- méme, ressemble 4 une mai- son-araignée. C'est le domaine d’Arthur Villeneuve, peintre canadien consacré par la critique in- ternationale. Il y a recons- titué l’atmosphére d’un album d’enfants. Les meubles, les parquets, les murs et les pla- fonds sont peints de grandes fresques naives aux couleurs vives et attrayantes. II s’agit cependant d’une fausse nai- veté car les peintures de Villeneuve, artiste authen- tique, racontent I’histoire de homme 4a travers le temps. Tout est peint depuis 19 ans, sauf deux chambres. Entre la cuisine et le salon, a l'entrée, des panneaux cou- lissants sont décorés de pano- ramas-urbains stylisés. En haut, les chambres mi- nuscules recélent des trésors colorés. Destoiles évaluées a des milliers de dollars or- nent les murs. Des coffres, de jolies commodes et coiffeu- ses anciennes sont également a I'honneur. De beaux cou- vrelits et des courtepointes sont visibles. Arthur Villeneuve, né en 1910, fut barbier pendant 30 ans, En avril 1957, le peintre- barbier commenca 4 peindre sa maison qu'il ne termina qu’en octobre 1958. Il est 4 noter que la maison aura 100 ans dans 8 ans. Il s‘est octroyé 15 ans pour devenir célébre et c'est ce qui est Cet espace est acheté par le Secrétariat d’Etat. Les textes qui s’y trouvent sont publiés dans les 14 journaux mem- bres de l’Association de la presse francophone hors Québec, APFHQ. - arrivé. La maison d‘Arthur Ville- neuve peut aujourd’hui étre considérée comme son monu- ment. Il estime 4 90,000 personnes le nombre de visi- teurs qui en ont franchi le seuil. En 1971, Arthur Villeneu- ve a 6té le gagnant du con- cours “Les créateurs du Qué- bec” pour I’originalité d‘une de ses toiles (prix de $500.) Le 22 décembre 1972, il a été recu Chancelier membre de. !’Ordre du Canada (Cana- da Merit) parce qu'il avait peint les métiers du monde entier. A la base, Villeneuve ap- porte un regard sur les scénes de la vie québécoise, une note rafraichissante et inquié- i | | wm | HH tante a la fois. Les person- Mages aux allures carnavales- ques placés dans des décors féeriques surprennent par leur disproportion. Leurs visages sont aussi presque toujours de profil. Dans |’oeuvre de Villeneuve, on trouve de tout: scénes pré-historiques, monstres, personnages historiques, scé- nes québécoises. La réalité prend un caractére fabuleux, . Magique. D’éminent critiques ont sa- lué son art avec enthousiasme. Beaucoup de scénes contem- poraines, légendaires, religieu- ses et d’inspiration biblique parsement son oeuvre. _ La fraicheur, la tendresse et la lumiére en sont les caracté- ristiques principales. | A Chicoutimi, la maison extraordinaire du peintre est Une attraction connue de tous. Pour la visiter, il suffit de .téléphoner a (418) 549-6814 afin de vous assurer qu'il y a quelqu’un pour vous recevoir. . | i ll HUAI iil l al Hy wn HH HI | Pour de plus amples ren- seignements, veuillez commu- niquer avec l'Office de tou- risme du Canada, 150, rue Kent, Ottawa, K1A OH6. Se ae ofc i 3 4c a ae ae a ae 2c he ae ae a ae 3 a af afc afc ak 2c ak kc akc a afc a ae 3h ake ke LE MOT DU JOUR: TELCOS ES A OH A OC IC I MC SAN TR a RARE Rea eae eae hese Neal IL N’Y POUVAIT RIEN Un jour, une famille d’Ecossais vint s’établir 4 Saint- Hyacinthe. Cette famille était trés pauvre et, comme c’est souvent le cas, fut bientét un sujet de conversa- tion entre les bonnes gens du coin. On remarque tou- jours les étrangers, et l’on voit facilement dans leurs yeux la paille qui s’y trouve, sans voir la poutre que Pon a soi-méme dans I’oeil. Quoi qu'il en soit, cet E- cossais s’appelant Keating devint le symbole pour les voisins , du pauvre lui-méme, puis par extension de sens, du niais, puis de l’arriéré. On oublia la famille, mais ce nom resta, transformé, francisé, et il est main- tenant employé au Québec sous la forme tenez-vous bien, de “quétaine”. Oui, nos quétaines sont des mots dont la source remonte 4 un Ecossais pauvre qui n’y pouvait rien. Qu’on ne me dise plus que c’est ennu- yeux de parler de la langue. (tiré de la publication ‘Le mot du jour”, éditée par l’Office de la langue francaise du Québec et COUPIINMSY _._ préparée*par Louis-Paul Béguin, linguiste).-- * - BEETS MOE OI : } { £ ij f