Le vendredi 26 septembre 1997 11 Le Vancouver International Film Festival VANCOUVER 2 et nn > 2 : te ° Coa 3 ht = ue a ww - =FILM tman de _Pirjo Honkasalo (Finlande/ Allemagne 1996) Ce documentaire du Finlandais Honkasalo accompagne un Indien bossu et paraplégique, Jamana Lal, dans un périple de 6 000 kilométres, alors qu’il va porter les cendres de sa mére au _ seuil de PHimalaya. Honkasalo braque une caméra objective, témoin des fabuleux paysages indiens mais surtout, de la grande conviction spirituelle de Lal. Des images fortes soutiennent ce traitement : la ville sacrée de Bénarés, Vhumilité dans le regard des gens ou encore les rites religieux sur les rivages du Gange. . 'Jamana Lal appartient a la caste des. « intouchables.» et il doit surmonter plusieurs obstacles afin d’atteindre son but. En maintenant un regard neutre, le réalisateur réussit A présenter le portrait intime et Cat e réalisateur de Secrets & Lies revient en force avec Career Girls, un drame léger sur Pamitié au féminin. Annie (Lynda Steadman) et Hannah (Katrin Cartlidge) se retrouvent le temps d’un week- end, aprés six ans de silence mutuel, Voild Voecasion pour chacune de faire le point sur leur amitié et par conséquent, explorer leur passé. La grande qualité du: film réside dans VPattention que le Britannique Mike Leigh apporte privilégié de ?’Inde d’aujourd’hui ; un pays en proie a dimmenses _ problémes sociaux et économiques. Honkasalo réussit surtout & provoquer une __certaine introspection chez le spectateur. Devant la neutralité de son regard vis-a-vis les convictions de Jamana Lal (le réalisateur n’intervient & aucun moment pendant le film), on ne peut que s’interroger sur la_ vacuité spirituelle de notre culture. Le film bénéficie de superbes images. Le montage soutient l’aspect chaotique de cette aventure. On peut cependant reprocher au réalisateur les séquences de danse intervenant sporadiquement dans le film. S’il est vrai que la danse et la musique font partie de la tradition cinématographique indienne, il n’en demeure pas moins que ces séquences agacent par leur superficialité. Atman_ témoigne’ du triomphe de l’4me humaine sur la nature. Pirjo Honkasalo expose le sacré et le vulnérable chez V’étre humain. Une belle lecon de vie. En projection le 27 septembre 4 12 h 30 au Pacific Cinematheque et le 2 Pévolution détails de aux d’Annie et d’Hannah. Le film alterne entre leur fin de semaine et les retours en arriére, au milieu des années 1980, que chacune évoque intérieurement. Les retours dans le passé représentent Annie et] lannah a une étape formative de leur vie. Chacune vit de profondes’ blessures quelle négocie de maniére opposée. Annie est immensément timide et soumise, au point. d’en développer de sérieuses ir- Un avant-goiit critique octobre a 19 h, au Robson Square. Le Destin de Youssef Chahine (Egypte/France 1997) Youssef Chahine est a Egypte ce que Fellini est a PItalie ou ce que Bergman est & la Suéde.. Chahine est le maitre incontesté du cinéma arabe et sa derniére oeuvre confirme cette réputation. Le Destin est un portrait biographique du philosophe et humaniste Averroes. Ce dernier a vécu en Andalousie au XIle siécle et est particuliérement reconnu aujourd’hui pour ses traductions d’Aristote. Mais Le Destin est avant tout une méditation sur l’extrémisme religieux. Un sujet dangereux, s'il en est, pour un cinéaste arabe. Pourtant Chahine traite son sujet avec une joyeuse et belle innocence. Son film intégre humour, tragédie, danse et musique. Chahine filme avec passion et énergie. Ses images débordent de sensualité et la musique posséde un exotisme attrayant. Le Destin présente une collection de personnages tous plus intéressants