- |La menace | felquiste par Pierre SAINT-GERMAIN LA PRESSE. ee eee Ce n’était pas une insurrection popu- laire que craignaient les gouvernements fédéral et provincial (du Québec) lors de la crise d’octobre, mais ils ne pou- vaient minimiser la menace felquiste et la gravité des répercussions possibles de V’action terroriste, de désordres ci- vils incontrélables. C’est l’un des points de vue qu’expose le secrétaire d’Etat du Canada, M. Gé- rard Pelletier, dans son livre “la Crise d’octobre”’ qui doit étre lancé en fin d’a- prés-midi, aux Editions du Jour (si les locaux de celles-ci, rue Saint-Denis, ne sont pas encore occupés par des mem- bres du Mouvement de défense des pri- sonniers politiques québécois (MDPPQ)). Dans cet ouvrage de prés de 300 pages, qui “veut étre un effort d’ana- lyse, le plus honnéte possible’, l’auteur s’explique sur son attitude pendant les *“événements” et défend, pour l’essen- tiel, les positons prises par les autori- tés, y compris la promulgation de la loi des mesures de guerre. “Je ne parle qu’enmon nom et ’en- gage que moi-méme”’, souligne l’auteur dans son avant-propos. Son livre, a-t-il précisé hier, n’a pas été soumis, avant détre édité, a ses collégues du gouver- nement, “‘sauf un, et pas le principal’’. L’évaluation du risque -Selon M. Pelletier, il n’était pas possi- ble — dans la phase de l’évaluation du risque qui a précédé les décisions gou- vernementales — d’écarter purement et simplement Vhypothése que le FLQ était effectivement aussi puissant et or- ganisé qu’il le prétendait lui-méme. Dans cette évaluation, l’auteur pré- cise que élément déterminant, en ce qui le concerne, fut l’existence au Qué- bec d’un grand nombre de sympathi- sants felquistes conscients ou incon- scients, ainsi qu’un ensemble de faits et de présomptions qui rendaient possible Véventualité de désordres -ivils graves, a Montréal en particulier. Il existait et existe encore au Québec, selon M. Pelletier, deux ou trois mille personnes qui, sans avoir des liens or- ganiques directs avec le FLQ, peuvent se laisser entrainer a l’action violente (demonstrations spontanées ou organi- sées tournant 4 l’émeute, attentats plus ou moins graves, pillages, etc.). . D’autre. part, poursuit l’auteur, les gouvernements ont’ di tenir compte, dans leur analyse dela situation, de Vactivité des différents mouvements de. contestation au Québec, et notamment des indices de concertation et de ras- semblement des forces favorables a la cause du FLQ et presumement sympa- thiques a ses moyens d’action. gomiomasuaoua Satara enn Dans une sorte de portrait-robot du FLQ, dessiné pendant la crise, M. Pelle- tier décrit ainsi ce dernier: — a) Un noyau de 40 4 50 extrémistes (peut-€tre 100), préts a poser des bom- bes et a faire des enlévements, voire a commettre des meurtres. b) Un groupe plus restreint ou “‘cel- lule permanente”, se tenant a Vécart de l’action violente directe. Ce constituerait 1’élément rédacteur et pro- pagandiste du FLQ. c) Une ceinture de quelque 200 a 300 sympathisants actifs, préts 4 appuyer les terroristes, en les aidant financiére- ment, en les cachant, etc. d) Une périphérie de sympathisants plus ou moins passifs, qui, sans étre membres du FLQ, souhaitent sa vic- toire et approuvent ses méthodes. Ces cellules-pantouflese (sic) compteraient environ 2,000 a 3,000 membres. De plus, M. Pelletier soutient ‘que le FLQ possede encore des réserves consi- dérables d’explosifs et de détonateurs”’. “La police évalue ces réserves a envi- ron deux tonnes de dynamite — assez en tout cas pour