Référendum i tN I OR TR ARE Les réactions des francophones hors Québec De la resignation a l'espoir Dans l’ensemble du pays, les porte-parole des francophones sont généralement décus, mais pas surpris, des résultats référendaires. la Société des Acadiens et des Acadiennes. du Nouveau-Brunswick, on est fort satisfaitdes résultats du référendum dans la province. Selon le directeur général dela SAANB, Norbert Roy, ce vote prouve qu’un partenariat commence 4 se construire dans la province entre les communautés anglophone et francophone. Une clause de ]’entente de Charlottetown consacrait l’égalité des communautés francophones et anglophones du Nouveau- Brunswick, notamment le droit 4 des institutions d’enseignement et culturelles distinctes. Les Acadiens avaient donc une bonne raison de voter OUI, d’autant plus que opposition officielle est formée par un parti, le infederation of Regions, qui cherche 4 abolir les droits des francophones de cette province. Norbert Roy concéde que le vote acadien, majoritairement pour le OUI, a fait pencher la balance en faveur de l’entente, mais il s’empresse d’ajouter que plus de 60 pourcentdes néo-brunswickois ont -voté en faveur de I’entente. “Si on a atteint plus de 60 pour cent, il a fallu que certaines circonscriptions anglophones se prononcent pour le OUI,” ce qui est rassurant, selon Norbert Roy. Norbert Roy estime que le premier ministre McKenna a maintenant toute la justification morale et politique pourenclencher le processus menant 4 l’enchassement, dans 1’actuelle constitution canadienne, de]’égalité des communautés francophones et anglophones de sa province. En effet, cette modification constitutionnelle ne nécessite que le consentement du Parlement du Canada etdel’assemblée législative du Nouveau-Brunswick. L’avocat et constitutionnaliste acadien, Michel Bastarache, aurait souhaité un OUI plus fort chez les anglophones du Nouveau-Brunswick. “Avec lerejet dans l’ensemble du Canada, il fallait un mandat tres clair pour que M. McKenna proceéde @ Venchassement bilatéral,” selon Michel Bastarache. I] est quand . méme “relativement satisfait” des résultats au Nouveau-Brunswkci, et il croit que le premier ministre McKenna va quand méme aller de avant. : L’actuel président de la compagnie acadienne Assomption assurance-vie de Moncton s’est aussi dit “décu mais pas surpris” des résultats référendaires au pays. Cela est presque la preuve, ajoute Michel Bastarache, que le fédéralisme renouvelé est pratiquement impossible 4 réaliser avec _|’actuelle formule d’amendement. Les Québécois, ajoute-t-il, risquent maintenant d’avoira choisir entre deux options: le statu quo ou l’indépendance. A titre de vice-président du Comité du Canada pour le OUI, Michel Bastarache ne cache pas les difficultés rencontrées pour vendre l’entente de Charlottetown. II attribue ces difficultés aux médias qui, dit-il, ont préféré suivre les politiciens et les groupes marginaux. Selon ui, tout le battage publicitaire négatif qui a suivi le lancement officiel de la campagne du Comité du Canada pour le OUI, n’a eu aucun impact au sein de la population. “Ca beaucoup plus intéressé les médias que qui que ce soit d’autre.” Ontario: la lutte continue De son cété, le président de 1’ Association canadienne-frangaise de 1’Ontario, Jean Tanguay, a exprimé sa déceptionet sa surprise. Tout semble indigué, en effet, que les francophones du nord de l’Ontario ont voté majoritairement contre l’entente de Charlottetown. Selon le président de l’ ACFO, la récession, les difficultés économiques dans le nord de la province et le manque de confiance envers les chefs politiques expliquent ces résultats. Encesens, dit-il, les Franco-Ontariens du nord de la province avaient les mémes préoccupations que |’ensemble des citoyens. Lors d’une visite 4 Sudbury, Jean Tanguay a méme rencontré des Ontariens qui se préparaient 4 voter NON parce quwils étaient contre l’entente du libre-échange Canada-Etats-Unis- Mexique! La bourde du Comité du Canada lors du lancement de la campagne