>: Le Soleil de Colombie, Vendredi 28 Uctobre 1977: LE MREIL PUBLIE PAR © Téléphone: 879-6924 mm lq a LE MINI-QUOTIDIEN DE LANGUE FRANCAISE DE LA COLOMBIE-BRITANNIQUE Directeur: André Piolat Directeur-adjoint: Marc Béliveau Rédacteur: Jean-Claude Arluison Mise en page: Danielle Leclaire ea LE SOLEIL DE COLOMBIE LTEE, 3213, rue Cambie, Vancouver, C.B., V5Z 2W3 Courrier de deuxiéme classe sous le numéro d’enregistrement 0046 HEBDOS DU CANADA: Association de la Presse francophone ‘Hors-Québec DE COLOMBIE Par Jim Smith Quelle loi naturelle? Il n’y a pas si longtemps, les sages nommés par la fa- veur populaire se sont réunis et sont arrivés 4 cette conclu- sion trés réconfortante: VYhomme est lespéce domi- _+nante. L-homme, a leur con- - naissance, ne se trouvait que sur notre planéte. Par consé- quent, il s’ensuivit que la ter- re était le centre de l’univers. Malheureusement, ni le soleil ni d’autres étoiles di- verses ne furent tenus au courant de cette vérité scien- tifique. Et ainsi ils continue- rent a suivre leur petit bon- homme de chemin, qui n’im- pliquait pas de tourner con- sciencieusement autour de la terre. Ce qui nous améne a la ré- © cente histoire politique fédé- rale. Cela fait des générations que l’Ontario se considére comme le centre de l’univers canadien. Cette position de grande influence fut assurée par le contrdle de deux porte- feuilles essentiels: les finan- ces, et le commerce et l’in- dustrie. Au cours d’un remanie- ment de cabinet, en septem- bre, le Premier Ministre Tru- deau a descendu en fléche une autre loi naturelle uni- verselle. Le portefeuille des finances est allé, pour la pre- miére fois, 4 un Canadien francais — Jean Chrétien — et celui de l'industrie et du com- merce a un Albertais, dunom de Jack Horner. Il ne faut pas ignorer les implications de ces nomina- tions. L’Ontario a été le prin- cipal bénéficiaire de la Confé- dération, parce que les prin- cipaux portefeuilles se trou- vaient entre les mains d’hom- mes bien disposés a l’égard des aspirations commerciales de la province. La voie mari- time du Saint Laurent, I’Au- topact canado-américain et, non le moindre, des tarifs de transport subventionnés qui rendent bon marché l’expé- dition des denrées produites en Ontario vers les consom- mateurs de l’est et de Pouest, tout cela s’est lié pour amé- liorer 1a position économique de I’Ontario. L’Ontario, toutefois, n’est plus capable de faire concur- rence sur les marchés indus- triels internationaux. Les coltits de la main-d’oeuvre au Canada nous empéchent d’étre concurrentiels sur la plupart des marchés mondi- aux. Mais le potentiel de res- sources de notre pays est en- core relativement fort. Le Québec et le Manitoba ont chacun un vaste poten- tiel hydroélectrique. LAlber-. ta et la Saskatchewan peu- vent compter pour de nom- breuses années 4 venir sur de grosses réserves de pétrole et de sables bitumineux. Méme les infortunées provinces ma- ritimes ont une considérable: richesse de ressources. La Fédération canadienne: de l’entreprise indépendante’ continue de prédire que le dé- veloppement et la transfor- mation des ressources va faire Pobjet d’une plus grande at-: tention, au cours des années: a venir, que la fabrication. La: réalisation de cette prédic-: tion est vitale pour la survie- -de la Confédération; la dé- centralisation autour des in- dustries de ressources est une stratégie-clé pour garantir une croissance plus équili- brée de Il’économie. Les nominations de Chré-. tien et de Horner vont sans: aucun doute a l’encontre de toute tradition. Mais, malgré les rumeurs émanant de l’On-. tario, ces nominations n’en- freignent aucune loi naturelle, La Fédération canadienne de !’entreprise indépendante©@ Editorial Histoire et fierté nationale L’enseignement de l'histoire et de la géographie tient une place importante dans les programmes scolaires de la plupart des pays développés. Les éléves y étudient l'histoire et la géographie, non pas, bien entendu, de toutes les nations, mais de celles qui ont joué et qui jouent un réle important sur le plan mondial dans les domaines politiques et économiques. Mais la priorité est accordée 4 l'enseignement de