St Pauvre et splendide Mexique par Roger Dufrane Un coq enroué se dérouille la voix et tous les oiseaux s’éveillent. Aucun ne file la méme chanson et cette sym- phonie toujours nouvelle ani- me l’arbre d’en-face d’un concert prime-sautier. Dé- ja les chiens aboient. Un homme descend la ruelle au pas de sa mule. Un mou- ton béle. Le jour vient. Les petites villes du Mexi- que n’ont pas encore chassé de leurs murs les animaux qui, au cours des siécles, ont tant soutenu l’homme dans son labeur et sa sub- sistance. Dans les cités d’ Amérique du Nord, il faut un permis pour pouvoir gar- der dans son enclos poules et lapins ; et aucun grillon ne chante sur les pelouses sournoisement envenimées. A Jalapa, les animaux do- mestiques vivent et meurent | 4 l’ombre des maisons. On transporte dans les autobus la volaille caquetante et aux pattes liées. Les Anes grim- pent les ruelles avec leur chargement d’oranges. Les ‘fvaqueros’’ descendent de la montagne, fringants, mon- tés sur de piaffants chévaux. Les rues sentent parfois 1’ étable. Mais A cOté de cet inconvénient que d’avanta- ges ! Le tempo de l’exis~ tence est d’un calme salu- taire ; et les citadins peu- vent savourer une plus fraf- che nourriture. Fruits, oeufs et légumes, sont d’une sa- veur incomparable. Ces produits potagers con- juguent leurs couleurs et senteurs dans le marché couvert de Jalapae On y trouve, non seulement des comestibles, mais aussi des produits d’artisanat : pa- niers, fauteuils de jonc, pot- teries émaillées, sandales, vétements. Sur les marches, de noiraudes indiennes, aux cheveux tressés de rubans de couleurs vives, vantent leurs orchidées. Pourquoi, me dit mon hdte, avoir choisi pour batir une ville, un lieu ot il pleut tant ? Presque partout au Mexique le soleil brdle sans tréve, alors qu’a Jalapa, en juin et juillet, il pleut A torrents tous les jours de deux 4 sixheures de l’aprés- midi. Ce mariage du soleil et de la pluie donne une couleur intense aux arbres, aux fleurs, aux papillons, aux Oise aux-mouches. Le chemin qui méne 4 ma résidence serpente entre de lourdes végétations et -des masures badigeonnées de chaux. Ces minables logis amusent les yeux par leur pittoresque et donnent envie d’en brosser un tableau. De-' vant sa bicoque, une ména- gére pétrit dans une auge de pierre sa lessive qu’elle laissera sur l’herbe blanchir au soleil. Une autre, sur le seuil de sa porte, tapote des tortillas. Un gamin che- mine. Il est coiffe d’un cha- peau-panier, 4 larges bords, ou il transporte je ne sais quoi sous une serviette. Des cavaliers passent au trot, les enfants en croupe. Et sur ce spectacle vibre le chant infatigable des passe- reaux. Dimanche. Ce matin, le centre de Jalapa s’anime comme un jour de semaine A quoi s’ajoute un air de fé- \ ~~ — te. Sur le parvis de la rose cathédrale, laquelle perdit une de ses tours lors d’un tremblement de terre, une grosse marchande de bal- lons siffle dans un pipeau pour appeler les enfants, et . jette dans l’azur des notes multicolores. Au parc, les photographes ont fort affaire et les cireurs de chaussures clappent de la langue et de la brosse. Il subsiste ici, malgré la Ppauvreté qui surgit au tour- nant des rues sous la figure ridée de petites vieilles A la main tendue et qui pour un peso vous abreuvent de bénédictions, il subsiste un agrément qu’on ne trouve plus dans 1’Amérique anglo- Saxonne, celui de pouvoir faire le badaud. S’asseoir sur un banc de parc, siro- ter une boisson a laterrasse d’un café, errer dans les galeries, quel plaisir ! Les cris de la rue, les gestes ‘|nées et toute la matinée des camelots, les couleurs des facades, les rires des femmes, tout cela égaye et grise un peu. Si quelques miséreux arborent un visa- ge inquiet, la plupart des gens sont joviaux et