pour le OUI pourrait aussi expliquer le rejet de l’entente, selon Jean Tanguay. “Certains Franco-Ontariens indécis ont vu dans ce geste la non reconnaissance de la dualité linguistique.” Il ne croit pas que ce NON mettra un frein aux revendications de la communauté franco- ontarienne en ce qui concerne la gestion scolaire et le bilinguisme officiel. Méme si les politiciens ont Vintention de se consacrer uniquement...aux questions économiques, 17ACFO entend bientét revenir 4 la charge dans le dossier du bilinguisme officiel en Ontario. “C’est quand méme rattaché a l’économie lorsqu’une communauté a les outils pour s’épanouir et se développer.” A la Fédération des communautés francophones et acadienne, on se dit également décu mais pas surpris. “J/ fallait s’y attendre” selon le président de Ja FCFA, Raymond Bisson. Lors d’une récente tournée au Québec au sein du Comité du OUI, Raymond Bisson avait constaté que les Québécois se préparaient 4 voter NON le 26 octobre. Comme la plupart des observateurs, Raymond Bisson ne croit pas que la reconnaissance des communautés minoritaires dans l’entente de Charlottetown et l’engagement des gouvernements 4 leur €panouissement et a leur développement, ait eu une quelconque influence sur le vote. “La dualité linguistique n’a pas soulevé d’opposition et de débat. C’est pas ¢a qui a fait tomber V’accord.” Ceci dit, il regrette énormément que les francophones n’aient pu obtenir cet outil pour faire progresser leurs droits. Maintenant que _ les Canadiens ont dit NON 4 Charlottetown, Raymond Bisson pense que son organisme devra entamer d’autres discussions avec les gouvernements pour débattre de la gestionscolaire etdu financement des ententes Canada-communauté “pour qu’ils n’oublient pas notre présence.” N’a-t-il pas peur de se heurter 4 un mur d’indifférence? “Si on rentre chez-nous et on se croise les bras, il ne restera plus qu’a écouter les nouvelles a la télévision, ” lance Raymond Bisson. Déception et inquiétude a l'Ouest En Alberta, le président de I’ Association canadienne- francaise, Denis Tardif, trouve les résultats “extrémement désappointant”: “Onauraitpu, dit- il, s’attendre a une lutte plus serrée enAlberta et dans les provinces de V’Ouest.” Denis Tardif se demande maintenant si le gouvernement albertain aura la volonté politique d’adopter en troisiéme et derniére lectureson projet deloisurla gestion scolaire, et si le gouvernement fédéral voudra toujours assumerune partie du financement. “C’est la question de l’heure pour nous.” Denis Tardif n’est pas convaincu que ce projet de loi va étre adopté par la législature albertaine, au lendemain d’un rejet massif de Jl’entente de Charlottetown. “Sionajoutedcela la course a la chefferié, il y a d’autres préoccupations que cette loi-la.” ‘ Enfin, 1’Association culturelle franco-acadienne de la Saskatchewan (ACFC) a expliqué a son tour sa déception. Pour l’ACFC, le débat a permis de préciser les attentes des Canadiens en ce qui concerne, notamment, la réforme du Sénat, la reconnaissance des droits des autochtones, et l’épanouissement et le développement des communautés minoritaires de langue officielle. APF Le Soleil de Colombie LES REACTIONS DE LA PRESSE U BEC La Presse (Montréal) Et maintenant...., par Claude Masson “Qui et Non dehors ! Le trop long interméde référendaire est terminé. I] en restera des inimitiés, des tensions, des cicatrices. I] y aura des évaluations, des dissenssions, des réglements, des reglements de compte méme. Ce sera |’affaire de ceux et celles qui grouillent, grenouillent et scribouillent autour de la politique. (...) Il nous faut se remettre au travail. Il faut mettre le monde 4 l’ouvrage. il faut retrouver nos esprits et se fixer des défis sociaux, économiques, communautaires.