causer de véritables catastrophes”, écrit-il en brossant un tableau de I’ ‘‘escalade de la violence”’. L’échec de Ia négociation Pour ce qui est “de l’avortement de la négociation entre les pouvoirs publics et la cellule dite de Libération”, l’au-- teur l’impute a ‘l’entrée en scene d'une autre cellule du FLQ, la cellule de fi- nancement Chénier (celle qui a enleve M. Pierre Laporte). Expliquant le refus gouvernemental de liberer les prison- niers “politiques” (sic), M. Pelletier af- firme: “Des lors qu’on envisage le chantage au meurtre comme un précédent proba- ble, on se heurte a une logique implaca- ble, dont le premier constat est que, tot ou tard, l’autorité devra dire non au chantage. Car il est évident que si Varme s’était révélée efficace, d’autres cellules du FLQ l’auraient certainement utilisée de nouveau pour leur propre compte, avant d’en partager le mono- pole avec la pégre ou avec d’autres mouvements clandestins.” Fléches contre le PQ Il n’est pas possible, dans le cadre de ce compte-rendu fait a la suite d’nne lecture rapide, d’exposer tous les as- pects de l’analyse de M. Pelletier. Il est beaucoup question, par exem- ple, du Parti arene L’auteur trouve regrettable, surtout injustifié, mais iné- vitable, “qu’il y ait confusion entre un pour l’indépendance et un parti qui est identifié 4 la cause de l’indépendance”’. Cependant, M. Pelletier considére no- tamment que “la condamnation de la violence terroriste par le PQ: s’est fait ‘attendre longtemps” et a trouvé “‘in- quiétant que, dans leur manifeste, lese membres du FLQ aient pu citer René Léxesque sans provoquer aussit6t une mise-au point de la part de celui-ci, dans le style catégorique qu’on lui connait”’. Tl est clair que ces points de vue vont susciter de vives réactions de la part de M. Lévesque. On peut s’attendre aussi a une riposte de M. Pierre Bourgault, qui est pris 4 partie par M. Pelletier. Ce dernier formule en outre lI’hypothése que les événements d’octobre provoque- ront une scission, “si ce n’est déja fait’, entre l’aile radicale du PQ et son aile modérée. M. Pelletier aborde plusieurs autres sujets, dont celui des abus auxquels a donné lieu l’application des mesures de guerre. Il se prononce pour le dédom- magement des victimes innocentes. L’auteur de ‘‘la Crise d’octobre”’ croit encore et croira toujours, écrit-il, “que des hommes raisonnables, quelles que soient leurs dissensions ou leurs diver- gences, restent capables du minimum de confiance mutuelle qui leur permette de se rapprocher dans une commune ré- flexion”. Sans la foi les uns dans les au- tres, conclut-il, il n’y a plus pour le Qué- bec, pas davantage que pour le Canada ‘ou n’importe quel groupe humain, au- cun avenirqui soit digne de nos efforts. a sie L’indépendance du Québec par Claude TURCOTTE LA PRESSE aa ieee OTTAWA — Des forces vi- tales poussent. irréversible- ment le Québec a |’indépen- dance et la plupart des dé _ marches faites actuellement par le gouvernement fédéral pour empeécher cette ten- dance ne peuvent étre que superticielles. C’est ce qu’est venu procla- mer hier en face du parle- ment canadien, M. René, Lée- vesque, président du Parti ' Québécois, qui avait été in- vite comme conférencier par le Centre National de la Presse: C’était en méme temps pour M. Lévesque le debut d’une tournée annuelle de cing jours dans l’ouest du Canada. A titre d’exemple pour dé montrer le résultat des dé& marches fédérales, M. Léves- que a pris le cas du pro- gramme spécial d’embauche de 276 jeunes fonctionnaires francophones, annoncé