les uns que les autres. Les intrigues s’enchainent avec facilité et le tandis qu’Hannah_ protége ses_bles- ruptions — cutanées, sures avec une agressivité et un humour — imprévisibles et déroutants. Leigh évite de tomber dans les lourdeurs ~du — drame psychologique. Ces blessures noecupent pas Pavant-plan de la trame narrative, mais contribuent plutét a définir la nature de Pamitié entre ces deux femmes. I] devient troublant alors, de deviner Vévolution personnelle d’Annie et résultat final communique un plaisir évident a filmer. Chahine propose une méditation divertissante sur l’immortalité de la pensée. Faut le faire ! En projection le 26 septembre & 21 h 30 au Caprice et le 28 septembre & 16 h au Ridge. Det Means Girl de Abolfazl Jalili (Iran 1994) Le grand cinéaste iranien Jalili offre une fenétre rarement ouverte sur l’Iran d’aujourd’hui. Shwan, un garcon d’environ 12 ans, travaille dans une auberge d’ouvriers a Téhéran. Le boulot est dur et le sommeil rare. Un jour, Shwan apprend que sa petite soeur, Balut, est atteinte d’une dépression si grave, suite au décés de leur mére, qu’elle souffre de paralysie. Shwan met tout en oeuvre pour tenter de la sauver. Abolfazl Jalili (dont un autre film, A True Story, est présenté au festival) posséde une formation de peintre et son film bénéficie de cette influence. Le montage relativement lent permet de bien saisir la beauté des images et de la lumiére. Det Means Girl est surtout une réflexion sur un pays eer Girls de Mike Leigh (Hannah et de prendre conscience, en méme temps qu’elles, des bienfaits de cette amitié, Le réalisateur accomplit la dure tache d’apporter une cohésion parfaite et naturelle a Vensemble. Les deux actrices, qui ont répété et défini leur personnage avec Mike Leigh pendant plus de six mois avant le tournage, explosent de véracité et intelligence. Le réalisateur a pris soin d’entourer Annie et Hannah dune galerie de ‘justifier en traditionnaliste confronté a arrivée du nouveau millénaire. Le pére, analphabéte, ne peut aider sa fille et en vient a dépendre de son fils. Les femmes sont toujours soumises a une société patriarcale et la voix de Shwan trahit une enfance trop vite abandonnée. Le film accompagne Shwan dans sa_ recherche d’une solution pour sa soeur. De la médecine moderne aux croyances religieuses, l’intrigue devient une allégorie de la paralysie sociale devant les problémes socio-politiques de cette nation. La bande sonore, composée de musiques pop et traditionelle, souligne les réticences de ce pays devant la modernité. Det Means Girl fait le constat d’un pays en pleine transition. Une transition difficile 4 compléter. Le monde change de plus en_ plus rapidement et parfois le monde n’arrive plus a- suivre. Ce trés beau film de Jalili fait état de cette situation. En projection le 3 octobre & 12 h au Caprice et le 5 octobre a 19 h au Vancouver Centre 1. SYLVAIN AUMONT personnages colorés qui soutiennent et ajoutent aux propos de leur amitié. Les coincidences dans le film semblent un peu forcées, cependant. L’auteur tente de se incluant des commentaires sur celles-ci dans les dialogues, mais le reméde s’avére peu convaincant. Fait inusité : la musique originale est de Marianne Jean- Baptiste et de Tony Remy. Marianne Jean-Baptiste inter- prétait le rdle d’Hortense, la jeune Noire en quéte de sa mére biologique, dans le film précédent de Mike Leigh. Devant le triomphe critique et populaire de Secrets & Lies, Career Girls risque de souffrir de la comparaison. Career Girls ne posséde pas la puissance dramatique de son __ pré- décesseur, mais le film émeut tout de méme. Mike Leigh signe un film sobre, touchant et superbement réaliste. SYLVAIN AUMONT