(...)” Le Journal de Montréal A ce prix-la, par Jean Dufresne “Une victoire pour les force du non, mais surtout, une défaite pour les partisans du premier ministre Bourassa et son entourage qui, pour avoir voulu trop courtiser les nationalistes québécois, ont négligé avec une insouciance inexplicable le vote des fédéralistes hésitants, ceux-la mémes qu’il devait convaincre pour l’emporter, mais qu’il a abandonnés aux partisans du refus de Charlottetown. Quand onse fait mettre 4 la porte, il faut bien se trouver un gite ailleurs. Telle est selon nous la cause principale de la défaite du oui au Québec. M. Bourassa a fort bien défendu le nationalisme québécois, jusqu’a dissimuler la feuille d’érable sous le couvert de la fleur de Lys. Mais il a fort mal défendu le fédéralisme canadien A ceux-la qui devaientsceller]’issue de la campagne, le premier ministre n’a donné aucun motif de témoigner de leur foi dans un nouvel ensemble canadien. (...) Il sontdoncallés rejoindre cette cohabitation toute provisoire qui, conjuguée aux forces péquistes, puissamment légitimér par Jean Allaire, a fait pencher la balance de |’autre cété. (...)” Le Soleil (Québec) Le glas des minauderies, par Raymond Giroux “Le référendum d’hier a sonné le glas des minauderies politiques. Une majorité de provinces et d’électeurs a refusé d’approuver le consensus élitiste que l’ensemble de la classe politique lui offrait en guise de solution a la crise constitutionnelle. (...) Pourquoi avoir refusé l’Accord de Charlottetown? Bien simple: il était mauvais en soi. L’image d’un Canada des contradictions qu’il offrait, les symboles indéfinissables qu’on ytrouvait, la garantie d’instabilité permanente promise pardes négociations en cascade, tout cela a effrayé. (...) Le non des Québécois n’a rien a voir avec un appui a la souveraineté. (...) Le non des Canadiens, de son cété, ne peut-étre interprété comme une gifle aux Québécois(...).” AU -UNIS The New-York Times — : Les Canadiens rejettent la réforme visant a présever I'unité, par Clyde H. Farnsworth “Le vote d’aujourd’hui ne signifie pas un démantélement immédiat du Canada, mais il accroit la probabilité que le Québec se constitue en nation distincte, comme de nombreux autres groupes nationaux dans le monde de]’aprés guerre froide. (...) Ce résultat pourrait entrainer des cons€quences dépassant de beaucoup le rejet de l’accord de Charlottetown. II pourrait compromettre l’avenir politique de M. Mulroney et de son gouvernement conservateur. (...) Le résultat pourrait également compromettre l’avenir de M. Bourrassa, qui a fermement soutenu |’accord de Charlottetown contre son rival M. Parizeau, chef du Parti Québécois. Seattle Post-intellingencer Le Canada rejette massivement le projet de réforme, par Jeffrey Ulbrich “Le rejet de ]’accord donne un nouvel essorau mouvement indépendantiste du Québec et la perspective d’un démantélement du Canada devient envisageable a long terme. A court terme, cependant, il est probable que les dirigeants canadiens mettent de cété le débat constitutionnel et maintiennent le systéme actuel.(...)” EN FRANCE Le Monde Un double rejet “Les Canadiens ont d’abord rejeté le fond d’un accord pourtant conforme a une tradition du compromis, en vertu de laquelle cet immense pays, bati comme un défi a la géographie, a pu rester uni. Mais l”heure n’est plus aux accommodements quand la récession économique, qui dure depuis avril 1990, fait toujours plus de ravages. Les Canadiens de 1’ Ouest ne voulaient pas d’un texte qui, estimaient-ils, faisait la part trop belle at Québec. Les nationalistes francophones estimaient qu’ ils n’obtenaient pas assez de ces pouvoirs jugés indispensables pour poursuivre leur développement économique et culturel. Cette fin de non-recevoir est aussi unclairdésaveu des dirigeants politiques (...).” Agence France Presse Echec magistral du référendum “Les Canadiens ont magistralement rejeté lundi un projet de réforme de leur constitution, bravant les mises en garde de leurs dirigeants politiques sur les conséquences d’un vote négatif, lors d’un référendum national, le troisiéme organisé depuis la création de la Confédédation canadienne en 1867. Cet échec retentissant est également celui de l’ensemble de la classe politque canadienne. (...)” Vendredi 30 octobre 1992