LOUIS RIEL : JOURNAUX DE GUERRE ET DE PRISON (présentation, notes et chronologie métisse 1604-2006 par Isméne Toussaint) Les Editions Stanké/Quebecor média nous autorisent aimablement a publier ces extraits du nouveau livre d’lsméne Toussaint, Louis Riel : Journaux de guerre et de prison. A I’occasion du 120° anniversaire de la mort du patriote métis et de la renaissance de son mouvement au Manitoba et dans |’Estrie, elle réédite ces écrits peu connus du grand public qui nous dévoilent des facettes inédites de Louis Riel : ’étre intime, l’6crivain, le diariste, le condamné en proie aux affres du gibet mais plein d’espoir pour l'avenir du peuple métis. « La mort se met a cété de moi, dans mon lit. Au moment ou le sommeil commence a me fermer les yeux, elle me parle tout bas : sa voix me pénétre jusqu’au fond du coeur. Elle me dit que l’'assoupisse- ment est un exercice a la mort. Fais attention, me dit-elle, comment arrive ton sommeil. C’est a peu prés comme cela que je me présente- rai a toi, le jour ou il faudra que tu m’acceptes. Je te fermerai les yeux comme fait le sommeil. Je prendrai possession de toi de la méme fa- con que le repos s’empare de tes sens. Et le réveil que je te permet- trai ne sera pas de ce monde-ci. Car je ne te rendrai tacconnaissance que pour te mettre en rapport avec les choses de |’éternité. » La mort me révéle combien elle est attachée a moi. Elle me parle af- fectueusement en me disant : « Je suis ton épouse. Je ne veux pas te tourner le dos. Jamais tu n’entendras dire que je t'abandonne. Je te suis fidélement partout ol tu vas. Je cherche continuellement a t'em- brasser. Car je t'aime. Loin de toi, je m’ennuie! Tout mon désir est de tavoir et de te posséder. Quand tu te sens indisposé, malade, n’ou- blie pas que je suis a toi et que c’est moi qui tache de fixer ma de- meure chez toi. Un moment viendra que je te prendrai. Ton dernier soupir sera le signe de mon alliance avec toi. Et lorsque tes parents et tes amis, lorsque tout le monde te fuira ; et désertera la place ou tu seras mis, moi, la mort que tu n’aimes pas et que tu crains tant, je me ferai néan moins ta compagne fidéle. Qui est-ce qui pourra me séparer de toi ? Qui est-ce qui viendra te sortir de mes bras ? Qui est-ce qui troublera notre union, lorsque je te presserai sur mon sein dans la tombe ? 27