histoire et de la géographie nationales. Au Canada, ces deux matiéres sont négligées d’une maniére inadmissible. Un test donné a des éléves terminant leur douxiéme année a révélé que certains pensaient que Montréal ou Toronto était la capitale nationale... incroyable, mais vrai, malheureusement. “Nouveau-Brunswick est la capitale d’Halifax, n’est-ce pas?” a-t-on demandé & une personne de Vancouver qui annoncait son départ pour Halifax. Quelles sont les causes des grandes lacunes de trop de Canadiens en ce quia trait a la géogra- phie, a l'histoire, aux institutions de leur pays? Qui sont les responsables? Quels sont les remédes? Le systéme scolaire est & blamer, bien sir. Les ministéres provinciaux de l'éducation et les commissions scolaires devraient rendre obligatoire, & tous les niveaux, l’enseignement de lVhistoire et de la géo- graphie canadiennes et mondiales. Quant a ’étude des institutions, du systéme politique, c’est objet dans certains pays avancés d’une matiére spéciale, dénommée “instruction civique”. Les députés fédéraux qui peuvent maintenant étre entendus a la radio et vus a la télévision & travers tout le pays, ont la un beau sujet qu’ils pourraient débattre avec éloquence. Durant une entrevue télévisée, l’ancien Premier Ministre, M. Diefenbaker, a déclaré clairement que I’enseignement de l'histoire canadienne est pratiquement inexistant. Les médias ont un grand réle a jouer sur ce plan: ils peuvent, d’une part, traiter du probléme, susciter des réactions, exercer des pressions sur les autorités scolaires et gouvernementales, et d’autre part publier des articles consacrés a l'histoire canadienne. Les parents d’enfants d’age scolaire qui se sont organisés pour obtenir une amélioration de l'enseignement du et en francais, pourraient agir de méme pour exiger que histoire, la géographie et l’instruction civique soient enseignées sérieusement. Que lhistoire soit une matiére a option et que les éléves puissent choisir la poterie ou la dactylographie plutét que histoire est tout simplement renversant. Mais il ne faut pas attribuer toute la responsabilité au systéme scolaire; les parents ont également une part de responsabilité: ils devraient veiller 4 ce que leurs enfants possédent une connaissance raisonnable de leur pays et de son histoire. Les jeunes, pourraient par eux-mémes remédier aux ° lacunes des programmes scolaires en consacrant moins de temps a la télévision et davantage 4 la lecture, et la méme chose est valable pour les adultes. Sans aucun doute, le manque de fierté nationale découle de la connaissance insuffisante de son pays, en particulier de son histoire. Jean-Claude ARLUISON Les appréhensions de l’Ouest par Jacques BENJAMIN Politicologue, professeur en sciences politiques a l'Université de Montréal, au- teur de “Comment on fabri- que un premier ministre”, M. Jacques Benjamin séjour- ne présentement a I’Univer- sité Simon Fraser, 4 Burna- by, en Colombie-Britanni- que, ow il est chargé de cours. RK VANCOUVER — A mesure que les mois passent, les réactions de l’Ouest cana- dien a la victoire du Parti québecois l’an dernier sont en train de se transformer. On peut les identifier 4 deux niveaux: le commun des ‘“mortels et les citoyens plus politisés, plus au courant des réalités politiques. Chez les gens moins politisés, le sen- timent anti-québecois n’ avait fait que grandir depuis 10 ans. Beaucoup de ces gens - sont de nouveaux citoyens_ canadiens ou des enfants’ dimmigrants. L’Ouest cons- titue une mosaique cosmopo- lite de gens venus au Canada 4 cause de conditions maté- rielles plus propices. Ces. gens ont dfi trimer dur pour acheter leur maison dans. lest de Vancouver et consi- dérent que les Québecois ne meéritent pas les sommes que la Colombie leur verse en péréquation; ils n’ont jamais. non plus compris pourquoi’ ils devaient abandonner leur langue — ukrainienne, ita- lienne, chinoise — sans que les Québecois en fassent autant. Les medias ne les ont pas aidés 4 comprendre, mais au moins la victoire du Parti québecois les avait fait taire. Onze mois plus tard cependant, ils ont recom- mencé a se faire entendre dans les émissions de ligne ouverte — un phénoméne