Le Moustique Edition No 10 Aoi 1998 suite..... Enfin, le rejet ou l'adoption de ces innovations concourt a son évolution. Dans ce schéma, on per¢oit l'importance du génie ou de l'artiste qui, en bouclant son propre cycle, se pose en messager du renouveau et comme le catalyseur d'un cycle au niveau supérieur. Or notre époque est emportée dans une spirale évolutive forcenée qui se matérialise par une soif désespérée de changement. On en arriverait a dire, dans un langage commercial, que le nombre d'artistes ou de génies ne satisfait plus a la demande. Forcés d'augmenter la production d'idées nouvelles, les auras seront-elles toujours garantes de qualité ? Il est vrai que pour satisfaire a la curiosité gourmande de la société, on emprunte parfois, faute d'imagination, les voies faciles du mauvais gout. Ce n'est pas un fait entiérement nouveau. Suite a cette nouvelle contrainte du temps pressé, il a pris, sans doute, une certaine dimension. Egalement responsable, il y a cette crainte un peu snob de ne pas apercevoir le changement, comme en ont été les victimes nos parents, lors de la réaction contre l'académisme a la fin du siécle dernier. Alors, on avale n'importe quoi, on justifie n'importe comment, on admire comme on peut. Mon fils, en extase a l'écoute du hard rock, représentait pour moi l'expression d'un des plus grands mystéres de la nature. Trés humble, je lui ai demandé de m'aider a comprendre. Au moment méme, j'ai pu lire dans son regard qu'aucun espoir ne m'était laissé. J'ai tenté tout de méme d’'y voir clair. Il est vrai que je n'aime pas avoir lair « irrécupérable ». Et, en fait, c'était simple ! Dans un élan de grande pitié condescendante mon fils s'était exclamé un autre jour :- « écoutez comme c'est beau, admirez cette dextérité ». C'était cela, la réponse :...la technique ! Non pas l'Art déja, mais la phase préliminaire. Non pas des artistes, mais des instrumentistes remarquables, des techniciens habiles, des décorateurs de gout. Les expériences des Klee et des Miré qui ont réduit les paysages a des équilibres de formes et de couleur. Des découvertes fondamentales dans la techniques de la peinture qui, une fois maitrisées ouvriront les portes de l'art renouvelé. Rappelez-vous la renaissance italienne. Avant Giotto, les personnages d'un tableau se superposaient pour faire le nombre et le fond doré compensait l'absence de perspective. Les Saints, avec leurs auréoles d'or sur fond d'or, paraissaient rangés comme des sardines en boite de luxe. Giotto, a remplacé le fond doré par le paysage, devenant de la sorte un naturaliste. De surcroit, précurseur de la perspective, ses personnages donnent enfin l'impression de se mouvoir sur des plans différents. C'est une révolution ! C'est une conception toute nouvelle. Giotto a été adulé et est encore célébre. Pourtant ses toiles sont un peu miéyres et les roches de ses paysdages sont sans texture comme si la terre était uniforme et homogene. Alors, est-ce un artiste ou un technicien innovateur ? Dans ce temps impatient, l'homme est bloqué au stade de l'expérimentation, la société devient l'esclave de la mode et le messager du renouveau se transforme en voyageur de commerce. Dans notre monde en pleine effervescence ou les découvertes se succédent a une vitesse folle, les nouvelles techniques, les nouveaux médias sont tellement abondants que l'on a plus guere le temps d'atteindre a l'art. Quelques années de patience, encore ? Quand ce flux de nouveautés sera maitrisé, on recommencera a dépasser la technique et a recréer l'art. Mais regardez bien autour de vous. Comme les crocus sous la neige, on entrevoit déja de bien jolies choses. Humbles d'apparence, car la maitrise d'une grande technique donne l'impression de la facilité, elles ont ce quelque chose de plus qui justifie notre présence sur terre. Croyez-moi, on en reparlera ! Katana.