— Une figure du passé AVANT-PROPOS - Toujours dans le cadre du “Fait francais en Colombie Britannique”, nous ne pouvons trouver mieux que de jeter un long regard sur la vie fabuleuse de ce missionnaire, historien, ethnologue, philologue, qu’était le Pére Adrien-Gabriel Morice, de l’Ordre des Oblats de Marie Immaculé (0.M.1.) Ayant consacré 58 années de sa longue vie a parcourir notre vaste province glanant une prodigieuse documentation: son oeuvre est donc considérable, puisqu’elle s’étend sur un vaste éventail de recherches, d’études, d’analyses etc. Ses divers ouvrages, trés nombreux d’ailleurs, font toujours autorité, la plupart en francais, mais celui que nous jugeons le plus important, le plus captivant a été rédigé en langue anglaise, ce qui nous porte a écriré cette série d’articles en frangais pour les lecteurs du “Le Soleil de Colombie”: son titre “The History of the Interior of British Columbia (formerly New-Caledonia) 1660 to 1880, publié par la Firme Briggs, de Toronto, en 1904, et en 1906, par John Lane, The Bodley Head, Vigo Str. Londres. : ORIGINES D’ADRIEN-GABRIEL MORICE: Né le 27 aofit 1859 a Saint-Mars sur Colmont (Mayenne), France. Mort le 21 avril 1938, 4 Saint-Boniface (Winnipeg, Manitoba), a l’age de. 79 ans. Fils de Jean Morice et de Virginie Seigneur. Aprés de sérieuses études au Séminaire de Mayence, le Collé ge de Notre Dame de Sion des Oblats, il rejoignit l'Ordre des Oblats 4 Nancy, en 1877, puis 4 Autun (Saéne-et-Loire) de 1878 a 1880, a 21 ans. De France, Adrien-Gabriel Morice passa au Canada, plus précisément a Victoria (Ile de Vancouver), Colombie Britannique, vers juillet 1880. De 1a, on lui assigna comme résidence New-Westminster, ot deux années durant, il compléta ses études théologiques et fut ordonné prétre le 2juillet 1882 par l’évéque Louis d’Herbomez O.M.I. Vicaire Apostolique de la Colombie Britannique, celui qui fit construire, avant sa mort en juin 1890, la grotte de N.D. de Lourdes, 4 Mission Sainte-Marie. PERE A.G. MORICE: SES PREMIERES MISSIONS: ~ Immédiatement, il fut assigné a la Mission de Williams Lake, ou il passa trois années, travailla dans l’entourage de la tribu indienne des Chilcotins, apprenant leur langue et leur administrant leurs besoins spirituels. En aofit 1885, a 26 ans, il fut muté plus au nord, au Fort- St.James (Lac Stuart), ot il demeura 19 ans a se dédier a l'étude de nouveaux dialectes, de nouveaux us et coutumes des tribus environnantes. Le Pére Morice était convaincu que I’apostolat ne pouvait étre pleinement efficace que si on s'exprimait dans le langage de la population, langage qui sera toujours celui de ces populations, mieux que l'anglais qui n’était pas propite pour répandre les Ecritures Saintes. 4 Tout ceci, porta le Pére Morice a rédiger des études sur l'histoire, l’ethnographie, l’anthropologie de ces Indiens, notamment la tribu des Dénés et des Carriers, ju- geant que la langue Déné est une langue-clé. A.G. MORICE EN NOU— VELLE—CALEDONIE: Le Pé re Morice débute son ouvrage sous revue, par une intéressante introduction sur l’origine de la Nouvelle- Calédonie, telle que l’explo- rateur Simon Fraser avait baptisé une certaine portion du territoire de notre actu- Britannique. _Evéque Louis d’Herbomez Plusieurs auteurs n’ont pas été d’accord sur ses frontiéres. Alexandre Begg, 4 qui nous.devons “History of the North-West” lui donne des dimensions assez restreintes: dans un autre ouvrage, il I’étend jusqu’a Colville, dans I’Etat de Washington, c’était trop. Tandis que l’historien Hubert Howe Bancroft, de Californie, donne des limites plutét assez farfelues avec des climats loin d’étre ceux prévalant dans cette région, le Pére Morice le tourne en dérision a ce sujet et sur tant d’autres. Les lacs et les riviéres sont sans nombre: le Pére Morice en retient les principaux, en premier lieu ceux qui contribuent a alimenter le fleuve Fraser, comme le Nechako, Quesnel, Stuart, Chilcotin, méme le petit. Blackwater, nommé par Alexander MacKenzie, qui le conduisit; en 1793, a la découverte de l’Océan Pacifique. 5 Tous ces cours d’eau, grands et petits, étaient extréme- ment poissonneux, qu’en est-il maintenant? La faune était représentée par de nombreuses espéces, que les Indiens divisaient en deux catégories: les animaux a chair comestible et les animaux a fourrure. De temps immémoriaux, ces animaux ont été chassés par quatre principales tribus d’Indiens: Les Sekanais, a l’ouest | FORT ST. JAMES Adrien Gabriel Morice (1859-1938) Recherches historiques et composition de M. Alexandre Spagnolo, membre de la Société historique franco- colombienne. *, , See. Société Historique Franco-Colombienne 9, Broadway Est, Vancouver, C.B. V5T 1V4 La Société historique est la recherche d'un bénévole pour le poste de trésorier. > free Be I eS. —- ——. a = “ =. — a eens: = @ —— A HAIN (4 elle Province de Colombie. CTT TAH fr rl “an tite: Fort Saint-James, la od le Pére A.G. Morice passa 19 années de sa vie des Montagnes Rocheuses- Les Babines, au bord deslacs. Les Carriers, sur le fleuve Fraser. Enfin, les Chilcotins, dans la vallée du fleuve portant leur nom. Les étres humains de ces quatre tribus avaient une différente