important 4 Vancouver — et dans les pages des journaux. Ils considérent que la force doit étre utilisée si nécessai- re pour conserver le Québec, et ils voteront en 1978 pour le parti libéral ou contre lui, mais pour les mémes rai- Sons: ils n’ont pas adopté ce. nouveau pays pour que les Québecois viennent le défai- re. L’attitude des gens plus politisés est nuancée mais elle est également en train d’évoluer. La premiére réac- tion fut, somme toute, assez sympathique au Québec. Ce serait la l’occasion d’une décentralisation plus grande des programmes fédéraux qui bénéficierait 4 la Colom- bie-Britannique autant qu’au Québec. L’impérialisme des Ontariens au sein de la haute fonction publique fédérale est un théme cher aux Colombiens! Durant les pre-' miers mois de 1977, ils soutenaient qu’ainsi la Confédération serait telle- ment modifiée au moment — du référendum que les Qué- becois décideraient de reje- ter l'indépendance. Des indi- ces permettaient de croire a une telle décentralisation: des amendements aux lois sociales permettraient a ]’ad- ministration fédérale de fi- nancer beaucoup plus de garderies 4 Vancouver, ils permettraient aux organis- mes fédéraux d’appuyer beaucoup mieux le travail eréateur des artistes de Vancouver et Victoria, etc. Cette premiére réaction d’optimisme qui dura six mois est cependant en train de se transformer en un sentiment d’inqui¢tude, pro- voéue en partie par |’absen- ce de traavail d’analyse du Vancouver Sun. Les gens constatent en effet que ce journal devrait leur offrir ces analyses que les réseaux de télévision ne leur appor- tent pas. Les correspon- dants 4 Ottawa du Sun ne jouent pas le rdéle que les nécessités géographiques obligeraient. Les réseaux de télévision couvrent pour leur part les événements au profit de l'Ontario ou des “Provinces centrales” (On- tario et Québec), c’est la une constatation que les Colom- biens percoivent comme une évidence. Le Vancouver Sun est un journal a grand tirage (le second en importance au pays), il essaie de plaire 4 toutes ses clientéles, diver- ses dans leurs intéréts et somme toute peu politisées. Le réle de la commission sur l'unité nationale, le sens des échanges de lettres entre _MM. Trudeau et Lévesque, la portée des projets de lois péquistes sont résumés en 20 lignes dans le Sun. Cette frustration se transforme en inquiétude lorsque ces gens prennent vaguement connaissance du ton modéré de l’échange de lettres et de l'absence de nouvelle orien- tation (“la troisiéme voie”) de la part d’Ottawa. A cété des clubs libéraux dont l’ap-. pui 4 l'unité nationale appa— rait de plus en plus négatif a trouve done chez les plus lucides des Colombiens un sentiment de méfiance. MM. Trudeau et Lévesque sont- ils en train de chercher un terrain d’entente, qui ne bénéficierait qu’au Québec et non pas a la Colombie? On sait ici comment il y a 12 ans le Québee a obtenu son régime des rentes autono- me: les négociations secré- tes dans les chambres d’hé- tel, les compromis atteints lorsque MM. Tom Kent et Claude Morin quittaient la chambre pour aller négocier dans la salle de toilettes. Or, disent-ils, c'est le méme Claude Morin qui dirige aujourd’hui les négociations. Bref, on s’étonne de I’absen- ce d’idées novatrices de la part d’Ottawa et on craint de plus en plus des compromis qui ne modifieraient en rien la dépendance de l'Ouest aux mains des Ontariens. Je ne puis que constater pour ma part 4 quel point les médias anglophones de Van- couver couvrent mal la di- mension Ottawa-Québec de Vactualité politique. Je ‘constate que Le Devoir et le réseau francais de Radio-Ca- nada, peu suivis 4 Vancou- ver, jouent en ce sens beau- coup mieux leur réle. En somme, a Vancouver et dans l'Ouest, deux impressions dominantes sont en train de se créer: chez les militants libéraux, la défense du statu quo au nom de l’unité natio- nale; chez les autres, la théo-. rie de histoire canadienne par la conjuration: les négo- ciations secrétes Québec-Ot- — tawa pour f... l'Ouest. ? ee (Publié dans Le Devoir du 11 octobre 1977). * “Végard du Québec, on ree (eee ane saab btislintbistia biocds Menioe dink Siac b Lee ERR Raat ee ae ee eR a Ga Ae