14 Education: «Enjeu National»-Volume III, Semaine du 2 avril 1990 Pour les «exclus du egraney Vers un réseau national postsecon daire par Anne Gilbert ors du réseau, point de salut. Un nombre croissant de franco- phones hors Québecen sont convaincus face aux diffi- cultés pour accéder aux études postsecondaires. Ils sont peu nombreux et inégalement répar- tis sur un territoire immense. Leur poids relatif est souvent trés faible. De fait, pour repren- dre l’expression employée par le Commissaire aux langues officielles dans son rapport de 1987, ils ont été en régle géné- rale «exclus du banquet» auquel a été conviée la clientéle poten- tielle des services et program- mes d’études postsecondaires presque partout au pays. La solution serait de coor- donner les efforts en matiére d’éducation supérieure en fran- ¢ais par le biais d’une structure commune de planification et de gestion des ressources. En d’au- tres mots, elle résiderait dans la création d’un réseau réunissant les établissements postsecondai- res de la minorité, existants et a venir. Un tel réseau aurait l’avan- tage de pouvoir offrir des pro- es et des services diver- sifiés et de haute qualité. Il reflé- terait les intéréts, les besoins et les aspirations de la francopho- nie, tout en étant un de ses prin- cipaux outils de développement. Principe inaltérable: l'autogestion «Le contréle des écoles par les francophones est essentiel», rappelait Raymond Poirier, pré- sident de la Commission natio- nale des parents francophones, al’issue du jugement de la Cour d’appel du Manitoba sur les garanties incluses dans la Charte canadienne des droits et liber- tés. La gestion francophone de l’éducation en frangais est né- cessaire pour assurer un projet éducatif qui réponde aux besoins et aux aspirations des commu- nautés francophones. Ce principe devenu leitmotiv des groupes et associations fran- cophones a l’échelle du pays s’applique autant, en toute logi- que, aux paliers élémentaire et secondaire qu’au palier postse- condaire. Son respect au niveau des études avancées nécessite néanmoins des ajustements majeurs d’un systéme d’éduca- tion dont l’efficacité est ralentie par les frontiéres provinciales, quand elle n’est pas assujettie a la soi-disante autonomie des uni- versités. Contraintes de la géographie Laréalité estsimple. Laclien- téle réduite et les ressources li- mitées imposent une organisa- tion des services qui déborde le cadre étroit des provinces. Une planification d’ensemble est nécessaire. Elle exige une colla- boration étroite entre les institu- tions desservant les communau- tés francophones des différen- tes régions du pays. Cette concertation doit per- mettre l’unité d’action néces- Saire ala prestation d’une gamme compléte de services. Elle doit en méme temps préserver 1’ au- thenticité des communautés francophones des différentes régions et des besoins particu- liers deleuréconomie. D’un bout a l’autre du pays, on est inflexi- ble quant a la nécessité de met- tre en place une structure la plus décentralisée possible, qui parte des acquis de l’éducation post- secondaire en frangais. Bases du réseau Ces acquis sont loin d’étre e 59.000 mots © 2200 pages LE PETIT £ © dictionnaire analogique de la langue francaise LE MOT JUSTE : ROBERT e dictionnaire de la langue francaise © 35000 mots © 1470 pages un vrai dictionnaire pour les enfants 20 000 mots 1 220 pages 80 planches en couleurs 2, : : B®) DICOROBERT (514) 745-0510 négligeables. Il existe cing campus au réseau d’édu- cation collégiale en fran- ¢ais au Nouveau-Bruns- wick. La Cité collégiale vient d’étre créée a Otta- wa. Sur le plan universi- taire, la communauté aca- dienne s’est dotée del’ Uni- yersité de Moncton. Le Collége Saint-Boniface et la Faculté Saint-Jean jouent un réle important dans 1’éducation universi- taire des francophones de l’Ouest. Des universités ontariennes offrent un certain éventail de pro- grammes et de services en francais 4 la communauté franco-ontarienne. Reste maintenant, au- oy as Bh VEUK ed '.. \W0S Travaux par copiéur = cen mig [ cd. os ‘ iia Rares dela des difficultés prati- ques a contrer, a faire col- laborer ces institutions entre el- les etavec leurcommunauté res- pective afin d’en constituer des p6les plus importants du déve- loppement des francophones du pays. L’expérience des collabo- rations naissantes dans le sec- teur de la formation 4 distance montre que c’est possible. Amorce de collaboration Le développement conjoint de programmes de formation 4 distance s’intensifie partout au Canada. De l’avis de Pierre Pelletier, président du Réseau