Arts et Spectacles 17 La poesie: qualite contre quantite Grace 4 son talent de conteur et d'acteur, Michel de Maulne, directeur de la Maison de la poésie a Paris, nous a fait découvrir et tedécouvrir les oeuvres de Rimbaud et de Blaize Cendrars a travers deux montages poétiques. - Comment met-on en scéne de la poésie? - C’est trés difficile car la poésie n’est pas écrite pour cela. Au théa- tre, il faut une situation et un conflit. Pour mettre en scéne la poésie, il faut justement retrouver un conflit et une situation, sinon le public s’endort. - La poésie n’est-elle pas plutét faite pour qu’on la lise? - La poésie est faite pour étre dite. Certains possédent la faculté d’en- tendre la musique de la poésie en la lisant, mais d’autres ne sont pas aptes 4 en entendre le son par la lecture. Ils ont besoin de quelqu’un pour la lire. D’ailleurs, les poétes lisent leur texte 4 voix haute, et souvent debout, en marchant, car la poésie est une véritable écriture orale en action. - On a particuligrement parlé de Rimbaud cette année avec le centiéme anniversaire de sa mort. Une partie de la jeunesse, en France, semble s’y étre soudainement identifiée. Ce phénoméne vous parait-il justifié? - Les jeunes s’assimilent 4 quelque chose qui n’est pas vraiment Rimbaud. Il a parcouru 200 kilométres 4 pied, Rimbaud était un homme extrémement dur avec lui-méme. La jouissance chez Rim- baud n’existe pas. La jeunesse actuelle, trés égocentrique, n’a rien a voir avec Rimbaud qui est un homme qui cherchait la lumiére. S’il a pris des drogues, ce n’était certainement pas pour s’amuser Ou pour en jouir. - Pourquoi avoir choisi d’interpréter aussi les oeuvres de Blaise Cendrars? - Cendrars et Rimbaud ont quitté 1a poésie rimée pour la prose. Leur prose remplace la rime par un rythme intérieur 4 |’écriture, qui est encore plus difficile 4 atteindre. De plus, Cendrars améne pour la premiére fois la machine dans la poésie. II parle de choc, de ferraille, de vrombissement et cela était tout 4 fait nouveau en 1914. - La poésie n’est-elle pas aujourd’hui en perte de vitesse? - On s’étonne que la poésie ne se vende pas par millions, mais elle ne s’est jamais vendue en grandes quantités! Son public a toujours été trés restreint: on demande a la poésie d’occuper une place qu’elle n’a pas. Certains disent qu’au XVI[éme siécle, la poésie était partout. Elle était partout oui, mais seulement dans les couches trés élevées de la société, car 4 1’époque, on ne se préoccupait pas du tout des autres catégories de population. Alors 4 notre époque, ot la société se démocratise, on prend en compte aussi l’opinion des masses qui n’ont jamais été trés sensibles a la poésie. - La poésie est donc toujours aussi forte? - Nous vivons dans un monde oi régne la quantité : «il faut produire». La poésie est une réponse de qualité. Je viens d’un pays ou |’on trouve encore quelques endroits od l’on peut manger des plats de grande qualité. Dans l’avion (américain) pour venir ici, on m’a servi un énorme plat de pates. Je n’avais pas besoin de manger autant! Tout cela pour dire que cette notion de quantité se retrouve partout. Et c’est aussi paradoxalement pour cette raison que la poésie n’est pas moins présente qu’avant: en réaction a ce phénoméne de produire-a-tout- prix, il se développe une force de résistance trés vive en faveur de la Ppoésie. Propos recueillis par Renaud Hartzer ERANCOEOLIES — Entre Leclerc et de la Rocheliere Plutét timide, résolument modeste, Daniel Lavoie ne sem- ble pas particuligrement enclin a se livrer. C’est pourtant au Soleil de Colombie qu’il a accordé sa premiére interview a son arrivée a Vancouver vendredi 27, avant d’entamer un long marathon d’en- trevues qui s’est poursuivi Loute la journée. -Le Soleil de Colombie: C’est la premiere fois que vous venez chanter a Van- couver? - Daniel Lavoie: La demiére fois, ¢a remonte a douze ans il me semble... Quelle diffé- rence entre le Daniel Lavoie d’aujourd’huiet celui d’il y a douze ans? - Il y a 12 ans d’évolution, de travail. J’ai aussi appris 4 mieux communiquer. Je ne crois pas avoir changé de