exubé- rants. Tout le monde tra- vaille et tout le monde a l’air de flaner. Vendeuses, coiffeurs, restaurateurs, travaillent de longues jour- du dimanche. Et pourtant on ne leur voit pas cette figure grave, professionnel- le, dutravailleur septentrio-} nal. Le marchand mexicain| n’hésite jamais A faire un brin de causette. Au moment de se quitter, le client et lui €changent mille polites- ses qui paraftraient super- flues aux Américains. (A suivre )} Recettes theGtrales Une visite au théatre doit satisfaire tous nos sens, comme un bon repas satis- fait notre appétit. La semaine derniére, au Metro, nous avons eu, du 20 au 23 avril, un véritable ‘*smorgasbord’’ de piéces en un acte lors du Festival du B.C. Drama. Beaucoup de’ groupes ont participé : les Vagabonds de New Westminster, le West Vancouver Theatre, North Vancouver, Delta, White Rock et VLTA pour n’en ci- ter que quelques-uns. Ces groupes sont constitués de personnes qui aiment faire du théatre et qui consacrent leurs loisirs 4 répéter. Certains appelleraient ce- la un vice, mais je pense que c’est un vice construc- tif et communicatif. Les par- ticipants de ce festival ont certainement appris quelque chose, car chaque soirée s’est terminée sur une cri- tique des piéces, faite par Tom Kerr, éminent homme de théatre. Samedi passé, il nous a présenté une ses- sion pratique sur la scéne du. Vagabond Playhouse, pe- tit théatre colonial char- mant, situé au Queen’s Park. Utilisant la distribution de ‘“*We’re Due in Eastbourne in Ten Minutes’’, une farce Satirique de l’Anglais N.F. Simpson, M. Kerr nous a montré qu’en changeant le décor et la disposition des meubles, les acteurs avaient plus de liberté de mouve- ment, les entrées étaient plus visibles et les gags vi- suels trois fois plus drod- les. Dans presque toutes les productions du Festival, l’aspect visuel était le plus faible, le metteur en scéne et les acteurs s’intéressant Surtout au texte. Pourtant, le dessinateur du décor et le créateur des effets d’é- clairage peuvent apporter aussi des contributions es- sentielles 4 une piéce. Cha- que détail est important, il ne faut pas une chaise 1960} dans un décor 1930. Cela choquerait le public et dé- truirait l’illusion et la vé- rité que les acteurs essaient d’établir. Le plaisir des gastronomes du théatre dépend de l’habi- leté des chefs-metteurs en scéne. En attendant les Cor- dons-Bleus, nous sommes obligés de consommer quel- ques plats brfalés ou indi- gestes - mais la cause est bonne, n’est-ce peed Bal du Printemps Malgré la concurrence de la célébration 4 la Caisse de Maillardville et du bal ‘qui suivit, le Groupe Fran- cophone réussit A attirer presque une centaine de per- sonnes a4 son bal du prin- temps. ‘ Le bal fut mené rondement par l’orchestre ‘‘Les Dyna- miques’’ qui remporta en- core une fois un grand succés. : Toutes les personnes pré- | sentes passérent une soirée joyeuse et pleine d’entrain. Les jeux de Mme Froment firent disparaftre le peu de réserve qui pouvait rester parmi les danseurs et l’or- chestre fit le reste pour faire de cette soirée une grande réussite. Le bal était au profit de l’école St Sacrement et le Groupe Francophone annon- cera, la semaine prochaine, le montant total revenant A 1’école. C’était le dernier bal de la saison pour le Groupe Fran- cophone. Les activités sont maintenant passées & l’ex- térieur et le prochain ren- dez-vous sera le 30 mai pour le rallye automobile familial ou en copains. In- formation et inscription au- prés d’André Dilas, tél 526-6953. Jean RIOU. COMMUNIQUE VOYAGE ECHANGE Jeunes de 16 A 21 ans. A Vancouver du 9 au 21 aoadt. A Ottawa : du 21 au 29 aott. Dépéchez-vous ! Tél. 526-9616 ou 874-4175 Fédération Canadienne- | Francaise, Groupe Franco- phone. LE SOLEIL, 30 AVRIL 1971, V