francophone d’enseignement postsecondaire a distance du Canada, «il faut voir 14 une indi- cation sérieuse du désir des ins- titutions a travailler ensemble a l’expansion des programmes of- ferts aux francophones». L’Ontario frangais a vu nai- tre des collaborations extréme- ment fructueuses a ce chapitre: par exemple l’Université d’Ot- tawa et l'Université Lauren- tienne collaborent a 1’extension de la maitrise en éducation, dans diverses localités de la province. Ce programme est également accessible aux francophones de la Saskatchewan, grace a la col- laboration du Collége Mathieu. Les possibilités sont infinies. Et si on se fie a l’enthousiasme montré autour d’un projet comme celui qui a réuni quatre institutions ontariennes pour le développement d’un programme professionnel de baccalauréat pour infirmiéres et infirmiers licenciés, les expériences actuel- les sont porteuses d’espoir. Au centre des revendications L’idée d’un réseau d’éduca- tion en francais fait son chemin en Ontario. Le Conseil de 1’édu- cation franco-ontarienne (CEFO), soutenu par les orga- nismes franco-ontariens en éducation, en a fait la pierre an- gulaire de ses revendications en faveur d’un systéme d’éduca- tion en langue francaise com- plet: de la garderie 4 l’universi- té. Le président sortant de l’or- ganisme, Marc Godbout, a dé- fendu a maintes reprises l’idée de créer non pas seulement un, deux ou méme trois colléges de langue frangaise dans la pro- vince mais un réseau d’ensei- gnement collégial, capable de rationaliser les services et pro- grammes offerts, en tenant compte des particularités régio- nales. Il est tout aussi catégorique sur le besoin d’un tel réseau au niveau universitaire: «Il nous faut dans les plus brefs délais et sans gymnastique incroyable un réseau chapeautantles program- mes et services universitaires de langue frangaise en Ontario. Ne créons pas d’empire régional, ne créons pas de monuments ala prospérité, créons un réseau de services et de programmes qui répondent aux besoins et aux attentes des nétres». Un certain consensus La mise en place d’un tel réseau ontarien serait-elle pour bient6t? Le concept fait l’objet d’un consensus de plus en plus étendu. II rallie méme les insti- tutions bilingues actuelles aux partisans les plus achamés de l’université de langue frangaise. Pour Pierre Pelletier, qui est aussi directeur du service de -l’Education permanente de l'Université d’Ottawa, «l’ave- nir de 1’éducation universitaire en francais est lié 41a création de mécanismes de concertation entre les institutions qui en ont la responsabilité». Il croit que leurs actions concurrentielles freinent l’expansion des pro- grammes en frangais, au double détriment des institutions et de la communauté. Dans ce contexte, le réseau apparait comme un instrument de choix pour assurer aux fran- cophones un plus grand con- tr6le des ressources humaines, physiques et financiéres 4 leur disposition. En reliant, au sein d’une méme structure, les élé- ments d’éducation universitaire en frangais disséminés au sein du territoire, le réseau annonce l’avénement de l’université de langue frangaise préconisé par les délégués 4 la derniére As- semblée générale annuelle de 1’Association canadienne-fran- caise de 1’Ontario, en juin 1989. Responsabilité du fédéral Une question subsiste, et non la moindre. Qui doit assumer la responsabilité du dossier? Cer- tains diront que les institutions se dirigent tout naturellement vers une plus grande collabora- tion, dans un contexte budgé- taire de plus en plus serré. Ils ajouteront, a la lumiére du peu de succés rendu par la plupart des initiatives gouvernementa- les non soutenues des commu- nautés, qu’il faut laisser le ré- seau Se batir peu a peu, grace au travail de personnes convain- cues de ses retombées dans leur milieu respectif. Les associations francopho- nes insistent au contraire sur la lenteur des progrés réalisés en matiére de concertation. Elles demandent des comptes aux institutions bilingues qui ne fe- raient pas le réseautage néces- saire 4 une éducation postsecon- daire de qualité en francais. Pour les leaders francopho- nes du pays, le principal respon- sable du dossier reste sans con- tredit le gouvernement fédéral. Ne s’est-il pas engagé «a favori- ser l’épanouissement des mino- rités francophones du Canada et a appuyer leur développement» (article 41, Loi sur les langues officielles)? A leur avis, la mise en place du réseau national d’éducation postsecondaire en francais est une occasion révée de traduire cet engagement dans la réalité. Anne Gilbert est journaliste pigiste a Ottawa