morphologie, bien reconnaissable a l'étude. D’autre part, ils n’avaient pas de chefs dans I’acception la plus large du mot. Si, le rang ou la propriété allaient ala descendance féminine chez les Carriers et les Babines; par contre, aux males chez les Sekanais et Chilcotins. Au point de vue religion ou plutét croyance, ils admettaient un monde futur, tout en ayant une notion confuse de |’Etre Supréme, qui gouvernerait l’univers a travers I'instrumenta- lisme, cette doctrine philosophique qui considére I'intelligen- ce et les théories comme des outils destinés a |’action, en somme une forme de pragmatisme. a ce sujet, les esprits entraient en jeu, soit pour protéger soit pour nuire. Les premiers pa r les Totems ou génies tutélaires, les seconds, parles maladies. Ces derniers, atteints, devaient se soumettre aux incantations du ‘Shamam” ou médecin-sorcier, doué de pouvoirs surnaturels, considéré maitre de la vie ou de la mort. A. .G. MORICE ET LES TRIBUS INDIENNES: Les faits relevés par le Pére en cas de décés chez les tribus Chilcotins et Shushawps, les corps étaient enterrés. Chez les Babines, les Carriers et les Nahanais de l’ouest, briilés. S’agissant de membres d’une tribu d’une situation élevée ou trés aimés, les restes étaient déposés au sommet d'un échaffaudage, loin des atteintes d’animaux sauvages ou bien dans le creux d’un tronc d’arbre, dune certaine hauteur. . Chez la tribu des Carriers, la veuve ramassait les restes carbonisés de l’époux et les portait sur son dos, dans un sac de cuir, d’ot le nom de Carrier)en anglais, transporteur) jusqu’au jour ot les compagnons du défunt seront en mesure d’amasser des quantités de nourriture et de fourrures et de. les distribuer 4 des membres de différents clans, au cours d'une fastueuse cérémonie appelée “Potlatch”(du langagne Chinook“patshatl”, distribution de cadeaux au cours des festivités chez les amérindiens du Nord-Pacifique) Les Babines, eux, laissaient les femmes, a partir de leur puberté, porter une baguette entre les dents inférieures et.la lévre inférieure, de maniére a ce que cette 1é vre se détende, souvant exagérément, d’ot le nom de Ba bines (grosse lévre pendante comme celle du chien ou du singe), signe de beauté, ' paraft-il... Ces divers aborigénes avaient leurs propres caractéristi- ques: ---Les Sekanais, les plus honnétes et moraux --Les Carriers (transporteurs), fiers et progressifs ---Les Chilcotins, violents et peu scrupuleux LE PERE MORICE ET LES EXPLORATEURS: Le Pére Adrien-Gabriel Morice se penche, dans son volumineux ouvrage, sur les temps reculés de l'histoire des Indiens de (Ouest, avant la pénétration des blancs, soit de 1660 a 1765 - soit plus d’un siécle- puis celle de 1765 4 1791, mettant l’accent sur divers faits entre tribus et chefs de tribus, méme sur des affrontements sanglants. ; De 1792 a 1793, se place la découverte d’Alexandre Mackenzie qui, avec d’au- tres, ont fait l’objet d’une série d’articles publiés dans _Vhebdo “Le Soleil de Colombie”. A ce sujet, le Pére Morice aborde les priviléges extra- ordinaires de la Hudson Bay ‘toires, a l’origine, apparte- Company, fondée en 1670, suivant une Charte du Roi Charles II d’Angleterre. Elle basait ses opérations, par le monopole obtenu, sur toute - la région du bassin de la Baie d’Hudson et des tributaires, tandis que ses prétentions sur les vastes territoires de Vouest canadien lui étaient w= disputées par plusieurs marchands de Montréal, sur Shamam ou médecin-sorcie: Vallégation que lesdits terri- naient a la Nouvelle-France, que les prétentions anglaises étaient injustifiées par les clauses mémes de la Charte du Roi Charles IT. Comme les efforts indivi- duels ne pouvaient avoir les effets convaincants sur la puissante Hudson Bay Company (elle a 310 années d’existence en 1980), d’im- portants marchands montré- alais, dont Joseph Frobisher et Simon McTavish, unirent leurs intéréts, en 1783, et constituérent la North West -f& Fur Trading Company, écrit le Pére Morice, tandis que les historiens plus nombreux Pére Adrien G. Morice mentionnent North West Company. A ces fondateurs se joignirent de grands hommes et de grands explorateurs, comme Simon Fraser, Alexander Mackenzie, Peter Pond, David Thompson, Daniel Harmon etc. Avec ses hauts.et ses bas, elle ne dura que 38 années, contre 310 de sarivale la Hudson Bay Company, qui avait derriére elle 1’ eterre. En 1821, la Hudson Bay Company absorba sa rivale et eut peu d’égards a ses hommes valeureux 4 la fin de leur carriére. Simon Fraser, David Thompson, Daniel W. Harmon moururent dans la misére la plus ignoble. Le pére Morice leur accorde sa faveur, son estime post-mortem, surtout a l’égard de Simon Fraser et contre-attaque l’historien Hubert Howe Bancroft, de Californie (1838-1918) qui a cherché a minimiser les faits et gestes de Fraser, déja 4 26 ans, partenaire d'une puissante compagnie, donc pas une cervelle molle (Soft brain) cite A.G. Morice. ° 4 Le Pére Morice suit a la trace la narration de H.H. Bancroft dans son “History of the North West Coast of America”; a chaque attaque contre Simon Fraser, il y répond avec causticité et y rétablit les faits sous leur vrai jour. [A SUIVRE]