—— Le CRTC entre le cable et la télévision Rendues publiques vendredi dernier’ dans un climat de hate qui n’en favorisait guere l’'examen approfondi, les nouvelles directives du Conseil de la radio-télévi- sion canadienne au sujet de la télévision par cable risquent de compliquer, plutét que de résoudre, les problemes auxquels elles prétendent apporter des solutions. Sous prétexte que le cable sert surtout présentement a la transmission de si- gnaux de télévision, le CRTC parle de ce moyen de transmission comme s’il re- levait entierement de sa compétence: il commet de ce fait une pétition de principe inadmissible. Soucieux de régler des pro- blemes concrets de coordination qui re- quiérent des solutions urgentes, il propose, d’autre part, des remédes qui demeurent tres obscurs et risquent de donner naissan- ce a des difficultés innombrables au chapi- tre de I’ application. Tout le document du CRTC repose sur le postulat voulant que la diffusion par ca- ble fasse partie intégrante du ‘“‘systeme uni- que” de radiodiffusion sur lequel la loi fédérale de 1968 lui a donné une large au- torité. ‘‘Lorsque le CRTC parle d’intégrer la television par cable au systeme de radio- diffusion, déclare le document, il ne fait donc que développer la politique adoptée antérieurement par le Parlement”’. Partant de ce postulat, le CRTC s’ar- roge sur les entreprises de cable une autorité tres étendue portant autant sur emission des permis que sur la program- mation et les aspects financiers. Qu il existe surtout a ce stade-ci du développement des communications, des liens évidents d’interdépendance entre le cable et la télévision par ondes, . c'est l’évidence méme. I] est donc normal que le CRTC ait voulu examiner de .plus prés les liens existants entre cable et télévi- sion aérienne, et qu'il ait songé a des me- sures visant a proteger le systeme cana- dien de radiodiffusion. oe Mais la diffusion d’émissions de télé- vision produites par les stations classiques "est qujun aspect | 2 ( ssible du HENS Vie ia aed Cea creat iieeeake OS SER sert surtout pour le moment a4 doubler ou a prolonger la télévision classique. Il se- ra appele demain a jouer, dans les domai- nes de l'information, de l'économie, de la vie culturelle, de l’activité communautaire, des roles beaucoup plus diversifiés. Le cable; concu dans sa nature méme et a travers léventail tres large de ses fonctions éventuelles, releve-t-il au pre- mier chef et en totalité d'un organisme fé déral comme le CRTC? Celwi-ci peut-il prendre prétexte des liens existant entre le cable et la télévision pour parler com- me s'il était appelé a régir tous les aspects du développement éventuel de la diffusion par cable? Ae Le CRTC parle comme si ces ques- tions étaient réglées. Il oublie trop facile- ment que le seul article de la loi de 1968 qui lui donne autorité en cette matiére est vraisemblablement l'article 3, ou il est question ‘‘d’entreprises de réception de dif- fusion’: on cherche en vain, dans cette loi, toute autre mention le moindrement expli- cite du cable, ce qui explique probable- ment que le CRTC invoque toujours |’auto- rité de la loi en termes on ne peut plus enveloppés et généraux. Il faut voir la question du cable dans la perspective plus large de tout le proble- me des communications 4 l’intérieur d’une société. Vu dans cette perspective, le ca- ble ne fait pas que présenter un ‘intérét certain pour le Québec: il y a’ méme des raisons tres sérieuses de soutenir qu'il doit relever de I’Etat québécois plutét que del’ Etat fédéral. ; Il efit été capital que le document du CRTC soulignat clairement cette distinction. Sauf une tres vague référence introductoi- re a des consultations entreprises par Ot- tawa avec les provinces ‘‘sur les conclu- sions du rapport de la Télécommission’’, on ne trouve malheureusement, dans le tex- te du CRTC, aucune réserve de cette sorte. L’attorité fédérale a été la premiére a oc- cuper ce champ nouveau: elle en parle dé sormais comme si ce fait lui conférait- un droit prépondérant et plénier sur I’ensemble du secteur. ‘@ Indépendamment des problemes a long terme, le CRTC devait proposer des solu- tions a des problemes urgents d’intégration qui se-posent d’ores et déja entre le cable et la television. L’utilisation que le cable fait présente- ment d’émissions produites par des stations _ de télévision est une véritable piraterie. Le _ développement désordonné du cable pour- - rait, d'autre part, entrainer