style. - Entretemps, il y a eu aussi la célébrité... - Oui, ga a changé quelques affaires... (Sourires) - Un nouvel album en vue? - Oui, un album en anglais pour bient6t. Et aussi un opéra-rock sur la vie de George Sand, intitulé «Sand et les romantiques», com- posé et interprété notamment par Catherine Lara. J’y tiens le réle Courrier Merci Regis! Grand merci pour ces dix jours d’amour, couleurs et poésie. Les Francofolies ont été un ressourcement culturel indispensable a notre épanouissement collectif. Dix jours d’événements, dix jours de qualité, un enrichissement culturel qui solidifie la cause. Comment saluer un individu qui a adroitement réalisé dix jours intensifs d’événements culturels les plus complets? Armé d’une vision, il a défié l’inertie culturelle, il nous a donné le gofit de faire de ces Francofolies, un événementa revivre. Dix jours de folie, dix jours de magie, 355 jours d’anticipation. Encore merci Régis! Daniel Massé d’Eugéne Delacroix. Le disque DELICATESSEN (FRANCE) 11 Oct. & 21h30, Starlight 12 Oct. a 16h30, Starlight 10 Oct. & 21h30, Starlight Daniel Lavoie (a gauche), catessen, Franc Les réalisateurs Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro donnent un ton futuriste a ce conte noir. ENTRE LA LANGUE ET L'OCEAN (CANADA) Un rapport sur I'état de la crise d'identité perpétuelle du Canada. Réalisé par le Vancouvérois Oliver Hockenhull. 17 Oct. a 16h00, Cinématheque du Pacifique est déja sorti en France, ct devrait arriver ici aprés Noél. C’est un trés beau projet. - Vous avez aussi entamé une carriére au cinéma dans Le fabuleux voyage de l’ange, qui va étre projeté a Vancouver dans le cadre du Festival du film. Avec Jean-Pierre Lefebvre comme réalisateur, vous n’avez pas vraiment choisi la facilité... - On peut le dire..., mais je savais que j’avais un bon professeur. Je trouve que le cinéma ressemble beaucoup 4 la chanson: c’est une question de préparation et de concentration. C’est une expé- rience qui m’a beaucoup apporté. - Les critiques ont été trés sévée- res a l’égard de ce film... - C’est un peu triste car c’est vraiment un trés beau film. Mais les critiques, souvent des gens cyniques et désabusés, n’ont pas su comment le prendre. C’est un film trés simple, trés naif, qui en compagnie de Sylvia L'Ecuyer de Radio-Canada, qui animait I'émission Horizons tous les jours en direct du Café Rimbaud. exprime des sentiments humains simples. é - Si vous deviez vous situer sur l’échiquier de la chanson fran- cophone, ou vous placeriez-vous? - Je ne me classifie pas. On peut dire que je me situe entre Félix Leclerc et Luc de la Rocheliére (Sourires). Disons que je me place dans la lignée des chansonniers francophones cana- diens, mais pas qué- bécois. - Vous étes franco- manitobain. Est-ce que vous vous con- sidérez comme de «culture bilingue»? - Je suis francophone de coeur, de destin. Et je suis aussi bilin- gue, donc de culture bilingue. - Une question d’ac- tualité pour termi- ner: étes-vous plu- tot pessimiste ou op- timiste sur l’avenir du Canada? - (Hésitant, Daniel Lavoie, qui arrive tout droit de Paris, ne semble pas trés au fait des derniers déve- loppements constitutionnels) La situation est encore trés confuse. Plus ga va, plus ¢a va mal. I faudrait des leaders politiques avec énormément de charisme. Mais on a aussi les hommes politiques que l’on mérite alors ce n’est peut- étre pas seulement la faute des politiciens’ mais aussi la ndtre... Propos recueillis par Renaud Hartzer du 4 au 20 octobre Photo: Alain Faure LUNG TA: FORBIDDEN TIBET (FRANCE) Un film de Marie Jaoul de Poncheville 6 Oct. a 16h30, Starlight 8 Oct. a 19h00, Ridge NELLIGAN (CANADA) Une biographie dramatique d'Emile Nelligan, le grand poéte Québécois. 11 Oct. a 19h00, Van. Cent. No 1 J'ENTENDS PLUS LA GUITARE (FRANCE) Ce film de Philippe Garrel. North American Premiere. 9 Oct. a 21h30 et 11 Oct. a 16h00, Van. Cent. No 1 J'entends plus la guitare de Philippe Garrel avec B. Régent et P. Garrel. CINEMA DE LANGUE FRANCAISE - DEUXIEME SEMAINE INFO: 738-4567 PAIEMENT PAR TEL: 738-4568 Le Soleil de Colombie Vendredi 4 octobre 1991