Conférence de Monsieur Jacques Bertoin a l'Alliance frangaise de Victoria, le 3 avril 2002. Monsieur Jacques Bertoin, conseiller culturel au Consulat général de France a Vancouver, a tracé pour ses auditeurs l'itinéraire de l'hebdomadaire politique et économique international, Jeune Afrique, auquel il a lui-méme collaboré. A l'origine de ce journal, un Tunisien, Béchir Ben Yahmed, qui en est toujours le directeur. Ben Yahmed vient d'un milieu tres pauvre, a été élevé a la dure; évoquant son enfance, il dit qu'il n'avait méme pas de chaussures, mais qu'il a arrété de se plaindre quand il s'est rendu compte que d'autres n'avaient méme pas de pieds. Grace a l'instituteur Monsieur Lacoste qui a remar- qué les dons du jeune gargon, Yahmed a pu continuer, dans le meilleur lycée de Tunis, des étu- des brillantes qu'il a poursuivies ensuite & Paris aux Hautes Etudes Commerciales. Il se joint au mouvement pour l'indépendance de la Tunisie, le Néo-Destour, dont Bourguiba est le chef et pour qui il écrit discours et lettres. Se pose alors pour Yahmed la question de l'action politique. Il décide qu'il pourra agir par la parole, par le journalisme. Il choisit donc de devenir pigiste pour le Petit Matin dans les années cinquante. En 1955, Pierre Mendés-France négocie le traité devant mener a l'indépendance de la Tunisie. Cette méme année, aprés avoir contacté des personnalités oeuvrant en France pour le Monde, le Nouvel Observateur et l'Express, Yahmed lance a Tunis le premier numéro de I'Action, hebdomadaire prénant le nationalisme. Bient6t, il pense qu'il faut un journal non seulement pour la Tunisie, mais pour toute l'Afrique. Ainsi nait Afrique Action qui est d'abord rédigé et imprimé a Rome, car c'est la guerre d'Algé- rie. En 64, la rédaction s'installe a Paris et, un peu plus tard, le journal prend le nom de Jeune Afrique puis, tout récemment, celui de Jeune Afrique lintelligent. Ben Yahmed a réussi a garder un journal indépendant basé, quant au fond, sur quelques princi- pes fondamentaux auxquels il reste fidéle et qui peuvent se résumer ainsi: il s'est toujours oppo- sé au pouvoir personnel des chefs d'Etat; il croit 4 l'union des Etats plutét qu'a leur division; il pense que l'Afrique doit régler ses problémes elle-méme, tout en prenant en considération les autres que ce soit les pays d'Europe ou les Etats-Unis. En conclusion a son exposé trés informatif, Monsieur Bertoin a indiqué que la France semble aujourd'hui se désintéresser de l'Afrique, comme en témoigne le fait que ni le Président, ni le premier Ministre n'ont cru bon d'assister aux funérailles de Léopold Senghor, poéte et chef du Sénégal, et aussi que l'Afrique est totalement absente de la campagne présidentielle actuelle. Malgré cela, malgré de nombreuses difficultés financieéres et de distribution, le journal continue a se diversifier, a atteindre un public relativement nombreux et a accomplir sa mission d'ouvrir une large fenétre sur l'Afrique. Monique Genuist