une fragmenta- tion des auditoires et des revenus commer- ciaux susceptibles de compromettre |’a- venir du systeme classique de radio-télé vision. L’Association canadienne de la télévi- sion par cable, s’appuyant sur le soi-disant droit des abonnés, refusait 4 cet égard toute idée de versement d'un droit quelconque aux producteurs des emissions; elle réclamait, pour son développement, une liberté a peu pres totale. L’Association canadienne des -radiodiffuseurs, pour sa part, ne demandait rien de moins que !’annexion a peine dégui- sée des entreprises de cablodiffusion aux en- treprises de television par ondes. Ni l'une ni l'autre de ces positions n’é tait acceptable. Le libéralisme préconisé par les porte-parole de l'industrie du cable reposait sur des sophismes grossiers mé connaissant gravement les droits des pro- ducteurs. L’annexion souhaitée par les ra- diodiffuseurs devait étre rejetée au nom méme de cette vocation beaucoup plus large du cable dont il a été question plus haut. Jouant les Salomon, le CRTC prescrit que les entreprises de cable devront payer des redevances pour les émissions qu’ elles empruntent aux stations de télévision. Il accorde aussi 4 ces derniéres un monopole sur les revenus “de la réclame commer- ciale. i Le principe de la redevance est juste: chacun doit payer pour les éléments dont il se sert afin de mettre un produit sur le mar- ché. Il semble toutefois qu’en pratique, l application de cette décision doive donner lieu a des difficultés considérables. Sur quelle base établir de telles redevances? Comment tenir compte des mille et un fac-. teurs qui devront étre retenus? ‘Cette formule, déclaraient en avril les radiodif- fuseurs devant le CRTC, est pour nous la plus compliquée, la plus difficile 4 adminis- trer, la moins désirable et la moins prati- que de toutes pour les intéressés”. Les entreprises de cable avaient fait valoir, quant a elles, combien peu une telle mesu- re se justifie en fonction du degré actuel: de développement économique de chaque sec- teur. Le CRTC est conscient de ces difti- cultés. Aussi a-t-il laissé aux parties in- téressées le soin.d’établir par voie de né& gociation les bases d’un accord. On doute qu’un tel accord. puisse se réaliser 4 bréve echéance, Quant; a la réclame commerciale, le CRTC n’a pas justifié interdiction quil | adresse a cet égard aux eptreprises de ca- ble. Il existe de nombreux types de réclame qui pourraient trés bien convenir 4 ce mé- - dium. Pourquoi réserver d’autorité au mé- dium déja le plus choyé la totalité du ga- teau? Ce qui fait défaut, dans le document du CRTC, c’est un examen approfondi de la nature du cable et de la place qu’il doit occuper au sein de la communauté. Une étude plus sérieuse eft conduit le CRTC a formuler a cet égard des recommandations importantes non seulement au chapitre de la programmation et de la réclame commer- ciale mais aussi au chapitre de’ la pro- prieté et du statut juridique. Cette perspec- tive est malheureusement absente dans le document du CRTC. @ Le CRTC avait le devoir d'intervenir afin de régler certains problémes urgents. Le document publié vendredi est cependant décevant. Il suppose réglées des questions de fond qui ne le sont pas. Au chapitre des ‘questions qui relevent immédiatement de sa compétence, le CRTC cherche a trancher la poire en deux d’une facon qui risque de ne satisfaire ni les dirigeants de l'industrie du cable, ni ceux des entreprises de télévision. La decision du CRTC aurait gagné & rester plus longtemps sur le métier. Le Devoir, | Claude RYAN Le Soleil, anciennement Le Soleil de Vancouver, fondé en 1968 et L?Appel, fondé en 1965, est un journal independant lpublié chaque semaine par Le Soleil de Colombie Ltée, Case Postale 8190, Bureau L, Vancouver 14, C.-R. Directeur-Rédacteur en chef : Directeur administratif : Rédacteurs : Avec la collaboration de : Gilles'Aerts Jacques Baillaut Alain Clerc ; Brigitte Clerc . Gerry Decario Roger Dufrane Myriam Bennett. ~ Robert Bennett Jean-Claude Arluison i NOM Daniel Edmond Girault A.A. Hards i ‘Ladislas Kardos Jennifer Lulham : . Carmen Primeau Jean Riou : Le Soleil Tél. 266-9422 lontroty d‘abonnement 266-9422 Abonnement [] ‘Réabonnement. C) ee eceoe eeccccccceccccceccesocccc eds 3 eee € © © CSOSSHSHCCSSCESHSHSSLTSABEEOS BEE” VILLE : « c e si oie Boe Lis PROVINCE : .ecccccccs DATE :essecceesccesees .Boite Postale 8190 | Station L | Vancouver, 14, B.C. ‘lan 6 mois : Il, LE SOLEIL, 30 JUILLET 1971