la veille, “les trois quarts d’en- tre eux seront probablement des membres de notre parti’, a fait valoir le chef pequiste. Pour indiquer que le Qué bec est neitement engagé sur Ja voie de l'indépendance, il a signale aussi le congres ré- cent des créditistes provin- ciaux, qui veulent se moderni- ser et se rajeunir. Il a expli- que que les campagnes sont toujours plus lentes que les ~ villes a suivre les courants politiques, mais une fois en- gages les ruraux ne démor- dent pas facilement. Bref, M. Lévesque, qui s’a- dressait surtout a des audi- teurs anglophones, a fait va- loir que le Canada anglais a autant intérét que Québec a faciliier un changement de Structures dans l’ordre, sinon il y aura quand méme un changement mais d'une ma- niére beaucoup plus brutale ct plus couteuse pour les deux groupes. Une camisole de force Le leader du PQ a soutenu que la Confédération est de- venue, depuis que le Québec s’éveille, une camisole de force, dont on essaie de sor- tir présentement comme le faisait naguére le prestidigi- tateur Houdini. Il a mentionné qu'il y a 100 ans, cette Conféderation pou- vait convenir au Québec; le Canada est un pays, qui fut congu a Jorigine pour faire René Lévesque a Ottaw une place a ce que M. Léves- que a appelé “un bossu pro- fessionnel”, c’est-a-dire le Quebec. _Laos (Suite de la page 1) ricains de Khé Sanh, sont énormes. Toutes les posi- tions sud-vietnamiennes et américaines sur un front s’étendant du Laos jusqu’au Sud-Vietnam, le long de la route numéro neuf, sont sou- mises A de trés nombreux harcélements a4 la roquette et A l’artillerie. Une quarantaine de sapeurs nord-vietnamiens ont atta- qué la base de Khé Sanh 4 l’issue d’un trés violent bombardement. Les Amé- ricains qui ont eu deux tués ont réussi 4 repousser 1’ad- versaire, 20 Nord-Vietna- miens ont été tués. Six hé- licoptéres ont été-détruits. _ A Hanoi, l’agence de presse nord-vietnamienne a annon- cé hier que des appareils américains avaient A nou- veau violé l’espace aérien au nord du 17éme paralléle. Un hélicoptére a été abattu, précise l’agence qui ajoute que le 21 mars les forces armées et la population de. Quang Binh et Ha Tinh ont abattu six avions améri- cains. Le commandement améri- cain a reconnu pour sa part hier qu’un chasseur bombar- dier avait été abattu par un missile ‘‘SAM”’ alors qu’il effectuait une mission de bombardement au-dessus du Nord-Vietnam. Les deux pi- lotes ont été sauvés par un hélicoptére. Cet appareil, un ‘*Phantom’’ est, selon le commandement améri- cain, le 195€me chasseur bombardier 4 réaction abattu ‘par des fusées ‘‘SAM”’’ de- puis le début de la guerre. D’autre part, sur le-front nord-laotien, d’aprés les dé- clarations faites par le mi-_ nistre laotien delégué 4 la défense, les forces d’extré- me-gauche qui avaient atta- qué l’aéroport de Louang Prabang, ont décroché en abandonnant 200 morts sur le terrain aprés la contre- attaque gouvernementale. Le ministre a précisé que les asSaillants refluaient main- tenant vers le nord-est et qu’ils se heurtaient 4 qua- tre compagnies gouverne- mentales demeurées sur leurs arriéres alors qu’ils s’infiltraient vers la capi- tale royale. Plusieurs ba- taillons gouvernementaux sont arrivés A Louang Pra- bang et le commandant de la place ne désespére pas de prendre les unités d’ex- tréme-gauche au piége. ‘On estime 4 Vientiane que 1’ aéroport pourra étre rou- vert dans une semaine, quand les forces royales auront repris toutes les positions qu’elles avaient dQ évacuer. LE SOLEIL DE VANCOUVER, 2 AVRIL 1971, Ill. ° ie: